3 min de temps de lecture 23 mars 2021
COVID-19 : comment relancer la distribution spécialisée en 3 leviers

COVID-19 : comment relancer la distribution spécialisée en 3 leviers

Par Julia Amsellem

Associée, EY-Parthenon, Grande consommation et distribution, France

Passionnée par les marques, par ce qui fait leur différence, leur pouvoir d’attraction et leur longévité.

3 min de temps de lecture 23 mars 2021

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  • Défaillances 2020 : le reflux avant la vague ?

La crise actuelle impacte fortement la distribution spécialisée française, déjà fragilisée par de précédentes crises. Découvrez les 3 leviers identifiés Julia Amsellem, associée EY Parthenon, pour relancer le secteur. 

La crise actuelle constitue un tournant historique pour la distribution spécialisée française : le secteur est en souffrance… Mais le fait d’avoir touché le fond est peut-être aussi l’occasion de rebondir. Les procédures en chaînes qui – dans le secteur de la mode en particulier - ont jalonné les 24 derniers mois prennent leur origine bien avant la crise sanitaire. Le secteur a en effet subi trois lames de fond successives, dont la gravité et l’ampleur sont allées crescendo.

1ère lame de fond : l’effet ciseaux

Depuis près de 10 ans, les enseignes spécialisées prennent de plein fouet le fameux effet ciseaux : la croissance de leur chiffre d’affaires est au point mort, tandis que les charges, elles, continuent d’augmenter. Deux phénomènes structurels sont à l’origine de cette pression continue sur le chiffre d’affaires :

  • Tout d’abord, le développement du e-commerce : dans un certain nombre de verticales, en tête desquelles les biens culturels et les jouets, l’entrée des pure players du web a bouleversé le paysage concurrentiel, et pesé sur la croissance des acteurs historiques.
  • Ensuite, la fin du modèle mainstream : dans un marché de la distribution spécialisée de plus en plus mature, les modèles généralistes ne font plus recette : pour séduire le consommateur, faire bien ne suffit pas, il faut être capable de le « bluffer », soit par le prix (ainsi Primark ou Action, grâce à des modèles d’achats particulièrement innovants parviennent à proposer des prix que le consommateur n’avait même pas imaginés possibles), soit par l’offre (c’est par exemple la voie choisie par Picard, qui ne cesse d’innover, laissant aux grandes surfaces alimentaires le terrain du prix le plus bas).

2e lame de fond : les crises sociétales depuis 2018

Les crises sociétales qui ont jalonné 2018 et 2019 : au-delà des deux phénomènes structurels mentionnés ci-dessus, on ne peut ignorer l’impact des crises sociétales qui sévissent depuis le 2e semestre 2018 : la crise des gilets jaunes et les grèves SNCF de 2018 ont fait perdre entre 0,5 et 2 points de croissance aux retailers français, selon les verticales considérées.

3e lame de fond : la crise de la COVID-19

Si la distribution spécialisée est dans une certaine mesure anesthésiée par les mesures d’activité partielle et de report de loyer, la durée et l’ampleur de cette crise sont telles qu’elles créent un risque systémique majeur, et fragilisent les enseignes qui hier encore se portaient bien : encombrés des invendus 2019 et 2020, de nombreux distributeurs textiles ont ainsi réduits les budgets d’achat 2021 pour tenter de limiter la casse… 

Une prudence qui pèse aujourd’hui sur la fraîcheur de leur offre et donc sur leur attractivité. Le cercle vicieux de l’absence de renouvellement de l’offre et du discount est aujourd’hui une menace majeure pour la plupart des enseignes de mode françaises.

Et si cette 3e lame de fond - et la menace qu’elle fait planer sur l’ensemble du secteur - était aussi l’électrochoc qu’il fallait pour pouvoir repartir sur des bases plus saines ?

Trois opportunités de relance pour la distribution spécialisée

Trois opportunités de relance pourraient en effet naître de cette crise sans précédent :

  1. Tout d’abord, l’accélération de la maturité e-commerce des distributeurs physiques, permettant enfin de passer d’un modèle multi-canal – où magasin et site e-commerce fonctionnent en silo – à un modèle omni-canal, au sein duquel le consommateur peut alterner en toute fluidité entre magasin et internet, selon ses besoins et ses envies, et avec une expérience tout aussi qualitative quel que soit le canal choisi.
  2. Ensuite, peut-être est-ce aussi l’opportunité d’ajuster les règles et contraintes pour gagner en flexibilité et en performance, qu’il s’agisse de loyer (ex. : variabilisation du loyer comme en Asie) ou de droit social (ex. : travail du dimanche) ?
  3. Enfin, le consommateur manifeste largement son envie et son intention de changer ses habitudes d’achat, d’aller vers un comportement plus responsable et plus respectueux de l’environnement. Voilà l’occasion pour les distributeurs de rendre plus acceptables des changements de pratiques que le client aurait refusés hier encore (ex. : sur-stocks revendus d’une saison l’autre, fabrication à la demande impliquant des délais de livraison, etc.)

L’incertitude qui pèse encore sur l’année 2021 est forte… Espérons que les distributeurs sauront tenir assez longtemps pour mettre en pratique ces opportunités de rebond.

Ce qu'il faut retenir

La crise actuelle constitue un tournant historique pour la distribution spécialisée française : le secteur est en souffrance. Mais le fait d’avoir touché le fond est peut-être aussi l’occasion de rebondir. Le secteur de la mode en particulier a subi trois lames de fond successives, dont la gravité et l’ampleur sont allées crescendo. Une grande incertitude pèse encore sur l’année 2021.  Espérons que les distributeurs sauront tenir assez longtemps pour mettre en pratique ces opportunités de rebond.

A propos de cet article

Par Julia Amsellem

Associée, EY-Parthenon, Grande consommation et distribution, France

Passionnée par les marques, par ce qui fait leur différence, leur pouvoir d’attraction et leur longévité.