4 minutes de lecture 10 déc. 2019
Woman smoking cannabis

Comment les marques de cannabis arrivent à se démarquer malgré la réglementation

Par Monica Chadha

Leader nationale du secteur du commerce de détail, EY Canada

Définir la réussite dans des industries dynamiques. Passionnée de création littéraire, de santé et de bien-être.

4 minutes de lecture 10 déc. 2019

Découvrez comment les entreprises canadiennes du secteur du cannabis mettent leurs marques en valeur dans un nouveau Far West où Santé Canada est le shérif.

S
i le marketing consiste essentiellement à différencier une marque, comment peut-on y parvenir dans un secteur où tout est réglementé, jusqu’aux menus détails de l’emballage et de la publicité?  C’est la grande question à laquelle les entreprises canadiennes du secteur du cannabis tentent de répondre, tandis qu’elles cherchent à se démarquer dans un secteur pratiquement inconnu où elles sont soumises à une surveillance étroite, notamment celle des gouvernements.

En novembre 2018, EY et Civilized ont réuni des professionnels en marketing et des spécialistes du droit externes ou internes qui travaillent avec certains des pionniers de la production de cannabis autorisés au pays pour discuter des moyens qu’ils privilégient pour s’attaquer à cette difficulté et promouvoir leurs marques dans un nouveau Far West où Santé Canada est le shérif.

Qu’est-ce qui fait une marque?

Les participants ont discuté des difficultés rencontrées dans la promotion de produits légalisés du cannabis auprès des consommateurs conformément à la Loi sur le cannabis.  La législation qui encadre la légalisation de la consommation de cannabis à des fins récréatives pour les adultes au Canada impose de nombreuses restrictions aux pratiques de marketing, de promotion, d’emballage et d’étiquetage des produits du cannabis. Pour l’essentiel, les emballages des produits du cannabis doivent être neutres et munis d’une étiquette de mise en garde, ce qui complique considérablement la tâche des producteurs autorisés qui cherchent à accroître la notoriété de leur marque et à fidéliser leur clientèle.

Bien que le marché noir du cannabis ne date pas d’hier au Canada, ce marché est encore aujourd’hui peu familier à la grande majorité des Canadiens, et la plupart des consommateurs qui s’approvisionnaient clandestinement ignorent essentiellement la provenance des produits ou ne s’y intéressent pour ainsi dire pas.

Les participants se sont entendus pour dire que les questions de marque vont au-delà des contraintes liées à l’emballage.  Les entreprises du marché du cannabis récréatif pourraient grandement profiter de l’expérience des sociétés évoluant maintenant depuis quelque temps sur le marché licite du cannabis à des fins médicales.  Les producteurs autorisés de cannabis thérapeutique ont procédé à la collecte de grandes quantités de données sur les consommateurs et sont parvenus à tisser un lien de confiance avec eux, notamment en veillant à ce que leurs produits soient toujours de très haute qualité et que la concentration de l’ingrédient actif soit uniforme dans l’ensemble de leurs produits, s’assurant ainsi d’offrir une expérience systématiquement la même d’un patient à l’autre.  De la culture à la vente au détail, les entités autorisées qui suivront l’exemple de ces producteurs auront un avantage sur la concurrence.

Les entreprises peuvent aussi se démarquer en éduquant les consommateurs. Dans les jours suivant la légalisation du cannabis, la vaste majorité des consommateurs ne parvenaient pas à établir de liens entre les marques proposées et leurs producteurs autorisés ou à distinguer un produit d’un autre. En aidant les consommateurs à faire des choix éclairés, les producteurs autorisés estiment qu’ils parviendront à promouvoir leur marque et à attirer une clientèle fidèle.

On dit quoi alors?

Le secteur du cannabis s’apparente aux secteurs de l’agriculture, du commerce de détail et des produits pharmaceutiques, mais la vente de ses produits au public est soumise à des règles plus strictes. Les producteurs autorisés n’ont pas le droit de faire allusion à la plante du cannabis, à l’expérience proposée ou à un style de vie, arguments et procédés publicitaires employés fréquemment dans d’autres secteurs. Les producteurs autorisés trouvent malgré tout des façons originales de promouvoir leurs produits en accord avec la loi, tant dans son esprit que dans sa lettre.

Entre autres, il semble avantageux de compter sur des amis bien placés ou en vue, qu’il s’agisse de célébrités ou d’influenceurs sur les médias sociaux. Comme dans presque toutes les autres sphères de la vie contemporaine, les médias sociaux représentent un moyen puissant pour les entreprises d’entrer en contact direct avec les consommateurs. Les personnes influentes peuvent servir de porte-voix aux entreprises de produits du cannabis et s’exprimer plus librement que les producteurs autorisés sur tout produit, expérience ou style de vie associé au cannabis.

Avis juridique

Le conseiller juridique interne d’un producteur autorisé veille à ce que les pratiques de marketing de l’entreprise respectent la loi. Dans les premiers temps, il devra interpréter la réglementation au meilleur de ses connaissances et tester ses limites, quitte à ce que le gouvernement intervienne et le ramène sur le droit chemin. En effet, Santé Canada ne préapprouve pas les stratégies de marketing et le matériel promotionnel. Dans bien des cas, le producteur autorisé s’attend à ce que son conseiller juridique accorde une certaine marge de manœuvre à l’équipe de marketing qui tentera de repousser les limites de ce qui est permis, aussi loin et aussi longtemps que possible. Le conseiller juridique devra toutefois faire preuve de rigueur en s’assurant que les activités sont conformes aux lois.

Les conseillers juridiques s’entendent sur le fait que le gouvernement effectuera probablement une révision de la réglementation au cours des trois à cinq prochaines années et s’inspirera des leçons tirées au cours des premières années de la légalisation du cannabis pour réglementer la légalisation à venir de produits comestibles, de concentrés et d’autres produits dérivés du cannabis.

Choc de culture

Les entreprises de secteurs établis connexes, notamment les producteurs de boissons alcoolisées, d’aliments et de boissons, songent sérieusement à percer le secteur du cannabis, ce qui pourrait rehausser la crédibilité du secteur, mais aussi menacer les producteurs autorisés.

D’une part, les entreprises du secteur du cannabis voient d’un bon œil l’occasion de s’associer à des marques établies, mais de l’autre, elles craignent d’être déclassées par des concurrents format géant disposant de ressources et de moyens en marketing colossaux. Inquiets, des participants ont souligné le risque posé par certaines de ces entreprises établies aux États-Unis, qui pourraient « avaler et américaniser » des producteurs autorisés venant à peine de prendre leur envol, ce qui dénaturerait le caractère distinctif de la légalisation du cannabis au Canada sur la scène mondiale.

Perspectives d’avenir

Le secteur du cannabis légalisé évolue rapidement et son visage changera probablement beaucoup d’ici un an. Pour se tailler une place dans ce marché concurrentiel, les producteurs autorisés devront prendre des risques calculés et faire preuve d’originalité pour promouvoir leurs marques.

Le génie créatif trouve toujours des façons d’innover, de s’adapter et de se démarquer dans des marchés où la concurrence est vive, et les dirigeants chargés du marketing que nous avons rencontrés ont confiance qu’ils parviendront à se démarquer dans le secteur du cannabis et à faire en sorte que leurs produits soient un jour largement reconnus par les consommateurs.

Résumé

Si le marketing consiste essentiellement à différencier une marque, comment peut-on y parvenir dans un secteur où tout est réglementé, jusqu’aux menus détails de l’emballage et de la publicité? C’est la grande question à laquelle les entreprises canadiennes du secteur du cannabis tentent de répondre, tandis qu’elles cherchent à se démarquer dans un secteur pratiquement inconnu où elles sont soumises à une surveillance étroite, notamment celle des gouvernements.

À propos de cet article

Par Monica Chadha

Leader nationale du secteur du commerce de détail, EY Canada

Définir la réussite dans des industries dynamiques. Passionnée de création littéraire, de santé et de bien-être.