8 minutes de lecture 9 nov. 2022
Quatre questions fiscales que les entreprises privées devraient se poser maintenant

Quatre questions fiscales que les entreprises privées devraient se poser maintenant

Par EY Canada

Organisation de services professionnels multidisciplinaires

8 minutes de lecture 9 nov. 2022

Coécrit par Irina Rakhimova, chef d’équipe senior, Fiscalité, EY Privé, et Gabriel Baron, associé, Fiscalité, EY Privé

Tandis que cette année – qui a apporté son lot de complexité – touche à sa fin, les entreprises privées ont beaucoup d’éléments à prendre en compte afin de préserver leurs avoirs. 

Questions à poser

  • Un ralentissement du marché immobilier est‑il un bon moment pour un gel successoral? 
  • Une fondation de bienfaisance peut‑elle renforcer notre plan patrimonial et successoral?
  • Offrons‑nous à nos employés des mesures d’intéressement optimales pour éviter le désengagement discret?
  • Comment pouvons‑nous lutter contre la hausse des taux d’intérêt aujourd’hui? 

Volatilité des marchés. Mesures inflationnistes. Modifications réglementaires. L’environnement opérationnel actuel est complexe, et il est difficile de prévoir ce que 2023 nous réserve. Dans ces circonstances, la planification fiscale est encore plus importante pour les propriétaires et leur famille. 

Effectuer une planification fiscale stratégique à l’approche de la fin de l’année civile peut ouvrir la porte à tout un lot d’occasions pour favoriser le progrès, préserver les avoirs et stimuler les résultats. En vous posant ces quatre questions maintenant, vous pouvez vous retrouver en excellente posture pour comprendre les nombreuses façons dont la planification fiscale stratégique peut favoriser la durabilité et la rentabilité dans l’avenir :

1. Un ralentissement du marché immobilier est‑il un bon moment pour un gel successoral?

Nous avons tous constaté une baisse du prix des biens immobiliers ces derniers mois. Toutefois, cette tendance pourrait aussi peser sur la valeur des entreprises. Il pourrait s’agir du bon moment pour envisager un gel successoral. Qu’est‑ce que cela signifie?

Au Canada, au moment du décès d’un contribuable, les actifs avec une plus‑value qui sont détenus personnellement sont assujettis à l’impôt sur les gains en capital comme s’ils avaient été vendus à leur valeur au moment du décès. Ces actifs comprennent notamment les actions de sociétés privées, dont les sociétés d’exploitation ou de portefeuille qui peuvent détenir des placements de portefeuille ou des biens immobiliers.

Dans un contexte de planification fiscale, une opération de gel successoral consiste à fixer la valeur d’un placement (habituellement les actions d’un groupe privé de sociétés) et à rediriger la croissance de ce placement de sorte qu’elle soit transférée à une fiducie familiale, à des particuliers ou à une société de portefeuille, afin que la prochaine génération ou certains particuliers en profitent. En même temps, les actionnaires existants pourront cristalliser la valeur réduite de l’entreprise au moment du gel, obtenant ainsi une certitude sur leur impôt à payer au décès. Ceci permet de transférer plus de richesse aux successeurs.

Réaliser un gel successoral peut être complexe et demander des discussions approfondies avec des comptables fiscalistes et des conseillers juridiques qui connaissent le droit fiscal, le droit des fiducies et le droit de la famille. Si vous envisagez cette avenue, veillez à vous informer sur la règle de la disposition réputée tous les 21 ans qui s’applique aux fiducies. Par ailleurs, envisagez le recours à une police d’assurance‑vie souscrite par la société pour financer l’impôt à payer découlant du décès. Dans le cadre d’une structure appropriée sur le plan fiscal, le simple fait de souscrire une police d’assurance peut réduire l’impôt à payer au décès. 

2. Une fondation de bienfaisance peut‑elle renforcer notre plan patrimonial et successoral? 

Les dons de bienfaisance peuvent donner accès à de nombreux avantages en matière de planification fiscale. Par exemple, faire un don aujourd’hui procure un avantage fiscal lié au capital donné. Le don peut servir d’abri dans les années à revenu élevé du donateur ou dans les cinq années d’imposition suivant celle du don si les déductions ne sont pas toutes utilisées immédiatement.

De façon générale, le versement d’un don de société à un organisme de bienfaisance enregistré permet une déduction d’impôt pour dons de bienfaisance de société allant jusqu’à 75 % du revenu imposable. Pour un don effectué à titre personnel, le donateur qui réside en Ontario aura droit à un crédit d’impôt d’environ 50 cents pour chaque dollar donné.

En outre, le don d’actions d’une société publique au Canada entraîne un traitement avantageux puisque la disposition de ces actions au moment du don n’entraîne pas d’impôt sur le gain en capital. Il est recommandé d’établir la combinaison optimale des dons à effectuer dans le cadre de votre stratégie de planification fiscale globale.

Par exemple, vous vendez des actions d’une société ou réalisez un autre type de gain en capital dans la société. Le don de 37,5 % du produit reçu pourrait réduire l’impôt à payer à l’égard de ce gain en capital, lequel serait normalement imposé au taux de 25 %. Le taux d’imposition effectif pourrait ne s’élever qu’à environ 6,3 % voire moins si d’autres mesures de planification fiscale sont prises. Et cette stratégie ne se limite pas strictement à la vente d’une entreprise. Elle peut aussi être utilisée dans le cadre d’une stratégie de planification successorale globale pour réduire l’impôt à payer d’une société dont les intérêts sont gelés.

Enfin, la philanthropie peut aussi être envisagée si vous songez à mettre en œuvre un gel successoral ou à créer une fiducie familiale. Dans ce dernier cas, des organismes et fondations de bienfaisance peuvent être désignés comme bénéficiaires.

La création d’une fondation privée pour votre famille ou votre succession vous donne un plus grand contrôle sur la manière dont les dons sont investis, sur les organismes qui en bénéficieront et sur les objectifs de bienfaisance de la fondation au fil du temps. La fondation de bienfaisance peut aussi faire partie de l’héritage familial, en permettant à chacun de faire des dons par l’intermédiaire d’une seule entité.

La hauteur des dons prévus et les avantages de créer une fondation privée doivent être soigneusement examinés, car l’organisation et l’exploitation d’une telle fondation comportent un fardeau administratif plus important que le versement de dons à des organismes de bienfaisance choisis. Les obligations d’observation annuelles comprennent la production de déclarations de renseignements auprès de l’Agence du revenu du Canada (ARC) et le respect du contingent des versements, lequel s’élève actuellement à 3,5 % des biens qui ne sont pas utilisés dans le cadre d’activités de bienfaisance, par le versement, chaque année, de dons d’un montant suffisant. Et il faut savoir que ce contingent pourrait passer à 5 % en 2023 par suite des propositions législatives adoptées en août 2022.

Il y a beaucoup d’aspects à envisager; assurez‑vous d’étudier cette possibilité en profondeur. Hormis la fondation privée, des fonds gérés par les donateurs et administrés en externe peuvent servir notamment à atteindre des objectifs semblables et à réduire les obligations d’observation. 

3. Offrons‑nous à nos employés des mesures d’intéressement optimales pour éviter le désengagement discret?

Le marché des talents se transforme en temps réel. Les technologies en évolution ouvrent de toutes nouvelles possibilités de carrière. Les fossés générationnels créent des écarts importants. La démission et le roulement des employés déséquilibrent des équipes déjà fatiguées par les perturbations liées à près de trois ans de pandémie.

Les hausses salariales ont leur limite, notamment dans un marché inflationniste comme celui‑ci. Cela étant dit, combiner des idées novatrices à la planification fiscale stratégique peut favoriser le recrutement et le maintien en poste des talents. Par exemple, les stratégies de rémunération différée permettent aux entreprises privées d’offrir à leurs employés une quote‑part contractuelle. L’avantage? Le paiement est reporté à un moment futur, comme la vente de l’entreprise ou un départ à la retraite.

Ou alors, des régimes de droit à la valeur d’actions temporairement incessibles lient le paiement à un moment précis ou à un jalon de rendement. Cela permet aux entreprises privées de conserver des employés clés aujourd’hui et de les motiver grâce à un avantage financier à long terme.

De façon similaire, l’octroi d’options d’achat d’actions peut permettre aux employeurs qui sont des sociétés privées sous contrôle canadien (SPCC) d’offrir un avantage unique : les options octroyées ne sont pas imposables pour l’employé lorsqu’elles sont exercées. Dans ce cas, un avantage imposable n’est ajouté au revenu que lorsque l’employé vend les actions, de sorte qu’il s’agit d’un encouragement important et d’une occasion de report d’impôt non négligeable.

Si certains critères sont remplis, un employé peut aussi déduire la moitié de l’avantage imposable qu’il aurait dû par ailleurs inclure dans son revenu d’emploi, même si les options d’achat d’actions étaient dans le cours et dilutives au moment de l’attribution. Si les options sont exercées, que les actions continuent de s’apprécier et qu’elles sont détenues pendant deux autres années, les gains en capital sur la croissance à compter de la date d’exercice peuvent être mis à l’abri de l’impôt grâce à l’exonération cumulative des gains en capital de l’employé, pourvu que certaines conditions soient remplies.

Ces autres formes de rémunération peuvent se révéler précieuses pour les entreprises privées qui cherchent à retenir les meilleurs talents dans un marché en évolution. Néanmoins, le recours à l’une de ces options demande une analyse méticuleuse des coûts et des avantages de même que des subtilités juridiques qui l’accompagne. C’est particulièrement vrai pour les options d’achat d’actions, lesquelles peuvent conférer une véritable participation à un employé qui pourrait tout de même finir par quitter l’entreprise, tout en demeurant actionnaire. 

4. Comment pouvons‑nous lutter contre la hausse des taux d’intérêt aujourd’hui? 

Les taux d’intérêt sont en hausse, tout comme le taux d’intérêt prescrit sur les prêts aux fins de fractionnement du revenu familial, lequel s’élève désormais à 3 %. Autre fait important : l’avantage imposable découlant d’un prêt à intérêt faible consenti à un employé ou à un actionnaire est assujetti au même taux d’intérêt prescrit de 3 %.

Mises ensemble, ces hausses de taux d’intérêt signifient que le fait de devoir des sommes à l’ARC est de plus en plus coûteux. Par exemple, la production tardive d’une déclaration de revenus des sociétés peut entraîner des pénalités calculées à raison de 5 % du solde dû, plus 1 % par mois complet après la date d’échéance. Les intérêts sont exigés sur les pénalités et le solde dû au taux prescrit de 7 % et sont composés quotidiennement. C’est un bond important par rapport au même moment l’année dernière.

Ajoutez à cela que l’ARC exige désormais des intérêts de 7 %, composés quotidiennement, sur toutes les dettes fiscales et que ces intérêts ne sont pas déductibles d’impôt, et vous verrez pourquoi il est si important de faire des acomptes suffisants dans les délais requis. Autrement, les intérêts sur les arrérages pourraient être plus élevés que le rendement possible des fonds investis.

Il s’agit là d’une occasion de prendre les devants sur les taux d’intérêt et de préserver vos liquidités en faisant un suivi stratégique des acomptes à verser cette année. C’est le bon moment pour réfléchir à la manière dont vous gérez les versements d’impôt, les remboursements attendus et les flux de trésorerie en général.

Résumé

Qu’est‑ce que les entreprises privées doivent retenir en matière de fiscalité?

La fin de l’année civile est un bon moment pour passer en revue l’année écoulée et penser à la stratégie à adopter pour l’avenir. C’est tout particulièrement important dans un contexte tumultueux, lorsque des facteurs macroéconomiques et autres redéfinissent la réalité d’une journée à l’autre.

Les entreprises privées – et les familles qui les dirigent – qui se posent ces quatre questions pourront désormais tirer le meilleur parti de cette période pour effectuer une planification fiscale intelligente, résiliente et suffisamment solide pour résister à ce qui s’en vient.

Communiquez avec nous si vous avez des questions concernant ces idées de planification fiscale. 

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