22 minutes de lecture 4 févr. 2021
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Questionsfiscales@EY – Février 2021

Par EY Canada

Organisation de services professionnels multidisciplinaires

22 minutes de lecture 4 févr. 2021
Questionsfiscales@EY est un bulletin canadien mensuel qui vous aide à rester au fait des nouveautés en fiscalité, de l’évolution jurisprudentielle, des publications et plus encore. Des questions liées à la fiscalité des particuliers et des entreprises aux nouveautés législatives et jurisprudentielles, nous vous présentons l’information d’actualité pertinente.

Votre pire obligation fiscale serait-elle celle que vous ne voyez pas?

Les questions fiscales nous concernent tous. Nous avons compilé des nouvelles et de l’information sur des sujets d’actualité en fiscalité pour vous tenir à jour. Dans ce numéro, nous examinons :

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Chapitre 1

Incidences fiscales de la délivrance tardive d’un certificat visant des biens culturels et d'un reçu pour don de tels biens

 

Krista Fox et Alan Roth, Toronto

Afin de favoriser le transfert d’objets culturels à des organisations qui préservent ces biens et les rendent accessibles au public, la Loi de l’impôt sur le revenu (la « LIR ») prévoit un traitement fiscal privilégié pour les dons de biens culturels faits à des administrations ou établissements désignés1 du Canada et certifiés par la Commission canadienne d’examen des exportations de biens culturels (la « CCEEBC »).

Dans une récente interprétation technique2, l’Agence du revenu du Canada (l’« ARC ») devait se pencher sur les incidences fiscales possibles découlant de la délivrance tardive du certificat visant les biens culturels par la CCEEBC ou d’un reçu pour don de biens culturels par une administration ou un établissement désignés du Canada.

Contexte

Tout gain en capital réalisé sur le don d’un objet fait à une administration ou à un établissement désignés3 du Canada et certifié à titre de bien culturel par la CCEEBC est exonéré d’impôt en vertu du sous-alinéa 39(1)a)(i.1) de la LIR, bien que les pertes en capital demeurent déductibles, sous réserve des règles habituelles4.

Les dons de biens culturels certifiés sont aussi admissibles à une déduction d’impôt en vertu de l’article 110.1 de la LIR dans le cas des donateurs constitués en société ou à un crédit d’impôt non remboursable en vertu de l’article 118.1 de la LIR dans le cas des donateurs non constitués en société, en fonction du montant admissible du bien. Le montant admissible du don correspond à la juste valeur marchande du bien (fixée par la CCEEBC) moins le montant de l’avantage reçu au titre du don. Un avantage constitue un bénéfice (p. ex., des biens ou des services) que le donateur reçoit du bénéficiaire en contrepartie du don. De plus, le plafond général du montant des dons de bienfaisance qu’un particulier peut réclamer pour une année d’imposition donnée (c.-à-d., 75 % de son revenu net pour l’année d’imposition) ne s’applique pas aux dons de biens culturels certifiés. La déduction ou le crédit d’impôt peut être demandé au cours de l’année où le bien a été donné ou au cours de l’une des cinq années d’imposition suivantes.

Selon le site Web de la CCEEBC, un objet ne sera certifié à titre de bien culturel que si le demandeur peut justifier que ce bien présente un intérêt exceptionnel en raison soit de son rapport étroit avec l’histoire du Canada ou la société canadienne, soit de son esthétique, soit de son utilité pour l’étude des arts ou des sciences5.

Voici des exemples de biens culturels :

  • Objets archéologiques, fossiles et minéraux
  • Objets de culture matérielle ethnographique (notamment des objets amérindiens, métis et inuits)
  • Objets militaires
  • Objets d’art appliqué et décoratif
  • Objets relevant des beaux-arts
  • Objets scientifiques ou techniques
  • Pièces d’archives (p. ex., cartes, enregistrements sonores, photographies, films et documents)
  • Collections audiovisuelles

La demande de certification est présentée par l’administration ou l’établissement désignés au nom du donateur (ou du vendeur). La CCEEBC peut approuver ou refuser une demande, ou la mettre en attente si, par exemple, des renseignements supplémentaires sont exigés du demandeur. Si une demande est approuvée, un certificat (formulaire T871, Certificat fiscal visant des biens culturels) fixant la juste valeur marchande de l’objet sera délivré au donateur.

Une fois que la CCEEBC a délivré le certificat, l’administration ou l’établissement désignés peuvent délivrer un reçu pour don au donateur en utilisant la juste valeur marchande indiquée sur le certificat pour préparer le reçu pour don. Le reçu doit également indiquer les renseignements prescrits à la partie XXXV (Reçus de dons) du Règlement de l’impôt sur le revenu.

En raison de la longueur et de la complexité du processus de certification de la CCEEBC, il arrive parfois que la délivrance de certificats et de reçus accuse des retards pouvant atteindre plusieurs années après que le don a été fait.

Commentaires de l’ARC

Dans son interprétation technique, l’ARC devait déterminer s’il existait un délai précis pendant lequel une administration ou un établissement désignés sont tenus de délivrer un reçu pour don après avoir reçu un don de biens culturels, ainsi que les incidences fiscales possibles pour les donateurs si le reçu pour don ou le certificat visant le bien de la CCEEBC qui sont requis ne sont délivrés que plusieurs années après le don du bien.

L’ARC a confirmé qu’il n’est pas obligatoire qu’un reçu pour don soit délivré dans un délai précis après la réception du don par une administration ou un établissement désignés. Toutefois, l’ARC a reconnu que le donateur ne peut pas demander une déduction ou un crédit d’impôt à moins que le don soit justifié par le reçu et le certificat de la CCEEBC. Par conséquent, un donateur qui reçoit un certificat de la CCEEBC et un reçu pour don après avoir produit sa déclaration de revenus pour l’année d’imposition au cours de laquelle le don a été fait doit demander à l’ARC d’établir une nouvelle cotisation à l’égard de cette déclaration de revenus afin de réclamer la déduction ou le crédit, ainsi que l’exonération des gains en capital, s’il y a lieu. La position de l’ARC est conforme à une récente décision des tribunaux (voir l’article sur l’affaire Yellow Point Lodge Ltd. c. Canada ci-après) dans laquelle le tribunal a confirmé qu’un don est considéré comme ayant été fait dans l’année de la disposition ou du transfert du bien donné (et non pas au cours d’une année subséquente lorsque le processus de certification est terminé).

L’ARC a aussi indiqué que les délais établis par la loi quant à la période normale de cotisation ou de nouvelle cotisation6 ne sont pas applicables, car le paragraphe 118.1(11) de la LIR lui permet d’établir une cotisation ou une nouvelle cotisation pour toute année d’imposition afin de donner effet à un certificat délivré par la CCEEBC. Selon l’ARC, en donnant effet au certificat délivré par la CCEEBC, une telle cotisation ou nouvelle cotisation tiendra compte généralement de l’exonération des gains en capital, s’il y a lieu, et de la déduction d’impôt et du crédit d’impôt non remboursable, à condition que le donateur ait aussi obtenu un reçu pour don.

Seul le certificat de la CCEEBC est exigé pour que l’exonération des gains en capital s’applique. Si la CCEEBC détermine que le bien donné ne peut pas être certifié à titre de bien culturel et qu’elle ne délivre pas de certificat, l’exonération des gains en capital ne sera pas applicable. Toutefois, l’ARC a indiqué que, dans ces circonstances, le bien donné pourrait toujours être considéré comme un don de bienfaisance (autre que de biens culturels) dans l’année où le bien est donné, à condition que l’établissement ou l’administration soit un donataire reconnu au sens du paragraphe 149.1(1) de la LIR, qu’un reçu pour don comportant les renseignements prescrits soit délivré et que l’année d’imposition au cours de laquelle le don a été fait puisse toujours faire l’objet d’une cotisation ou d’une nouvelle cotisation à la demande du donateur conformément aux délais fixés par la LIR. De plus, le ministre a le pouvoir discrétionnaire d’autoriser l’établissement d’une cotisation ou d’une nouvelle cotisation après la période normale de nouvelle cotisation dans certaines circonstances (p. ex., dans le cas où un contribuable présente une renonciation, au cours généralement de la période normale de nouvelle cotisation, ou dans le cadre de mesures d’allègement pour les contribuables).

Conclusion

Bien que la LIR prévoit des incitatifs pour les dons de biens culturels certifiés à des administrations et des établissements désignés du Canada, l’obligation d’obtenir des certificats et des reçus peut parfois grandement retarder la possibilité pour les donateurs de profiter de ces incitatifs. De tels retards peuvent entraîner des problèmes de trésorerie pour le donateur, puisque la déduction ou le crédit pour dons, ainsi que l’exonération d’impôt applicable aux gains en capital réalisés sur le don seront à leur tour retardés. Afin de réduire les délais dans le processus de certification, les donateurs doivent s’efforcer de fournir des renseignements exacts et exhaustifs relativement aux biens aux administrations ou aux établissements désignés qui reçoivent le don et qui présentent une demande de certification à la CCEEBC.

  • Article references

    1. Par exemple, il peut s’agir de galeries d’art, de bibliothèques, d’archives ou de musées.
    2. Document de l’ARC no 2019-0826691E5.
    3. Désigné par le ministre du Patrimoine canadien en vertu du paragraphe 32(2) de la Loi sur l’exportation et l’importation de biens culturels au moment du don.
    4. Ce traitement fiscal s’applique aussi à la vente d’un bien culturel certifié à une administration ou à un établissement désignés.
    5. Alinéa 11(1)a) de la Loi sur l’exportation et l’importation de biens culturels. Avant le 19 mars 2019, les biens culturels devaient également être réputés « revêtir une importance nationale pour le Canada » (telle que sa perte appauvrirait gravement le patrimoine national) afin d’être certifiés à titre de biens culturels.
    6. En ce qui concerne un particulier et une société privée sous contrôle canadien (« SPCC »), la période normale de nouvelle cotisation est de trois ans à compter de la date d’envoi du premier avis de cotisation ou, si elle est antérieure, de la date d’une première notification portant qu’aucun impôt n’est payable. En ce qui concerne une société qui n’est pas une SPCC ou une fiducie de fonds commun de placement, la période normale de nouvelle cotisation est de quatre ans à compter de la première de ces deux dates.
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Chapitre 2

Consultez en ligne nos calculatrices et taux d’impôt utiles

 

Lucie Champagne, Alan Roth, Andrew Rosner et Candra Anttila, Toronto

Souvent mentionnée par les chroniqueurs sur la planification financière, notre calculatrice d’impôt personnel de 2021 compatible avec les mobiles vous permet de comparer le total de l’impôt fédéral et de l’impôt provincial des particuliers à payer en 2021 dans toutes les provinces et tous les territoires. Une deuxième calculatrice vous permet de comparer le total de l’impôt fédéral et de l’impôt provincial des particuliers à payer en 2020.

Vous trouverez également des outils de planification fiscale des particuliers utiles pour 2021 et pour 2020 aux fins de comparaison :

  • La calculatrice REER calculant l’économie d’impôt découlant de votre cotisation
  • Les taux et crédits d’impôt des particuliers par province et territoire pour toutes les fourchettes de revenu

De plus, vous trouverez dans ce site de précieux outils de planification fiscale des sociétés pour 2021 et pour 2020 aux fins de comparaison :

  • Les taux d’impôt sur le revenu des sociétés fédéral et provinciaux combinés applicables au revenu admissible au taux des petites entreprises, au revenu de fabrication et de transformation et au revenu assujetti au taux général
  • Les taux d’impôt sur le revenu des sociétés provinciaux applicables au revenu admissible aux taux des petites entreprises, au revenu de fabrication et de transformation et au revenu assujetti au taux général
  • Les taux d’impôt sur le revenu des sociétés applicables au revenu de placement gagné par les sociétés privées sous contrôle canadien et par d’autres sociétés

Vous trouverez ces ressources utiles et bien d’autres – notamment nos plus récents points de vue, nos documents de leadership éclairé, les bulletins FiscAlerte, des renseignements à jour sur les budgets de 2021, nos bulletins mensuels Questionsfiscales@EY et plus encore sur ey.com/ca/fiscalite.

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Chapitre 3

La Cour d’appel fédérale confirme que le don d’un bien écosensible est fait dans l’année de la disposition du bien

Yellow Point Lodge c. Canada, 2020 CAF 195

Winnie Szeto, Toronto; Gael Melville, Vancouver

Dans cette affaire, la Cour d’appel fédérale (la « CAF ») a confirmé que le don d’un bien écosensible était fait au cours de l’année pendant laquelle il était disposé du bien visé par le don, et non lorsque toutes les conditions ouvrant droit à la déduction fiscale prévue à l’alinéa 110.1(1)d) de la Loi de l’impôt sur le revenu1 (la « LIR ») étaient remplies. Dans le cas particulier de l’affaire, la contribuable aurait pu déduire une somme supplémentaire de plus de 1 million de dollars relativement à son don de bien écosensible si la CAF avait tranché en sa faveur.

Faits

L’appelante était une société qui était le propriétaire inscrit de certains fonds de terre situés en Colombie-Britannique. Les fonds de terre étaient, pour la plupart, non aménagés et à l’état naturel, à l’exception d’un gîte et de chalets.

Le 6 juin 2008, l’appelante avait accordé un covenant relativement à une parcelle de fonds de terre écosensible située dans la partie est du fonds, et cette parcelle avait été cédée en parts égales à deux donataires. La juste valeur marchande du covenant était alors d’environ 5,8 millions de dollars.

Afin de demander une déduction en application de l’alinéa 110.1(1)d) pour le don du covenant, l’appelante devait obtenir les documents suivants :

  • une attestation de la juste valeur marchande d’un don de bien écosensible en application de la Loi de l’impôt sur le revenu du Canada, délivrée par le ministre fédéral de l’Environnement;
  • une attestation suivant laquelle le fonds de terre est sensible sur le plan écologique, l’identification du bénéficiaire et l’approbation de l’organisme de bienfaisance enregistré en application de la Loi de l’impôt sur le revenu du Canada, délivrées par le ministre fédéral de l’Environnement;
  • les reçus fiscaux pour don de chaque donataire.

L’appelante n’avait pas demandé la déduction dans la déclaration de revenus qu’elle avait produite pour l’année d’imposition se terminant le 31 décembre 2008, parce qu’elle n’avait pas obtenu les documents requis.

En décembre 2009, le ministre fédéral de l’Environnement avait délivré à l’appelante l’attestation de juste valeur marchande et l’attestation suivant laquelle le fonds de terre était sensible sur le plan écologique. En février 2010, chaque donataire avait remis à l’appelante un reçu fiscal d’environ 2,9 millions de dollars, ce qui représentait la valeur du don.

En mai 2010, l’appelante avait demandé au ministre du Revenu national d’établir une nouvelle cotisation pour son année d’imposition 2008 afin de lui permettre de demander une déduction de 382 779 $ relativement à son don effectué en 2008, en application de l’alinéa 110.1(1)d). En juillet 2010, le ministre avait établi une nouvelle cotisation à l’égard de l’année d’imposition 2008 de l’appelante et avait autorisé la déduction de 382 779 $. Cette déduction avait notamment eu pour effet de ramener à zéro le revenu imposable de 2008 de l’appelante. Par la suite, l’appelante n’avait pas demandé au ministre d’éliminer cette déduction de revenus à l’égard du don.

Pour ses années d’imposition 2009 à 2013, l’appelante avait également demandé des déductions de revenus à l’égard de son don, en application de l’alinéa 110.1(1)d), pour un total d’environ 2,45 millions de dollars. Par conséquent, le montant qui n’avait pas encore été réclamé après son année d’imposition 2013 était de 3 millions de dollars.

Dans sa déclaration de revenus de 2014, l’appelante avait demandé une autre déduction d’environ 1,6 million de dollars à l’égard de son don, en application de l’alinéa 110.1(1)d). Lors de l’établissement de la cotisation, le ministre avait refusé la déduction au motif que le don avait été effectué en 2008 et que l’appelante n’était donc pas autorisée à demander une déduction pour son année d’imposition 2014, puisque ladite année excédait la période de report prospectif de cinq ans alors en vigueur2.

L’appelante s’était opposée à la cotisation, mais le ministre l’a confirmée. L’appelante avait ensuite interjeté appel de la cotisation à la Cour canadienne de l’impôt (la « CCI ») au motif que la déduction effectuée en 2008 n’était pas valide et que la période de report prospectif de cinq ans prévue à l’alinéa 110.1(1)d) ne commençait qu’en 2009 (lorsque les attestations avaient été délivrées) et qu’elle avait donc pris fin avec son année d’imposition 2014.

Décision de la CCI

En ce qui concerne les dons effectués en 2008 et en 2009, l’alinéa 110.1(1)d) prévoyait qu’un montant relatif à des dons de biens écosensibles pouvait être déduit si « le don [avait] été fait par la société au cours de l’année ou des cinq années d’imposition précédentes […] » [nous soulignons].

Au procès, l’appelante a soutenu que le don avait été fait en 2009, date où toutes les conditions préalables pour effectuer un don de bien écosensible en application de l’alinéa 110.1(1)d) avaient été remplies (soit en décembre 2009, lorsque le ministre de l’Environnement avait délivré les attestations). La Couronne a fait valoir que le don avait été fait en 2008, lorsque le covenant avait été octroyé légalement par l’appelante aux donataires.

D’entrée de jeu, le juge de la CCI a cherché à déterminer si un don avait été fait. Il a d’abord mentionné que la LIR ne définissait pas le terme « don ». Il a ensuite adopté la signification établie, par exemple, dans l’arrêt Canada c. Berg : « […] un don est le transfert volontaire du bien d’un donateur à un donataire, en échange duquel le donateur ne reçoit pas d’avantage ni de contrepartie3. » S’appuyant sur cette définition, le juge de la CCI a conclu que le don avait été fait lorsque l’appelante avait accordé le covenant aux donataires le 6 juin 2008.

Le juge de la CCI était d’avis que chacune des conditions énoncées à l’alinéa 110.1(1)d) était distincte et ne faisait pas partie de la détermination de la date à laquelle un don a été fait. Il a souligné que « […] cette interprétation [était] étayée par le libellé de l’alinéa 110.1(1)d) et le contexte de la [LIR] considérée dans son ensemble ». Il a poursuivi en expliquant que l’alinéa 110.1(1)d) et d’autres dispositions4 de la LIR énonçaient clairement ou laissaient entendre que le « versement du don » était un événement distinct de l’obtention des attestations nécessaires.

Le juge de la CCI a conclu que le don avait été fait à la date où il avait été légalement versé – c’est-à-dire lorsque le covenant avait été octroyé – et que le versement du don et le respect des conditions applicables à la déduction étaient des faits incontestablement distincts. Par conséquent, l’appelante pouvait demander la déduction pour ses années d’imposition 2008 à 2013, mais pas pour son année d’imposition 2014, qui excédait la période de report prospectif.

Décision de la CAF

Devant la CAF, la seule question à trancher était de savoir si le juge de la CCI avait commis une erreur en concluant que le don d’un bien écosensible avait été fait en 2008, au moment de la disposition du bien, plutôt qu’en 2009 lorsque les conditions pour demander une déduction en application de l’alinéa 110.1(1)d) avaient été remplies. La CAF a fait remarquer qu’il s’agissait simplement d’une question d’interprétation à laquelle s’appliquait la norme de la décision correcte.

La CAF a mentionné qu’il était généralement admis, sous le régime de la common law ou du droit civil, que la disposition avait lieu lorsque le titre de propriété du bien visé par le don était transféré par le donateur au donataire. Même si l’appelante n’a pas contesté cette affirmation, elle a soutenu que l’alinéa 110.1(1)d) prévoyait une exception à cette règle générale, puisque l’expression « le don a été fait » qui figurait dans la disposition était ambiguë. L’appelante a insisté pour dire qu’une analyse téléologique de l’alinéa 110.1(1)d) révélerait que le don n’avait pas été fait avant 2009, date à laquelle les attestations avaient été délivrées.

La CAF a souscrit à la conclusion de la CCI selon laquelle le moment où un don est fait et le moment où il donne droit à une déduction sous le régime de la LIR sont des questions distinctes. La CAF a été d’avis que, pour répondre à la question de savoir quand le don a été fait pour l’application de l’alinéa 110.1(1)d), il suffisait de consulter l’alinéa 38a.2), qui prévoyait que « la disposition consiste à faire don5 ». De plus, le sous-alinéa 69(1)b)(ii) renvoyait à une disposition « au moyen d’une donation entre vifs6 ». La CAF a estimé que ces dispositions n’étaient pas ambiguës et que le don et la disposition avaient eu lieu au moment où le titre de propriété avait été transféré par le donateur au donataire conformément au droit privé applicable.

Le juge de la CCI a statué que la procédure prévue au paragraphe 118.1(11) visait à faire en sorte qu’un contribuable puisse demander une déduction pour l’année durant laquelle le don était fait ainsi que pour les cinq années suivantes, même en cas de retards dans la détermination définitive de la juste valeur marchande du don. L’appelante a soutenu que le juge de la CCI avait commis une erreur, soulignant l’emploi du verbe « peut » dans la version française du paragraphe 118.1(11), comparativement au verbe « shall » (doit) dans l’anglais. L’appelante a fait valoir que les deux versions étaient incompatibles et que c’était la version française qui rendait le plus fidèlement l’intention du législateur.

La CAF a rejeté la position de l’appelante, déclarant que, même si le verbe « peut », qui traduit la faculté, et le verbe « shall » (doit), qui traduit l’obligation, semblaient incompatibles en soi, il n’y avait pas de conflit en l’espèce. La CAF a déclaré en être venue à cette conclusion parce que les dispositions de la LIR permettant à un contribuable de contester une attestation de juste valeur marchande indiquaient clairement qu’il fallait donner effet à l’attestation par l’établissement d’une cotisation ou d’une nouvelle cotisation. Par conséquent, selon la CAF, le juge de la CCI n’a pas commis d’erreur à cet égard.

Compte tenu de ce qui précède, l’appel a été rejeté.

Leçons tirées

Cette affaire rappelle aux contribuables qu’aux fins de l’alinéa 110.1(1)d), le don d’un bien écosensible est fait au cours de l’année de la disposition du bien, et non au cours d’une année subséquente, lorsque toutes les conditions ouvrant droit à une déduction sont remplies. Ainsi, les contribuables qui prévoient faire un don doivent être conscients que la période de report prospectif commence l’année qui suit l’année d’imposition où il a été disposé du bien écosensible visé par le don.

  • Article references

    1. L.R.C. 1985, ch. 1 (5e suppl.), dans sa version modifiée.
    2. En 2014, l’alinéa 110.1(1)d) a été modifié afin de prolonger à 10 ans la période de report prospectif pour les dons faits après le 10 février 2014.
    3. 2014 CAF 25, paragraphe 23.
    4. Paragraphes 110.1(2), 110.1(5) et 118.1(10.2) à 118.1(12).
    5. « the disposition is the making of a gift » en anglais.
    6. « by way of gift inter vivos » en anglais.

   

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Chapitre 4

Les bulletins FiscAlerte – Canada récents

Nos bulletins FiscAlerte traitent des nouvelles, événements et changements législatifs de nature fiscale touchant les entreprises canadiennes. Ils présentent des analyses techniques sommaires vous permettant de rester bien au fait de l’actualité fiscale.

FiscAlerte – Canada

FiscAlerte 2020 numéro 60 – Aperçu du formulaire T1134 révisé
Le 27 novembre 2020, l’Agence du revenu du Canada (l’« ARC ») a publié un aperçu du formulaire T1134 révisé, Déclaration de renseignements sur les sociétés étrangères affiliées contrôlées et non contrôlées, ainsi qu’un avis à l’intention des fiscalistes.

FiscAlerte 2020 numéro 61 – Obligation des employeurs à l’égard des fournitures réputées effectuées aux entités de gestion et aux entités de gestion principales
Les employeurs participants qui doivent déclarer la taxe sur les produits et services / taxe de vente harmonisée / taxe de vente du Québec (« TPS/TVH/TVQ ») mensuellement doivent verser le montant de TPS/TVH/TVQ à payer sur les fournitures réputées effectuées à certaines entités de gestion et entités de gestion principales d’ici le 31 janvier 2021.

FiscAlerte 2020 numéro 62 – Publication par l’ARC des lignes directrices sur les frais de bureau à domicile pour les employés
Le 15 décembre 2020, l’Agence du revenu du Canada a publié des lignes directrices détaillées sur la déduction pour frais de bureau à domicile que les employés peuvent demander dans leur déclaration de revenus des particuliers de 2020.

FiscAlerte 2020 numéro 63 – Le ministère des Finances rend publiques des propositions législatives sur la prolongation de la période pour engager des dépenses relatives aux actions accréditives
Le 16 décembre 2020, le ministère des Finances a rendu publiques des propositions législatives préliminaires pour mettre en œuvre les mesures annoncées antérieurement visant à prolonger de 12 mois la période accordée aux sociétés du secteur des ressources pour engager des dépenses admissibles.

FiscAlerte 2021 numéro 01 – Québec élimine les restrictions à l’obtention d’un RTI au titre de la TVQ par les grandes entreprises
Conformément aux modifications à la Loi sur la taxe de vente du Québec présentées le 9 mai 2018, Québec a éliminé les restrictions à l’obtention d’un remboursement de la taxe sur les intrants applicables aux grandes entreprises le 1er janvier 2021.

Résumé

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