Cannon Beach, Oregon, United States
Enfants de type caucasien marchant sur une plage, à marée basse

Les flux de main‑d’œuvre non captifs façonneront‑ils le marché du travail de demain?

Le travail est moins associé d’emblée aux vieux concepts de carrière, de gratification et d’environnement de travail. Les résultats du sondage sur le travail réinventé qu’EY a réalisé en 2024 permettent d’en savoir davantage sur les clés donnant accès à un Avantage RH.


En bref

  • Les flux de main‑d’œuvre sont fondamentaux : 38 % des employés affirment être susceptibles de quitter leur emploi au cours de l’année à venir. Ces flux transcendent les entreprises et les secteurs.
  • Pour se doter d’un « Avantage RH », une entreprise doit canaliser ses flux de main‑d’œuvre en harmonisant ses stratégies à l’égard d’une culture organisationnelle non captive, en offrant des programmes de gratification bonifiés et en établissant un cadre agile de renforcement des compétences.
  • À peine 32 % des employeurs disposent de capacités RH stratégiques leur permettant de se doter d’un Avantage RH favorisant l’obtention de meilleurs résultats en termes de productivité et sur le plan opérationnel.

Dans le monde entier, la main‑d’œuvre a évolué, les expériences et les attentes étant désormais davantage personnalisées et de plus en plus déphasées par rapport à un modèle universel de cheminement de carrière, de rémunération globale et d’environnement de travail. Des années marquées par une succession de crises sur les scènes économique, géopolitique et syndicale n’ont pas fait grand‑chose pour empêcher qu’un nombre relativement élevé d’employés se ménagent une voie de sortie, acceptent des affectations plus courtes et se montrent disposés à démissionner pour bénéficier d’une expérience de travail plus authentique et mieux adaptée à leurs besoins.

Une stratégie RH fructueuse doit prendre en compte tous ces facteurs, tout en prévoyant un nouveau type d’instabilité : les flux de main‑d’œuvre à l’échelle mondiale constituent un phénomène qui n’est ni bon ni mauvais, s’agissant de flux fondamentaux dont la fluidité est incontrôlable.

Il est toutefois possible de canaliser ces flux de main‑d’œuvre, dans la mesure où les leaders peuvent agir avec détermination, de sorte que leur entreprise en arrive à se doter d’un Avantage RH reposant sur une fonction RH revêtant une importance plus stratégique.

Il ressort du sondage mondial sur le travail réinventé qu’EY a réalisé en 2024 auprès de tout un éventail d’employés et d’employeurs que 32 % des entreprises dont la fonction RH revêt une importance stratégique et dispose d’un Avantage RH sont 7,8 fois plus susceptibles que les autres de considérer avoir su composer avec succès avec les pressions externes, 6,5 fois plus susceptibles que les autres de déclarer avoir réalisé des gains de productivité considérables au cours des deux dernières années, et 5,8 fois plus susceptibles que les autres d’affirmer obtenir des résultats nettement supérieurs aux prévisions, malgré la conjoncture économique actuelle.

Les éditions précédentes du sondage ont permis d’en savoir davantage sur le regard que les employeurs et les employés portent sur le monde du travail : les motivations des employeurs reposant surtout sur des préoccupations cycliques, tandis que celles des employés tirent leur origine dans la transformation structurelle des modalités et environnements de travail, ainsi que dans la raison d’être de leur travail. Il semble y avoir une fracture dans ces visions du monde du travail, car il s’avère que les anciens modes de pensée sont trop rigides pour permettre de composer avec les changements. La réussite à moyen et à long terme de ces entreprises dépendra dans une large mesure de leur capacité à exceller dans la gestion des cinq dimensions clés que sont l’état d’esprit des ressources humaines et les flux de main‑d’œuvre; les technologies de travail et l’intelligence artificielle (IA) générative; les priorités en matière de rémunération globale; les activités d’apprentissage, les compétences et les cheminements de carrière; et la culture organisationnelle et les environnements de travail. 


Pour chacune des dimensions contribuant à l’obtention d’un Avantage RH, les entreprises doivent tirer parti des nouveaux courants de pensée en matière de valeur et de tolérance aux risques, de façon à canaliser à leur manière les ressources humaines associées à divers bassins de main‑d’œuvre. Les leaders doivent comprendre toute l’importance que revêt l’état d’esprit des ressources humaines et la mesure dans laquelle celui‑ci peut être conditionné par l’offre de programmes de rémunération globale, d’apprentissage et de renforcement des compétences personnalisés, ainsi que par la perception que les employés ont de la culture de leur entreprise. Dans un contexte où les travailleurs non captifs ont la possibilité d’opter pour le modèle prédominant axé sur le travail hybride et le télétravail, il importe de réinventer les environnements de travail dans une optique de promotion des interactions humaines. Tandis que le rythme d’adoption de l’IA générative s’accélère et que les employés sont amenés à recourir à cette technologie, les entreprises doivent rester agiles et avoir la capacité de s’adapter aux changements.


Young woman having fun jumping by the sea with a big smile
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Chapitre 1

Avantage RH et flux de main‑d’œuvre

Les employés sont plus enclins qu’auparavant à quitter leur emploi pour obtenir les conditions de travail qu’ils recherchent. Les entreprises ne doivent pas se contenter de retenir leurs employés et de stimuler leur motivation au travail.

Les anciennes stratégies permettant de remporter la course aux talents ne sont plus en phase avec les flux de main‑d’œuvre fondamentaux. Enhardis par l’éventail des possibilités offertes sur le marché du travail, les employés sont tout simplement moins disposés à conserver leur emploi : 38 % des répondants au sondage de 2024 affirment qu’ils quitteront probablement leur emploi au cours des 12 prochains mois.
 

Les mesures que les entreprises ont adoptées pour promouvoir un état d’esprit positif au sein de leurs ressources humaines ont longtemps été axées – à raison – sur le recrutement et la fidélisation des employés, le succès de ces mesures étant souvent déterminé en fonction de l’ancienneté, des indicateurs du dynamisme de la culture organisationnelle et de l’excellence du cadre de recrutement. Toutefois, ces indicateurs ne reflètent pas toujours fidèlement la situation en temps réel d’une entreprise et ne rendent pas complètement compte de la mesure dans laquelle elle sait composer efficacement avec les flux de main‑d’œuvre fondamentaux.

La mesure dans laquelle une entreprise compose bien avec les allées et venues de ses employés, les ensembles de compétences et les changements de culture organisationnelle est un nouvel indicateur de l’état d’esprit des ressources humaines. Cet indicateur établit des liens avec les facteurs qui influent sur la probabilité qu’un employé recommande son employeur à ses amis et aux membres de sa famille. Il n’y a pas de corrélation entre l’obtention d’un score élevé pour l’état d’esprit des ressources humaines et une plus faible probabilité d’attrition du personnel, car il s’agit de deux facteurs indépendants.

Actuellement, le marché du travail se caractérise par des travailleurs qui vont librement d’un employeur à l’autre afin d’acquérir de nouvelles expériences et des compétences différentes, tout en bénéficiant de pratiques de travail flexibles; tous les employeurs doivent réorienter leurs stratégies en fonction de ce marché RH défini par une superfluidité. Les responsables des RH doivent accorder moins d’importance à la durée de maintien au travail des employés et en accorder davantage à la qualité de leur contribution à l’entreprise pendant qu’ils sont à son service.

La corrélation entre l’état d’esprit des ressources humaines et les flux de main‑d’œuvre devient évidente quand on s’intéresse aux préférences des employés dans leurs recherches d’emploi et à ce qui motive leurs choix.

Les employés qui prévoient quitter leur emploi au cours des 12 mois à venir se répartissent en deux groupes d’égale importance, à savoir celui des employés qui sont à la recherche de possibilités dans le secteur où ils travaillent actuellement (26 %) et celui des employés qui aspirent à changer de secteur (25 %). La possibilité d’obtenir une rémunération globale bonifiée (39 %) est le principal facteur qui les incite à changer d’emploi, les deux autres facteurs le plus souvent évoqués étant la perspective d’obtenir un meilleur emploi ou de meilleures occasions d’avancement professionnel (35 %) et l’accès à de meilleurs programmes de soutien au bien‑être (34 %). 


Les entreprises qui cherchent à canaliser les flux de main‑d’œuvre à leur façon doivent alors s’efforcer de répondre aux besoins de leurs employés à l’égard des dimensions clés que sont la culture organisationnelle, la rémunération globale et le renforcement des compétences. Selon le degré d’efficacité de leur employeur à cet égard, les employés sont plus ou moins susceptibles de le recommander auprès de leurs amis et des membres de leur famille. Il est instructif d’examiner cet effet selon le secteur d’activité, car il est plus prononcé dans certains secteurs.

Le score global moyen pour l’état d’esprit des ressources humaines s’établit à 55, tous les secteurs confondus, le secteur des administrations et organismes publics étant celui qui enregistre le plus faible score (43), tandis que celui des technologies obtient le score le plus élevé (68). Bien que de tels scores ne servent pas à déterminer si certains secteurs attirent plus de talents que d’autres – ce qui est néanmoins assurément une évidence –, un score élevé indique qu’il est probable que les employés évoluant dans un secteur faisant bonne figure incitent activement d’autres personnes à entrer au service de leur employeur, induisant ainsi un afflux de talents bénéfique, de même qu’une augmentation de la productivité pendant la durée de l’emploi.


Par exemple, alors que le secteur des technologies fait très bonne figure pour ce qui est de l’état d’esprit des ressources humaines qui y évoluent, il fait également preuve d’une certaine capacité d’attraction, en raison des interactions avec les employés et de l’attirance qu’il exerce sur les nouvelles recrues. Les flux de main‑d’œuvre peuvent indiquer que des employés changent plus souvent d’employeur, mais les employés qui évoluent dans un secteur qui affiche un score élevé pour l’état d’esprit des ressources humaines sont particulièrement susceptibles d’opter pour un emploi dans certains types de secteurs. Un tel magnétisme sectoriel peut être révélateur d’une corrélation étroite entre les attentes des employés et la propension des employeurs à y répondre.

Homme buvant son café, tandis que son partenaire se détend dans un hamac
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Chapitre 2

Une culture organisationnelle positive et ouverte au télétravail à partir de n’importe où

L’essor du travail hybride et du télétravail est à l’origine de la dispersion accrue des ressources humaines, dont la perception des interactions et de la valeur est novatrice.

Après des années d’expérience et d’innovation en matière de flexibilité au travail, le débat a évolué, ne portant plus seulement sur des « façons de faire » puisqu’il repose désormais sur de solides assises qui justifient l’offre de modalités de travail flexible. Il ne suffit plus aux entreprises de permettre aux travailleurs du savoir de se prévaloir du télétravail ou du travail hybride, car l’obtention éventuelle d’un Avantage RH dépend de leur capacité à instaurer une culture organisationnelle cohérente et positive pour une main‑d’œuvre diversifiée et dispersée.

La culture organisationnelle représente 40 points de pourcentage dans l’établissement du score des entreprises pour l’état d’esprit de leurs ressources humaines, 66 % des entreprises avantagées sur le plan des RH considérant que leur culture organisationnelle s’est améliorée considérablement au cours des 12 derniers mois, comparativement à 4 % seulement des entreprises désavantagées sur ce plan qui sont de cet avis. Le dynamisme de la culture d’une entreprise peut être évalué par le nombre de répondants qui affirment que les employés ont le sentiment que les leaders leur font confiance et leur donnent les moyens dont ils ont besoin, qui soutiennent que les employés font confiance à leur employeur et estiment bénéficier de son soutien, tout en considérant que les dirigeants se soucient de leur bien‑être personnel.

Globalement, tant les employés que les employeurs conviennent que la culture de leur entreprise s’améliore, bien que ces derniers restent beaucoup plus optimistes à cet égard que les membres du personnel. Par exemple, 77 % des employeurs considèrent que les employés ont le sentiment que les leaders leur font confiance et leur donnent les moyens dont ils ont besoin, comparativement à 57 % seulement des employés qui sont de cet avis. On observe des écarts semblables pour d’autres questions en lien avec la culture organisationnelle.


La vision nettement plus optimiste des employeurs peut s’expliquer par le fait qu’ils sont davantage rassurés quant aux perspectives de réalisation de gains de productivité reposant sur le travail hybride et le télétravail. Le plus grand groupe de travailleurs du savoir (40 %) – s’agissant de professionnels dont le travail repose généralement sur la mise à contribution de connaissances ou d’expertises spécialisées – souhaite faire du télétravail trois ou quatre jours par semaine, tandis que 48 % des employeurs optent pour le même type de modalités de travail. La proportion des travailleurs du savoir qui privilégient le télétravail à temps plein s’établit à 28 % (contre 14 % des employeurs).

Étant donné qu’un plus grand nombre de travailleurs du savoir continuent de se prévaloir des modalités du travail hybride ou du télétravail, ils sont en quelque sorte privés des anciens attributs qui les rattachaient à un environnement de travail physique particulier. Par exemple, 28 % seulement de ces travailleurs déclarent ne pas être assignés à un poste de travail donné et ne pas disposer d’un lieu au bureau où ils pourraient mettre leurs effets personnels, de sorte que les possibilités d’interactions physiques au travail et leur sentiment d’appartenance à un tel environnement s’en trouvent réduits au minimum.

Néanmoins, ces travailleurs non captifs perçoivent encore leur bureau comme étant un point de contact avec la culture de leur entreprise. Les travailleurs du savoir indiquent que le réseautage social ainsi que la volonté d’établir une démarcation entre leur environnement de travail et leur milieu de vie figurent parmi les principales raisons pour lesquelles ils ressentent le besoin de se rendre au bureau, la facilitation du travail de collaboration avec les collègues se classant en troisième position dans la liste des principales raisons évoquées. 

Une rémunération globale reposant sur une approche exhaustive centrée sur l’humain

Depuis des années, la tendance à l’assouplissement des modalités de travail est devenue une base de référence pour de nombreux travailleurs du savoir, les données révélant qu’elle gagne en popularité. La perspective de bénéficier d’horaires de travail flexibles (31 %) et la possibilité de faire du télétravail à partir de n’importe où (26 %) figurent parmi les principaux avantages RH que privilégient les employés. Les autres avantages RH privilégiés reflètent la volonté des employés non captifs de bénéficier d’avantages adaptés à leur vie personnelle et à leurs activités professionnelles au quotidien. Bien que les considérations salariales restent importantes, dans un contexte où la hausse du coût de la vie représente une source de préoccupations persistantes, certains employés considèrent leur rémunération sous un nouveau jour. Le groupe de travailleurs du savoir le plus important (37 %) souhaite bénéficier d’un plus large éventail d’options de primes et de mesures incitatives adossées à leur rendement et à leur contribution à l’entreprise, tandis qu’un tiers des employés privilégient plutôt l’obtention d’avantages en matière de santé et bien‑être, de congés rémunérés et d’une rémunération mieux indexée sur la hausse du coût de la vie.
 

Le large éventail des avantages RH privilégiés par les employeurs semble concorder avec ceux que préfèrent les employés, malgré des différences notables. Dans le contexte de la persistance des pressions à la hausse généralisée des coûts associés aux soins de santé et de l’accroissement soutenu des besoins en la matière, 39 % des employeurs prévoient investir au cours de la prochaine année dans les avantages en matière de santé et bien‑être offerts aux employés, étant donné que leurs programmes doivent prendre en compte leurs besoins dans leur globalité, notamment en ce qui a trait à leur santé physique, mentale et émotionnelle. Dans une proportion presque équivalente (38 %), les employeurs cherchent à améliorer leur offre de primes et de mesures incitatives axées sur l’amélioration du rendement. Notamment, dans le cadre des améliorations à apporter à leur programme de rémunération globale, 28 % des employeurs souhaitent investir dans l’offre d’activités de renforcement des compétences, tandis que 23 % seulement prévoient se concentrer sur la modification de ce programme, de sorte qu’il prenne en compte la hausse du coût de la vie.
 

Dans un contexte où les flux de main‑d’œuvre jouent un rôle fondamental, il importe de ne pas considérer la main‑d’œuvre comme un bloc monolithique, étant donné surtout qu’elle est de plus en plus diversifiée en termes de segmentation générationnelle, ce qui s’impose d’ailleurs comme un impératif. La répartition des données par génération permet de relever des différences de priorités notoires en matière d’avantages RH. Par exemple, les plus jeunes employés membres de la génération Z indiquent que les congés rémunérés et les mesures incitatives axées sur le rendement sont les deux avantages RH auxquels ils attachent le plus d’importance, tandis que – sur un pied d’égalité – les avantages en matière de santé et bien‑être et la possibilité de bénéficier d’horaires de travail flexibles figurent au troisième rang dans le classement des avantages RH qu’ils privilégient. En revanche, 46 % des répondants membres de la génération du baby‑boom souhaitent que le programme de rémunération globale de leur entreprise soit adapté à la hausse du coût de la vie, tandis que 41 % accordent la priorité à l’obtention de mesures incitatives axées sur le rendement. En troisième position, les avantages en matière de santé et bien‑être viennent loin derrière dans le classement des préférences des employés membres de cette génération, qui considèrent qu’il s’agit d’une priorité dans une proportion de 32 %.


De telles disparités générationnelles incitent les employeurs à rechercher des façons d’améliorer les gratifications auxquelles tous les employés accordent beaucoup d’importance, sans égard au segment démographique auquel ils se rattachent, en mettant l’accent sur des aspects tels que l’offre d’un éventail élargi de modalités de travail flexible. Au cours des dernières années, les fonctions mobilité se sont adaptées à cette aspiration à une plus grande flexibilité, en élargissant leur champ d’intervention au‑delà de leurs sphères traditionnelles, telles que les voyages d’affaires et le soutien à la réinstallation. Désormais, cette fonction prend également en charge la gestion de nouveaux types de risques liés aux cadres fiscaux, législatifs et réglementaires, qui vont de pair avec le travail hybride et le télétravail. Les employés qui sont appelés à travailler dans des territoires relevant de diverses administrations fiscales – pouvant s’agir d’un même pays, d’une même province, d’un même État ou d’une même ville – peuvent être une source de complications pour les entreprises, qui doivent réaliser des progrès en matière de coordination. Il ressort clairement du sondage sur la mobilité réinventée qu’EY a réalisé en 2024 que les fonctions mobilité qui sont mieux intégrées à la stratégie RH de l’entreprise font meilleure figure que les autres dans la gestion des ressources humaines et sur le plan opérationnel. Les employeurs qui parviendront à faire évoluer globalement leur programme de mobilité, en l’intégrant à leur programme de rémunération globale, pourraient bien tirer parti de possibilités qui ne sont pas encore réalisées.

Bien que les employeurs accordent beaucoup plus d’importance aux activités de formation et de renforcement de compétences que les employés, risquant ainsi d’être en décalage par rapport aux préférences de ces derniers en matière de gratifications, ils n’ont pas tout à fait tort de mettre l’accent sur les compétences. Le renforcement et le perfectionnement des compétences sont essentiels à l’obtention éventuelle d’un Avantage RH reposant de plus en plus sur les nouvelles technologies de travail et l’IA générative.

A Middle Eastern businessman and an Asian businesswoman collaborate on a project, focused intently on a laptop in a modern office setting late at night.
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Chapitre 3

Évolution des compétences et des technologies en vue d’une véritable transformation

Le débat sur l’IA générative porte maintenant sur d’autres considérations que les taux d’adoption, s’intéressant désormais à l’état d’esprit des ressources humaines et au renforcement des compétences.

L’adoption accélérée de l’IA générative a mis en évidence d’importantes questions en matière de main‑d’œuvre, notamment en ce qui a trait aux investissements dans les technologies et les compétences, aux capacités, à la culture organisationnelle et aux risques. L’année dernière, seulement 49 % des employés ont affirmé recourir à l’IA générative ou en prévoir l’utilisation au cours des 12 mois à venir. Un an plus tard, nous constatons que 75 % des employés exploitent cette technologie.

Ce qui est peut‑être plus important que le recours accru à l’IA générative, c’est l’évaluation des retombées qui en découlent. Dans une proportion de 37 %, les employés perçoivent de façon positive l’incidence de l’IA générative sur la productivité, alors que 34 % estiment qu’elle est bien utilisée dans leur secteur et que 36 % considèrent qu’elle peut les aider à se concentrer sur des tâches génératrices d’une plus grande valeur. Pour leur part, les employeurs sont presque deux fois plus nombreux que les employés à exprimer une opinion positive en ce qui a trait à ces aspects.


La répartition des employés en fonction du niveau d’utilisation de l’IA générative permet d’obtenir une vue encore plus nuancée de la situation. Les employés qui font une utilisation intensive de l’IA générative sont quatre fois plus susceptibles que les autres d’affirmer que leur entreprise offre une expérience technologique supérieure à la moyenne, comparativement à ceux qui y ont peu recours. Les grands utilisateurs de l’IA générative sont aussi particulièrement susceptibles de quitter leur emploi au cours des 12 mois à venir, car ils sont en quête des nouveaux débouchés auxquels leur donne accès leur haut niveau de connaissances et d’utilisation de l’IA générative. 

Mais, pour en revenir à l’idée des flux de main‑d’œuvre fondamentaux, il ne s’agit pas nécessairement d’un aspect négatif. Les entreprises qui adoptent l’IA générative avec un degré d’enthousiasme particulièrement élevé sont aussi celles qui affichent un score plus élevé que la moyenne pour l’état d’esprit des ressources humaines (67 par rapport à 60 pour celles qui ont recours modérément à cette technologie et 50 pour celles qui en font une utilisation limitée), de sorte que leurs employés sont particulièrement susceptibles de contribuer à la promotion de leur organisation.

Il y a aussi une corrélation entre le niveau d’utilisation de l’IA générative et la perception de la capacité d’une entreprise à favoriser le renforcement des compétences. Parmi les employés qui ont recours à l’IA générative, 58 % affirment que les programmes de perfectionnement et de formation de leur entreprise sont soit supérieurs à la moyenne, soit excellents.  Dans un contexte d’obsolescence accélérée des compétences, cela est logique : les utilisateurs de technologies dont l’évolution est particulièrement rapide ont besoin d’apprendre et de s’améliorer constamment, de façon à pouvoir suivre le rythme des changements. 

Pour rester concentrées sur le renforcement des compétences, ainsi que sur les avancées technologiques et les flux de main‑d’œuvre en transformation rapide, les entreprises devront adopter de nouvelles approches leur permettant de conserver un Avantage RH. Bien que les employeurs se sentent plus à l’aise de continuer d’offrir des programmes d’apprentissage et de perfectionnement internes, les employés semblent plus ouverts qu’eux à la perspective de l’intégration de leurs activités de renforcement des compétences à des programmes de rémunération globale ouverts sur l’extérieur de l’entreprise. Le recrutement de ressources humaines dans d’autres régions du monde peut s’avérer une mesure nécessaire pour certaines entreprises, ce qui engendre un niveau de complexité supplémentaire.

Silhouette of men playing cricket on a beach at sunset
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Chapitre 4

Recherche d’un éventuel Avantage RH

L’effet combiné de l’authenticité, de la personnalisation, des interactions et des possibilités d’apprentissage favorise l’obtention éventuelle d’un Avantage RH.

À mesure qu’une entreprise cherche à se doter d’un Avantage RH, elle doit trouver des façons de canaliser les flux de main‑d’œuvre. Voici les cinq dimensions qu’il importe de garder présentes à l’esprit :

1. État d’esprit des ressources humaines et flux de main‑d’œuvre

Les corrélations entre les flux de main‑d’œuvre fondamentaux et l’état d’esprit des ressources humaines des entreprises s’avéreront déterminantes à l’avenir dans la course aux talents. Pour canaliser les flux de main‑d’œuvre comme elles l’entendent, les entreprises doivent se concentrer sur leur culture organisationnelle, la rémunération globale et les activités d’apprentissage et de perfectionnement. Même dans un contexte où les périodes de maintien en poste sont plus courtes qu’auparavant et où les employés sont plus disposés que jamais à changer d’employeur afin d’obtenir les avantages qui leur tiennent le plus à cœur, les entreprises ont l’occasion d’instaurer un environnement de travail qui favorise la réussite des membres de leur personnel pendant qu’ils sont à leur service, tout en les amenant à promouvoir leur organisation dans leur entourage. Par ailleurs, les leaders doivent mettre au point de solides outils de planification, de recrutement et de gestion du personnel qui leur permettent d’intégrer les données du marché à leur stratégie de recrutement et de fidélisation.

2. Rémunération globale, au‑delà des considérations salariales

Bien que la rémunération reste une source de préoccupations pour les employés, celles‑ci sont plus nuancées et exhaustives, de sorte que les employeurs doivent avoir une vision plus globale et personnalisée des programmes de gratification. L’offre aux employés de gratifications répondant à leurs besoins en fonction de leur stade de vie, de leur situation personnelle ou des préférences générales permettra d’améliorer la proposition de valeur aux membres du personnel. Ultimement, un employé évalue sa rémunération sur une base globale, en prenant en compte aussi bien son salaire en espèces que les programmes de gratification qui reconnaissent son rendement et répondent à ses besoins personnels.

3. Émergence d’un esprit de consolidation d’entreprise reposant sur les rapports humains, sur toile de fond de l’émancipation du travail

Le bureau, autrefois assimilable à un milieu de vie secondaire, a évolué jusqu’à devenir l’environnement de socialisation qu’il représente maintenant. N’étant plus assignés à un poste de travail déterminé, les employés considèrent désormais le bureau comme un espace commun propice au travail d’équipe. La raison d’être des actifs immobiliers doit converger avec la raison d’être des entreprises et de leur capital humain, maintenant plus dispersé. Pour rationaliser leur empreinte immobilière tout en maximisant leurs investissements dans leur culture organisationnelle et leurs installations physiques, les employeurs doivent évaluer l’agencement, l’utilisation et la conception de leurs environnements de travail. Ils doivent aussi adopter une approche réfléchie qui met à contribution les équipes de mobilité dans l’établissement d’environnements de travail flexibles offrant une expérience exceptionnelle, tout en prenant en compte les considérations d’ordre fiscal et juridique, ainsi qu’en matière de conformité.

4. IA générative et technologies de travail

L’adoption accélérée de l’IA générative engendre généralement des effets positifs, s’agissant d’une nouvelle technologie qui stimule la productivité. Ce sont les employeurs les plus enclins à adopter l’IA générative qui affichent habituellement aussi des flux de main‑d’œuvre plus équilibrés. Il importe que les entreprises aillent à la rencontre de leurs employés là où ils se trouvent, en tirant parti notamment de l’IA générative, tout en s’efforçant de personnaliser leurs solutions technologiques en fonction de chaque rôle et en reconnaissant les possibilités de réalisation de gains de productivité à tous les paliers organisationnels. 

5. Nécessité de disposer de nouvelles sources et de stratégies novatrices adaptées à l’évolution des exigences de compétences

Dans un contexte d’obsolescence accélérée des compétences, les entreprises doivent revoir les moyens qu’elles déploient pour combler leurs besoins dans ce domaine. Bien que les employeurs puissent privilégier l’offre de programmes d’apprentissage et de perfectionnement internes, ils doivent aussi envisager de recourir à un prestataire externe pouvant offrir des possibilités de renforcement des compétences à leurs employés, qui se sentent davantage rassurés par une accréditation accordée par un tiers. Les employeurs peuvent aussi chercher à se doter d’un accès aux bassins de ressources humaines que recèlent d’autres régions géographiques, tout en ayant conscience des possibilités et risques particuliers susceptibles d’y être associés. Ultimement, les entreprises doivent trouver le bon agencement de moyens internes et externes leur permettant d’attirer les ressources détenant les compétences dont elles ont besoin.

Résumé

De nos jours, le travail est moins associé d’emblée aux vieux concepts de carrière, de gratification et d’environnement de travail. Le sondage sur le travail réinventé qu’EY a réalisé en 2024 auprès d’employés et d’employeurs des quatre coins du monde indique aux entreprises la voie à suivre pour obtenir un Avantage RH. Le succès des entreprises reposera grandement sur la façon dont elles savent composer avec cinq dimensions clés : l’état d’esprit des ressources humaines et les flux de main‑d’œuvre; les technologies de travail et l’IA générative; les priorités en matière de rémunération globale; les activités d’apprentissage, les compétences et les cheminements de carrière; la culture organisationnelle et les environnements de travail.

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