5 min de temps de lecture 4 avr. 2023
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L’ESG : comment transformer une obligation réglementaire en valeur différenciante ?

Auteurs
Fabienne Konik

Associée, Services Financiers, Wealth and Asset Management, Leader du secteur du Wealth Management en France.

Edouard Saintoin

Responsable du Secteur Gestion de patrimoine et d'actifs en France

Edouard est le Wealth & Asset Management Sector leader pour FSO France, il est également en charge des équipes Transaction dédiées à la Gestion d’actif et banques privées (WAM).

5 min de temps de lecture 4 avr. 2023
Expertises associées Services financiers

Face à un cadre réglementaire complexe, découvrez quels sont les principaux défis des sociétés de gestion de portefeuille et quelle stratégie adopter.

En résumé :
  • Le cadre réglementaire actuel s’est clarifié mais il demeure exigeant, confrontant les sociétés de gestion patrimoniale (SGP) à de nouveaux défis.
  • Afin de s’aligner au texte de niveau deux SFDR, les SGP doivent notamment rapidement aboutir à une définition stricte de l’investissement durable, et construire un plan d’investissement permettant d’évaluer les performances accomplies en matière d’ESG.
  • Une refonte de la politique produits et de la gouvernance facilite la mise en œuvre de SFDR niveau 2, tout en contribuant à une plus grande maîtrise de l’expérience client.

Article réalisé par Annabelle Cazes, Fabienne Konik et Edouard Saintoin

Les experts EY ont récolté les témoignages de différents acteurs des services financiers, et plus particulièrement de la gestion d’actifs et de patrimoine, afin de décrypter le cadre réglementaire, le rôle de la finance pour aller résolument vers le « net zéro » et les adaptations organisationnelles nécessaires pour distribuer les produits, optimiser la valeur de la data dans les reporting et éduquer les investisseurs finaux.

Ces derniers mois, les gestionnaires ont été occupés à préparer la mise en œuvre des nouvelles normes techniques réglementaires du règlement Disclosures (règlement délégué 2022/1288 du 6 avril 2022) qui entrent en vigueur en 2023 et qui exigent des gestionnaires de divulguer davantage d'informations sur l'approche ESG, les risques de durabilité et l'impact de leurs fonds dans les documents précontractuels et les rapports périodiques.

Télécharger notre livre blanc pour plus d’informations et de retours d’expériences à ce sujet.

 

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Un paysage règlementaire clarifié mais plus complexe et exigeant

Si le cadre réglementaire pour les services financiers a été marqué par de fortes évolutions, on observe aujourd’hui des perspectives de stabilisation en raison du règlement Taxonomie qui en devient la pierre angulaire. Ce faisant, l’Union européenne se positionne clairement comme le leader mondial de la promotion d'une vision de la finance durable avec un message clair : recentrer les outils de la finance sur leur objectif premier, à savoir obtenir des résultats positifs dans les entreprises et dans le monde réel.

Le cadre réglementaire présente néanmoins une complexité certaine et un rythme désynchronisé entre le règlement et les textes d’application.

Nous avons construit en Europe un cadre de régulation qui est extrêmement cohérent. Le problème réside dans sa très grande complexité qui peut faire perdre de vue les objectifs. Les rythmes posent aussi question, notamment sur la taxonomie où l’on demande un engagement sur un pourcentage d’alignement, alors que la taxonomie n’existe pas puisque seuls les actes délégués sur deux des six objectifs climatiques ont été publiés. De ce fait, la plupart des SGP (Sociétés de Gestion Patrimoniale) écrivent dans leur documentation que leur cible de taxonomie est égale à 0%...
Philippe Zaouati
CEO, Mirova

Ce renforcement du cadre réglementaire européen a induit une évolution inattendue du paysage des fonds. Et la plupart des acteurs sont en train de faire marche arrière car ils jugent cette évolution du cadre comme trop contraignante face au risque juridique potentiel de reclassification des fonds, et adoptent de ce fait une dynamique illustrant que l’outil est mal compris et ne sert pas les objectifs.

Les nouveaux défis pour les gestionnaires d’actifs

Le nouveau cadre, le rythme posé et le contexte d’une supervision européenne accélérée pose donc des défis importants aux SGP.

L’Autorité des Marchés Financiers (AMF), qui va donc intensifier et accélérer ses propres diligences de supervision, en a pleinement conscience et va accompagner les différents acteurs dans cet exercice de mise en œuvre des textes tout en restant sur une position d’une application stricte des textes sans interprétation complémentaire, eu égard aux éléments de contexte national.

Il est important de privilégier la prudence dans la mise en œuvre. En effet, le texte de niveau deux SFDR est entré en vigueur en janvier 2023, et sera supervisé par l'AMF dès la fin de l'année. C'est donc la première fois que l'application est aussi rapide, et par conséquent il est crucial de rester vigilant face à cet exercice européen obligatoire.

Les défis que les gestionnaires devront prendre en compte sont les suivants :

  • Une définition unique de l’investissement durable plus encadrée et intangible

    qui créée un risque plus fort de déclassement si les objectifs ne sont pas tenus et qui augmente donc l’exposition réputationnelle des SGP. C’est ce qui explique le déclassement massif des produits article 9 fin 2022 et questionne cruellement le classement article 9.

  • Un exercice complexe de collecte des données des émetteurs

    qui a conduit non seulement à une forte hétérogénéité des notations ESG des investissements réalisés mais aussi à peu de données publiées sur les indicateurs PAI qui doit s’intensifier. Le contenu comme les méthodes et la présentation des informations relatives aux indicateurs de durabilité et aux incidences négatives à inclure dans les documents précontractuels et rapports SFDR sont maintenant précisés par les RTS et la priorité fléchée sur les données des émetteurs crée clairement un défi supplémentaire à relever.

  • La construction d’une trajectoire dans un univers d’investissement cadré et défini

    pour une comparabilité des positionnements des différents acteurs au sein d’un même univers et une mesure des résultats atteints et des progrès réalisés en termes d’ESG : cette lisibilité à la fois de l’action et des progrès réalisés est un des clés de succès de la lutte « anti-greenwashing ».

  • Une acculturation nécessaire à tous les niveaux de l’organisation

    et un besoin de formation sur les enjeux ESG face à une réglementation technique qui pousse les acteurs à transcrire de façon plus construite et plus lisible l’information aux investisseurs

Avant même de collecter la donnée, il faut réfléchir à son utilisation. A qui est-elle destinée ? Quel service doit-elle rendre et pour quel impact ?
Grégoire Hug
CEO, Weefin
Nous avons de la donnée en abondance. Ceci étant, nous observons un problème de maturité en termes de méthodologie […] Nous sommes vite face à un sujet de big data.
François Lemoine
Directeur Commercial, StarQube

Mise en œuvre : quelle stratégie adopter ?

C’est essentiellement la relation de confiance qui guide les clients aujourd’hui. En ce qui concerne l’offre, nous devons travailler sur sa meilleure compréhension pour et par les clients.
Anne-Cécile Lugagne Delpon
Directrice Marketing, BNP Paribas Wealth Management

Pour être efficaces, les initiatives stratégiques doivent être développées de manière holistique, avec une plus grande participation des principales parties prenantes internes pour ne pas engendrer un fossé entre les communications et les lancements/redéveloppements de produits et la préparation opérationnelle des gestionnaires d'investissement.

Sur l’éducation, nous devons en tant que SGP, faire des trainings sur l’ESG et l’évolution du cadre règlementaire, et nous assurer que toutes les forces de l’entreprise […] soient concernées et partagent un savoir-faire minimum.
Marie Jacot Cardoen
Présidente du directoire, Edmond de Rothschild Asset Management (France)

La mise en œuvre de SFDR niveau 2 est donc bien plus qu’une nouvelle étape règlementaire : elle représente un enjeu clé de définition de la politique produits, de la stratégie d’entreprise et de leur gouvernance.

Des points de vigilance, des engagements et des actes clefs doivent encadrer cette mise en œuvre pour que les objectifs soient atteints et durables !    

Ce qu'il faut retenir

Cet article reprend des extraits du livre blanc réalisé par les experts EY, qui vise à apporter des clés de réussite aux gestionnaires de patrimoine et d’actifs, face aux défis liés à la réglementation européenne en matière d’ESG.

A propos de cet article

Auteurs
Fabienne Konik

Associée, Services Financiers, Wealth and Asset Management, Leader du secteur du Wealth Management en France.

Edouard Saintoin

Responsable du Secteur Gestion de patrimoine et d'actifs en France

Edouard est le Wealth & Asset Management Sector leader pour FSO France, il est également en charge des équipes Transaction dédiées à la Gestion d’actif et banques privées (WAM).