Climat, diversité, droits humains, biodiversité, … le développement durable occupe une place grandissante au sein du débat politique et de la sphère économique mondiale. Dans le secteur privé, l’enjeu consiste à orienter les financements vers la transition écologique, inciter les investisseurs à financer les activités les plus durables. Pour y répondre, l’Union Européenne a défini une stratégie de finance durable qui pose, à travers une série de réglementations, les bases d’un cadre commun pour la mesure de la durabilité de l’entreprise.
Soumises à la Déclaration de performance extra-financière depuis 2017, les grandes entreprises françaises ont acquis une solide expérience du reporting ESG. Mais cet exercice de conformité ne suffit plus aujourd’hui, et elles l’ont bien compris. Le régulateur, les investisseurs et les autres parties prenantes de l’entreprise attendent qu’elles soient capables de démontrer leur performance durable.
Notre 3eme bilan de la mise en œuvre de la Déclaration de performance extra-financière par les entreprises françaises du SBF120, en partenariat avec le Medef et Deloitte, a été l’occasion de faire le point sur les tendances de reporting extra-financier en France, mais également de les mettre en perspectives avec les évolutions réglementaires en cours et qui impacteront l'ensemble des entreprises françaises.
Changement de dimension des entreprises sur la RSE et progression en qualité de leur reporting ESG
L’accélération de la prise en compte de la RSE par les entreprises françaises est visible à travers la raison d’être, qui a progressé de 34% dans les entreprises du panel depuis l’année dernière. Elles avancent aussi dans leur vision long terme et leur approche stratégique. Ainsi, 80% d’entre elles ont publié une feuille de route RSE pluriannuelle sur un horizon de 3 à 5 ans, avec des objectifs quantifiés qui concernent notamment le climat et l’égalité femmes / hommes. Enfin, la RSE s’immisce au sein de la gouvernance de l’entreprise : 70% des sociétés du panel disposent d’un comité développement durable, et 88% ont mis en place un système de rémunération variable incitatif basé sur des objectifs ESG pour les mandataires sociaux exécutifs.
Ces dernières données le montrent : la RSE est transversale par les enjeux qu’elle traite, et demande la collaboration de divers métiers. Mais parmi tous les services concernés par les enjeux de durabilité, la fonction finance va devoir particulièrement se transformer dans les prochaines années.
Avec l’ESG, la RSE s’invite dans la finance
Notre bilan annuel démontre déjà l’interconnexion grandissante entre finance et RSE. Les entreprises se tournent vers des rapports intégrés (pour 41 entreprises), faisant le lien entre communication financière et extra-financière, ou vers des modèles de comptabilité multi-capitaux (pour 4 entreprises), qui valorisent les impacts sociaux et environnementaux. 1/3 d’entre elles ont aussi recours à des financements adossés à des critères ESG, ou dédiés à des projets durables.
Pour pouvoir répondre de leur performance ESG, les entreprises doivent mettre en place des outils de pilotage en continu difficilement accessibles, les référentiels de reporting étant encore trop disparates. Le travail de standardisation en cours au niveau de l’Union Européenne devrait renforcer la comparabilité du reporting ESG à travers la normalisation des définitions.
CSRD, taxonomie verte, SFDR … Elever le reporting extra-financier au même niveau que l’information financière
Les réglementations en cours portées par l’Union Européenne concerneront autant les Directions financières que RSE. La taxonomie verte en est un bon exemple puisqu’elle implique de publier des ratios financiers basés sur des critères techniques de durabilité.
La Corporate Sustainability Reporting Directive (CSRD) participe à la même ambition. On ne pourra pas parler, comme pour la NFRD, de directive RSE, puisqu’elle consistera en une modification de 3 directives financières : directive accounting, transparency et audit. Elle imposera aux entreprises européennes de publier les informations extra-financières dans le management report, et de les faire vérifier par un Organisme Tiers Indépendant. Si cette pratique est déjà généralisée en France, elle ne l’est pas chez nos voisins européens, qui vont devoir rapidement se plier à un niveau d’exigence plus élevé. De même, les sustainability statements seront validés au niveau du Conseil d'Administration, c’est-à-dire au même niveau que les financial statements. Enfin, le Commissaire aux Comptes sera très probablement responsable de la vérification des informations sur la durabilité.
D’ici 1 à 2 ans, les Directions financières et RSE devront donc travailler main dans la main pour intégrer une dimension plus globale à la performance, et à la valeur de l'entreprise. C’est une véritable révolution des métiers qui s’annonce, à laquelle il s’agit de se préparer à travers des formations et des nouvelles synergies.