5 minutes de lecture 16 févr. 2021
Duvel Moortgat

La nature des entreprises familiales : portait de Duvel Moortgat

Par EY Belgique

Organisation de services professionnels et multidisciplinaires

5 minutes de lecture 16 févr. 2021

Voici la success story de Duvel Moortgat, l’ambassadeur du Family Business Award of Excellence 2019.

Avec Michel Moortgat comme CEO de Duvel Moortgat, c’est la quatrième génération de cette famille de brasseurs qui tient les rênes. Et c’est justement cette génération qui a permis à l’entreprise de se développer comme jamais au cours des 20 dernières années. Elle a mis plus de produits sur le marché et s’est positionnée à l’étranger, et ce fut la formule gagnante de la success story écrite par la famille Moortgat. Entretien sur la croissance, la famille et le coronavirus.

Pouvez-vous décrire brièvement l’histoire de votre entreprise ?

« L’entreprise fut fondée en 1871 par mon arrière-grand-père Jan Leonard Moortgat. Nous fêtons donc cette année notre 150e anniversaire. Nous sommes à présent la quatrième génération à la tête de l’entreprise, et c’est une chose dont nous sommes très fiers. Il n’est pas exagéré de souligner que notre famille se caractérise par une véritable tradition brassicole : même le père et le grand‑père de mon arrière-grand-père — vous suivez toujours ? (rit) — étaient brasseurs. D’ailleurs, jusqu’après la Seconde Guerre mondiale, deux brasseries portaient notre nom : Moortgat à Steenhuffel et Moortgat-Duvel à Breendonk. Et, afin de dissiper tout doute : les activités de Steenhuffel n’avaient rien à voir avec la Brasserie Palm. Pour résumer, nous pouvons dire que notre lien familial et notre artisanat brassicole remontent au XVIIe siècle. »

En rationalisant notre structure actionnariale à l’époque, nous avons évité à l’entreprise d’être paralysée par trop d’avis divergents
Michel Moortgat
CEO Brasserie Duvel Moortgat

Une quatrième génération, cela peut induire une structure actionnariale fragmentée, et une telle fragmentation peut vite entraîner des désaccords concernant la gestion de l’entreprise…

« Une quatrième génération signifie bien souvent plein de cousins et cousines éloignés, des personnes qui ne sont plus vraiment si liées par les liens familiaux, avec pour conséquences les difficultés que l’on sait. Ceci est caractéristique des entreprises familiales, mais pour éviter cela, nous avons procédé à une importante restructuration dans les années 90. C’était à peu près au moment où la troisième génération nous a passé le flambeau. À l’époque, mes frères, une cousine éloignée et moi‑même avons racheté les parts de nombreux membres de la famille. Mes frères et moi, en particulier, sommes alors entrés en possession de la plupart d’entre elles. »

Cette nouvelle structure actionnariale signifie-t-elle également un changement de cap ?

« Nous avons réalisé une analyse SWOT de notre entreprise — un exercice important, voire indispensable. Il en est ressorti que notre force était également notre faiblesse. Avec Duvel, nous avions un produit fort, mais nos activités se cristallisaient trop autour de cette seule marque. Dans le même temps, nous nous concentrions essentiellement sur le marché belge, un marché brassicole naturellement très intéressant, mais cela nous rendait aussi très vulnérables. Nous avons donc décidé d’amorcer un mouvement de croissance reposant sur deux axes : une croissance interne, en amenant de nouveaux produits sur le marché, et externe, en adoptant un profil plus international. Parmi nos nouveautés, c’est peut-être Vedett qui a connu le plus grand succès. Nous avons également racheté quelques brasseries existantes telles que La Chouffe, De Koninck et Liefmans. Pour notre internationalisation, nous sommes d’abord devenus actifs aux Pays‑Bas, puis en France, au Royaume-Uni, aux États‑Unis, en Tchéquie et même en Chine. L’Espagne et l’Italie sont entretemps venues s’ajouter à la liste. »

Nous ne devons jamais renier ce que nous sommes : un brasseur de bières spéciales. Cette notion est toujours présente lorsque se pose la question d’un investissement à l’étranger.
Michel Moortgat
CEO Brasserie Duvel Moortgat

Comment sélectionnez-vous ces marchés internationaux ?

« Un important constat a été que nous étions des brasseurs de bières spéciales. Nous ne produisons pas de bières pils. Un autre constat fut que le marché brassicole est un marché en déclin depuis un siècle en termes de volume. En 1900, la consommation de bière dans notre pays s’élevait encore en moyenne à plus de 200 litres par personne ; dans les années 80, elle était tombée à 120 litres et n’est plus que de 70 litres aujourd’hui. Mais cette tendance à boire moins de bière s’accompagne d’une autre tendance : les gens boivent différemment. Moins en quantité, mais en faisant plus attention à la qualité. Ceci explique le succès des bières spéciales, c’est‑à‑­dire notre cœur de métier. Nous nous tournons vers des marchés où nous constatons cette évolution. C’est en quelque sorte le critère sur lequel nous nous basons pour nous lancer. »

Quelle a été l’ampleur de votre croissance depuis que vous avez pris, au début des années 90, la décision de vous élargir et de vous internationaliser ?

« Sur le plan de l’envergure, notre entreprise est aujourd’hui à peine comparable à ce qu’elle était auparavant. Dans les années 90, notre chiffre d’affaires avoisinait les 30 millions et était essentiellement réalisé en Belgique. Aujourd’hui, nous avons atteint le cap des 500 millions d’euros, un chiffre d’affaires obtenu pour 70 % à l’étranger, avec 2.000 collaborateurs nationaux et internationaux. Mais nous avons conservé notre ADN. Le produit Duvel existait déjà dans les années 90, mais a connu une croissance au fil des années, et cette croissance se poursuit toujours. Malgré de nombreuses nouveautés, cette bière représente encore aujourd’hui environ 25 % du chiffre d’affaires. »

Le coronavirus a fait baisser notre chiffres d’affaires, mais nous sommes parvenus à limiter les dégâts en réduisant rapidement nos coûts.
Michel Moortgat
CEO Brasserie Duvel Moortgat

Comment avez-vous vécu la crise sanitaire de l’année écoulée ?

« La fermeture des bars a évidemment eu des conséquences néfastes, c’est certain. Nous avons bien constaté une augmentation des chiffres dans le secteur du détail, mais la consommation à domicile n’est pas parvenue à compenser la fermeture de l’horeca. N’oublions pas que sur les 12 derniers mois, il y a eu 6 mois de fermeture ! Ceci a fortement impacté nos volumes ainsi que notre chiffre d’affaires. Nous nous sommes cependant rapidement retroussé les manches pour réduire nos coûts. Cette réaction rapide constitue indubitablement l’un des grands avantages de notre caractère familial. La prise de décision se fait par des lignes de communication courtes. »

Votre entreprise a déjà gagné le « Family Business Award of Excellence ». Quels sentiments cela vous inspire‑t‑il ?

« De la fierté, naturellement, cela va de soi. Mais aussi de la gratitude. Envers nos collaborateurs et surtout envers nos clients. Sans buveurs de bière, le marché brassicole n’existerait pas. »

Pour conclure : le marché de la bière est, comme vous l’avez déjà mentionné, en déclin. Comment envisagez-vous l’avenir ?

« Les opportunités ne manquent pas, nous ne sommes donc pas pessimistes. Vous savez, dans les années 1900, notre pays comptait 3.000 brasseries. Ce chiffre a chuté à 120 et, aujourd’hui, nous sommes remontés à 300. Surtout, de petites initiatives sont venues se greffer : pensez par exemple au succès des bières IPA. Le caractère local de la bière demeure important. Il s’agit d’ailleurs d’un fil conducteur pour nos activités à l’étranger. Nous intégrons toujours des produits locaux dans notre gamme. » 

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Résumé

Duvel Moortgat est passée d’une entreprise familiale au chiffre d’affaires de 30 millions d’euros dans les années 90 à un acteur ayant passé le cap des 500 millions d’euros : une performance dont peut être fière la quatrième génération de la famille. Ce mouvement de croissance repose sur deux grands axes : l’expansion et la diversification des produits mis sur le marché, d’une part, et l’aspect international d’autre part, jusqu’en Chine. Une prise de décision rapide, propre au caractère familial de l’entreprise, s’est avérée bien utile en période de coronavirus. En dépit d’un marché brassicole en déclin, ce sont essentiellement les opportunités qui se présentent à lui que voit le CEO, Michel Moortgat.

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