IFRS 9 : les impacts spécifiques au secteur du Private Equity
Le secteur du Private Equity est impacté de manière disparate du fait de l’importante variété d’instruments financiers et des nombreux types d’investissements que l’on retrouve d’un fonds à l’autre.
Pour les fonds de Private Equity principalement investis en actions, l’impact de la norme IFRS 9 est marginal. En effet, les investissements de ces fonds étaient pour la plupart déjà évalués à la juste valeur par le compte de résultat sous IAS 39. Seuls les fonds actions qui utilisaient l’exemption IAS 39 et mesuraient donc au coût certains investissements non cotés, pour lesquels aucun prix de marché n’est disponible, sont impactés plus significativement. En effet, IFRS 9 restreint encore davantage l’utilisation de cette exemption par rapport à la norme IAS 39.
Contrairement aux fonds actions pour lesquels l’impact est limité, les fonds de dettes doivent faire face à des problématiques plus complexes.
Comme indiqué précédemment, la définition d’un modèle économique sous IFRS 9 est primordiale dans la détermination du classement et de l’évaluation des actifs financiers. Celui-ci peut être aisément défini pour certains types de fonds, mais peut aussi se révéler particulièrement complexe à établir pour d’autres. C’est par exemple le cas des fonds d’infrastructures qui combinent à la fois un horizon d’investissement long terme et une stratégie de sortie.
L’établissement d’un modèle économique est un exercice dont la difficulté n’est pas à sous-estimer puisque celui-ci doit être déterminé lors de la mise en application de la norme et n’a pas vocation à être modifié par la suite.
En outre, l’analyse des flux de trésorerie contractuels peut également s’avérer particulièrement difficile pour certaines classes d’actifs atypiques tels que les prêts synthétiques en devises locales très utilisés dans la microfinance.
Une structuration opportune de ces instruments est nécessaire à la réussite du test du prêt basique et donc au maintien de l’évaluation au coût amorti.
Cet exercice peut également être plus subtil. C’est le cas par exemple des fonds qui investissent dans des créances en souffrance. Ces derniers bénéficient généralement de décotes significatives lors de l’achat de ces actifs financiers dépréciés. Il est par conséquent nécessaire d’analyser en détail les modalités de remboursement anticipé afin de s’assurer que les flux de trésorerie contractuels répondent à la définition de prêt basique.
Le calcul des pertes attendues constitue également un véritable challenge pour les fonds de dettes. Outre une mécanique de calcul complexe, ce modèle nécessite la prise en compte d’informations raisonnables et justifiables sur des événements passés, des circonstances actuelles et des prévisions de la conjoncture économique.
L’estimation des pertes de crédit attendues est déjà difficile pour les établissements bancaires mais pour l’industrie des fonds, il s’agit d’un challenge encore plus important. Cet exercice nécessite un investissement conséquent pour les gestionnaires et un dialogue continu avec le Conseil d’Administration afin de valider les hypothèses et jugements afférents à la construction du modèle.
IFRS 9 impacte l’ensemble des fonds de Private Equity, y compris certaines activités en plein essor comme la finance islamique.
Dans le modèle de financement islamique, la rémunération financière ne prend pas la forme d'un intérêt mais d'une compensation. Ainsi, le test du prêt basique qui vise à démontrer que les flux de trésorerie représentent seulement un remboursement du principal et des intérêts associés à ce principal, est par nature complexe à effectuer dans un tel contexte.
Néanmoins, cela ne signifie pas que l’ensemble des actifs échouent à ce test et qu’ils devraient par conséquent être évalués à la juste valeur. Inversement, le maintien de ces actifs au coût amorti n’est pas non plus évident. Cette analyse nécessitera donc de faire preuve de discernement et impliquera une part importante de jugement.
Comme pour les autres fonds de dettes, les actifs financiers qui n’échoueraient pas au test du prêt basique sont sujet à provisionnement. Cet exercice peut là encore s’avérer particulièrement difficile pour certaines structures complexes de finance islamique.