4 minute read 17 Dec 2021
Les CFO et CRO au cœur de l’agenda stratégique des banques à Luxembourg

Les CFO et CRO au cœur de l’agenda stratégique des banques à Luxembourg

By Dorian Rigaud

EY Luxembourg Partner, Banking and Capital Markets Leader

Focused on CFO services. Leading several IFRS, credit risk and finance optimization projects. Statutory and consolidated audit of banks in Luxembourg (IFRS and Lux GAAP).

4 minute read 17 Dec 2021

Dans un contexte économique, règlementaire et sanitaire en perpétuel mouvement, les directeurs financiers et les directeurs des risques ont réussi à transcender leurs rôles traditionnels en se positionnant comme des partenaires stratégiques incontournables.

Sans doute encore marquées par les conséquences de la crise financière de 2009, les filières finance et risque ont été sollicitées de manière soudaine et intense lors de la crise du Covid-19 et ont dû faire preuve d’agilité et de résilience.

Dans ce contexte, les directeurs financiers (« Chief Financial Officer » ou « CFO ») et les directeurs des risques (« Chief Risk officer » ou « CRO ») prennent de plus en plus d’importance dans la transformation des banques. La transformation n’est plus limitée à un projet exceptionnel, mais devient un mode de fonctionnement courant ; avec l’exigence d’une agilité de tout instant qui découle à la fois du contexte économique et de la pression règlementaire.

Celle-ci constitue une opportunité d’accroitre l’efficacité opérationnelle et permet également de faciliter l’accompagnement de la direction générale et des métiers dans la planification et le pilotage de la stratégie. Le support à la direction générale et au développement de l’activité commerciale s’impose comme une des priorités des directeurs financiers à Luxembourg et en Europe.

La crise sanitaire a été un révélateur puis un accélérateur de cette nouvelle réalité. En effet, afin de répondre à cette situation exceptionnelle, les CFO et CRO ont dû trouver des solutions pour produire des données suffisamment granulaires et de qualité en temps réel, avec par exemple un suivi au jour le jour des niveaux de liquidité. Au-delà du pilotage en « temps réel » de la banque, ils ont également dû revoir leurs processus afin d’accroitre les capacités de projections, comme l’illustre le besoin de revoir le budget périodiquement en fonction de l’évolution de la situation.

En définitive et comme en témoigne la dernière étude EY auprès des CFO des banques (EY flash survey, octobre 2020), la crise Covid-19 aura certes impacté négativement la rentabilité, notamment via le coût du risque. Mais, elle aura renforcé l’agilité de la fonction finance et accru son positionnement stratégique.

En novembre dernier, lors de l’Annual Banking Conference qui a eu lieu dans les locaux d’EY Luxembourg, les CFO et CRO des banques de la Place ont confirmé l’importance de la poursuite de cette transformation avec un agenda qui s’articule autour des priorités suivantes :

1)    La réduction des coûts

2)    L’agenda réglementaire

3)    Le support aux métiers

 

La priorité reste à la réduction des coûts pour 25% des CFO de la place.

Celle-ci passe par la transformation digitale et la redéfinition des processus, d’une part, l’utilisation optimale de la technologie d’autre part, et enfin par la redéfinition de l’organisation du travail.

Depuis plusieurs années, les infrastructures informatiques des banques à Luxembourg, réputées trop lourdes et vieillissantes, se trouvent dans une phase de rattrapage sur le plan de la digitalisation et de la rationalisation, comme en témoignent les nombreux projets en cours. Les CFO et CRO sont au cœur de ces projets structurants et sont présents à toutes les étapes.

Un des enjeux d’efficacité réside dans le rapprochement des données risques et finance au sein d’un datawarehouse commun. Il s’agit d’un des multiples exemples pour lesquels les priorités des CFO et CRO convergent.

Une infrastructure informatique inadaptée et une qualité insuffisante des données restent encore aujourd’hui les principaux freins à la digitalisation des processus.

Par ailleurs, cette phase de digitalisation implique une organisation nouvelle avec des équipes plus resserrées et transverses ; des équipes aux profils et aux compétences nouvelles.

Pour un secteur financier parfois perçu en déficit d’attractivité auprès des nouvelles générations, cette phase de transformation et les défis qu’elle implique sont d’autant plus de moyens d’attirer et de retenir des talents.

Enfin, confronté à un environnement mouvant depuis 2009, les banques à Luxembourg sont entrées dans un processus de redéfinition profonde de leur stratégie et de leur organisation que la crise Covid-19 a relancé avec une remise à plat de l’organisation des équipes, leur localisation et des modes de collaboration. Concrètement, plusieurs banques de la place ont fait évoluer leur stratégie immobilière afin de réduire le temps de transport des collaborateurs, faciliter l’innovation et optimiser les coûts. Le développement du télétravail et la délégation des fonctions non-essentielles s’inscrivent pleinement dans cette stratégie.

 

Au-delà de l’optimisation des coûts, le suivi de l’agenda réglementaire reste l’une des préoccupations principales pour plus de 24% des CFO et CRO.

D’abord, comme le laissent entendre les priorités post-pandémie de la Banque Centrale Européenne (BCE),[1] l’entrée en application de la CRR IV et la volonté de la BCE de voir confluer les approches et les modèles marque la phase finale de l’implémentation des mesures consécutives à la crise financière. On pense ici aux « backstop » réglementaires qui incitent les banques à réduire la taille de leurs portefeuilles de crédits douteux tout en renforçant la convergence des politiques de provisionnement.

Aussi, on observe une convergence des attentes des régulateurs et des directions générales quant au besoin de données fiables, en temps réel.

Cette convergence se fait d’autant plus prégnante au moment d’inclure la performance et les risques environnementaux, sociaux et de gouvernance. La mesure de la création de valeur dépasse les notions financières. Il est donc impératif de l’incorporer dans le pilotage des banques. Au-delà de cette mesure globale de la performance, il s’agit d’une attente de plus en plus marquée des différentes parties prenantes et la règlementation sur le sujet se fait de plus en plus contraignante.

La prise en compte de ces nouvelles problématiques passera par une collaboration accrue entre CFO et CRO dans la collecte de nouvelles données et l’évolution des outils et processus existants.

Ensuite et en réaction à la pandémie, les régulateurs ont accru l’intensité de la supervision, que ce soit sur la gestion du risque de crédit ou sur la liquidité. Il est probable que cette évolution devienne maintenant la norme.

 

Enfin, le support aux métiers et la croissance de l’activité sont les priorités à plus de 12 mois pour 50% des CFO interrogés

Ce support passe par une évolution de l’exercice budgétaire et un développement des capacités de projection.

Post pandémie, les priorités se concentrent autour de :

-          L’utilisation de scénarios stressés ;

-          La prise en compte de l’incertitude avec plus de flexibilité dans les projections ;

-          L’accroissement de la granularité des paramètres ;

-          Le processus de prise de décision en temps réel.

C’est par le biais de l’exercice budgétaire que les CFO et CRO mettent à disposition des métiers leur compréhension profonde des flux de transaction et de l’historique pour construire la croissance de l’activité bancaire de demain.

En parallèle des évolutions organisationnelles, informatiques et réglementaires et dans un contexte de crise pandémique, les inducteurs clés de l’activité commerciale sont revus sous le prisme d’une granularité adaptée et avec des données sources fiabilisées, et ce, afin de libérer la prise de décision de potentiels biais hérités du passé. En somme, l’historique est revisité sous un angle plus fin, dans une volonté de connecter les performances du passé avec les assomptions internes à la Banque et à des paramètres économiques observables.

D’autre part, parmi les nouveaux enjeux du CFO et du CRO, la capacité à réaliser un suivi en temps réel de la réalisation du plan est prépondérante. Ils se posent en agents de pilotage et dépositaires de la bonne remontée de l’information. En somme, les CRO et CFO sont vecteurs d’instantanéité et d’agilité pour les banques dans la mise en œuvre de leur stratégie commerciale.

Pour finir, forts d’une capacité d’anticipation chaque fois plus importante, les CFO et CRO se posent en partenaires privilégiés dans la conduite de l’activité commerciale.


[1] ECB Banking Supervision’s post-pandemic priorities – the way forward (europa.eu)

Summary

Les CFO et CRO renforcent leur statut de partenaires incontournables sur trois dimensions clés pour les banques aujourd’hui à Luxembourg : la bonne conduite des projets de transformation, les exigences réglementaires et le développement de l’activité commerciale.

About this article

By Dorian Rigaud

EY Luxembourg Partner, Banking and Capital Markets Leader

Focused on CFO services. Leading several IFRS, credit risk and finance optimization projects. Statutory and consolidated audit of banks in Luxembourg (IFRS and Lux GAAP).