Tenir compte de tous les champs d’application
La réduction des émissions des champs d’application 1 et 2 devrait être prioritaire pour les sociétés minières, si elle n’est pas déjà en cours. Il s’agit, respectivement, des émissions directes d’une organisation qui découlent de ses activités ou d’activités sur lesquelles elle exerce un contrôle et des émissions indirectes résultant de la production d’énergie achetée. Pour les sociétés minières, il existe plusieurs possibilités de réduire les émissions des champs d’application 1 et 2 sur place. Les énergies renouvelables – solaire et éolienne par exemple – constituent l’initiative de réduction des émissions de carbone la plus abordable et efficace. Selon les conditions propres au site, elles peuvent réduire considérablement les émissions. De plus, le passage aux énergies renouvelables favorise une utilisation intelligente des terrains aux alentours de la mine.
L’électrification de la flotte de véhicules et le remplacement du diesel par des options de carburant sans carbone dans l’ensemble de la chaîne de valeur offrent également des possibilités de réduction des émissions sur place. À elles seules, ces mesures sont toutefois insuffisantes pour décarboner une mine. En effet, les émissions produites par la transformation, la ventilation, le chauffage, la climatisation et l’alimentation électrique de secours demeurent importantes. Le captage et le stockage du carbone, éventuellement alliés à d’autres méthodes de compensation des émissions, sont nécessaires pour atteindre une cible de zéro émission nette.
C’est toutefois la réduction des émissions du champ d’application 3 qui va réellement changer la donne. Il s’agit des émissions indirectes à l’échelle de la chaîne de valeur, au‑delà de ce que détient l’entreprise. Conséquemment, elles sont plus difficiles à suivre et à réduire. Pour réduire les émissions du champ d’application 3, les sociétés du secteur des mines et métaux devront apporter d’importants changements à la façon dont elles exercent leurs activités, collaborer davantage avec les clients pour décarboner l’ensemble de la chaîne de valeur et communiquer la valeur qu’elles créent pour les parties prenantes. Le dernier jalon vers la décarbonisation pose un grand défi et la collaboration sur le plan des données comporte des limitations potentielles quant à l’exactitude et à l’exhaustivité des données nécessaires à l’atteinte des cibles. Pour les sociétés minières, la principale difficulté consistera à inciter et à habiliter toutes les parties de la chaîne de valeur à devenir carboneutres.
Communiquer en toute transparence pour créer une valeur durable
L’automne dernier, les Autorités canadiennes en valeurs mobilières ont publié des propositions en vue d’introduire des obligations d’information en matière de changements climatiques pour les sociétés ouvertes. Ces propositions sont en phase avec les normes établies par le Groupe de travail sur l’information financière relative aux changements climatiques (GIFCC). Parallèlement, la Securities and Exchange Commission des États‑Unis examine des projets de règles concernant la communication obligatoire d’informations sur les risques liés aux changements climatiques pour les sociétés ouvertes. L’entrée en vigueur des nouvelles règles est prévue pour le début de 2022.
Les risques liés aux changements climatiques s’imposant à l’ordre du jour, les entreprises doivent se préparer à ajouter les informations relatives aux changements climatiques à l’étendue de leurs audits externes. Bien que le rapport Global Climate Risk Barometer d’EY révèle que les entreprises canadiennes adoptent les recommandations du GIFCC et fournissent des informations plus étoffées relativement à leurs stratégies en matière de changements climatiques et de gouvernance que leurs pairs d’ailleurs dans le monde, il leur reste néanmoins du travail à faire. Un élément se démarque par son absence, c’est‑à‑dire que les risques et les possibilités identifiés ne sont pas liés à l’analyse de scénarios.
Dans le cadre d’information du GIFCC, l’analyse de scénarios constitue une étape de planification cruciale qui permet de passer de la théorie à la mise en œuvre de stratégies concrètes et exécutables. Elle est essentielle pour la divulgation d’informations de premier plan, car les risques liés aux changements climatiques sont intrinsèquement à plus long terme et plus complexes que la plupart des risques d’entreprise habituels. Une analyse rigoureuse des différents scénarios de risques climatiques et un examen attentif des risques et des possibilités que présente le changement climatique pour les activités et l’ensemble du secteur contribueront à la présentation d’informations ESG fiables et significatives du point de vue financier, ce qui aidera les parties prenantes à mieux comprendre leur stratégie de valeur à long terme.
Dans le contexte d’incertitude entourant la nouvelle législation sur les émissions de carbone, les sociétés minières doivent prendre les mesures appropriées afin de répondre à la pression exercée par les parties prenantes pour respecter leurs objectifs climatiques et éviter de s’engager à atteindre des objectifs potentiellement irréalistes. Pour gagner la confiance des investisseurs et, éventuellement, un avantage concurrentiel, elles devront présenter leur feuille de route vers un bilan carbone de zéro émission nette et souligner leurs réussites tout au long de ce parcours.