4 minute read 20 Dec 2022
2023 : l’ESG toujours au cœur des priorités du secteur financier

2023 : l’ESG toujours au cœur des priorités du secteur financier

Authors
Vanessa Müller

EY Luxembourg Consulting Partner, ESG Services Leader

Fifteen-plus years of experience in the financial services industry. Wealth management and capital markets experience. Striving for a positive footprint, professionally and personally.

Clément Robert

EY Luxembourg Regulatory Compliance Senior Manager

Senior Manager active in Payments. Strong experience in Private Banking and Fintech. Passionate about sailing and wine.

4 minute read 20 Dec 2022
Related topics Sustainability

2022 a de nouveau été une année chargée pour les acteurs du secteur financier en matière de règlementations du plan d’action européen pour la finance durable, à l’image de l’entrée en vigueur des amendements à la directive MiFID21, qui imposent aux Banques de collecter les préférences ESG de leurs nouveaux clients, assignant un « profil ESG » à chaque investisseur, nécessitant par conséquent que les produits financiers proposés soient adaptés pour bien répondre aux attentes des clients.

Plus que jamais, en 2022, les acteurs du secteur financier se sont donc concentrés sur l'intégration de la thématique ESG dans chaque étape de leur chaîne de valeur : revue de l’offre de produits, récolte des préférences ESG, préparation des publications d’information et de communication, formation des gestionnaires… Si ces derniers mois ont permis de poser des jalons supplémentaires de cet enjeu absolument critique qu’est la durabilité, 2023 s’annonce déjà comme une nouvelle année clé, marquée par des attentes renforcées des régulateurs et des investisseurs.

SFDR : où en sommes-nous et où allons-nous ?

L’entrée en vigueur du niveau 2 de la Sustainable Finance Disclosure Regulation (SFDR2) au 1er janvier 2023 viendra renforcer la transparence des produits d’investissement. Le principal défi pour répondre aux exigences de cette réglementation est lié à la collecte et à l’intégration des données requises pour répondre aux normes techniques requises (appelées Regulatory Technical Standards ou RTS). La dernière version des RTS a été publiée le 30 septembre dernier3, avec des précisions concernant l'exposition aux investissements dans des activités liées aux gaz fossiles et à l'énergie nucléaire.

L’utilisation de nouveaux templates a soulevé des questions quant aux définitions d’investissement durable. L’une d’elles est la capacité des acteurs du secteur financier à produire une analyse détaillée et fiable des investissements et de leur alignement à la Taxinomie européenne4 dans un temps imparti.

Au 1er Janvier, chaque produit ayant des caractéristiques environnementales ou sociales (dit « art. 8 » selon SFDR) ou des objectifs de durabilité (dit « art. 9 » selon SFDR), devra être accompagné de nouveaux documents précontractuels standards à toute l’industrie afin de renforcer et harmoniser la transparence vis-à-vis des investisseurs.

Chaque acteur devra aussi mettre en place une nouvelle section sur son site internet, intitulée « Publication d’informations en matière de durabilité ». Découlant des informations présentes dans les documents précontractuels, cette section représente un outil additionnel de transparence, permettant aux investisseurs de réaliser une comparaison et de prendre des décisions d’investissements éclairées en matière de durabilité.

Alors que les documents précontractuels fixent les caractéristiques et objectifs du produit, les rapports périodiques, eux, rapporteront la performance du produit quant à l’atteinte de cette stratégie ESG. Ce sera le cas pour des indicateurs tels que l'alignement à la Taxinomie, l'allocation des actifs au sein du produit selon leur durabilité, et l’approche de prise en considération des principales incidences négatives (PIN).

De plus, les entités de plus de 500 employés devront publier annuellement un rapport mesurant l’impact agrégé de leurs décisions d’investissements sur les PIN environnementales et sociales pour l’année précédente (le rapport à publier au 30 juin 2023 se rapportera donc à l’année 2022). La prise en compte des PIN sur les facteurs de durabilité permet de mesurer l'impact d'un investissement sur les critères ESG à travers 18 indicateurs obligatoires, tels que l’empreinte carbone ou l’écart de rémunération entre hommes et femmes non corrigé.

Le 17 novembre dernier, de nouvelles précisions très attendues concernant l’application de la réglementation SFDR ont été apportées par le régulateur. Sous forme de Q&A, de nombreux sujets concernant le risque de « Greenwashing », les terminologie ESG et d’investissement durable ont par exemple été clarifiés. Bien que ce document apporte de nombreuses informations, il laisse toujours des interrogations, notamment sur la transposition opérationnelle des nouvelles obligations, en particulier au regard de sujets encore en débat, ou en préparation, comme la Taxinomie.

La Taxinomie européenne, de grandes attentes pour 2023

La Taxinomie de l’Union Européenne est un système de classification standardisée, qui à ce jour, établit une liste d’activités économiques durables sur le plan environnemental. Une Taxinomie sociale est actuellement à l’étude.

Bien que la Taxinomie européenne soit une règlementation à part entière, elle est étroitement liée à d’autres réglementations du plan d’action européen, comme SFDR ou la Directive relative à la publication d’informations en matière de durabilité par les entreprises5 (dite Corporate Sustainability reporting Directive, CSRD en anglais).

Cette Taxinomie sert donc de référence pour déterminer le pourcentage d’éligibilité et d’alignement de certains investissements par rapport à un ensemble d’activités considérées durables sur le plan environnemental. Les produits classifiés art. 8 ou 9 selon SFDR par exemple, devront rapporter leur alignement à la Taxinomie européenne. Ce pourcentage sera communiqué dans le document précontractuel et agit comme un niveau d’engagement ferme de la part de la Banque ou de l’entreprise d’investissement qui devra être maintenu.

De récentes études laissent penser qu’à court-terme, ce taux d’alignement restera faible, sans doute en raison d’une combinaison de facteurs, comme la complexité de ce nouveau sujet, la difficulté de collecter des données probantes, mais aussi finalement la réalité des investissements6.

En 2022, la Taxinomie ne comportait que deux objectifs environnementaux : l’atténuation du changement climatique et l’adaptation au changement climatique. En 2023, quatre autres objectifs entreront en vigueur : l’utilisation durable et la protection des ressources aquatiques et marines ; la transition vers une économie circulaire ; la prévention et le contrôle de la pollution ; et la protection et la restauration de la biodiversité et des écosystèmes. En 2023, les acteurs du secteur financier devront donc évaluer l’éligibilité de leurs investissements pour l’ensemble des objectifs de la Taxinomie et leur alignement, pour les mettre en application dès 2024. L’extension du périmètre de la Taxinomie en 2023 devrait encore améliorer l’alignement global des investissements durables sur le plan environnemental.

La durabilité au sein des entreprises à l’agenda du prochain chantier réglementaire ?

En cette fin d’année 2022, la CSRD a été votée par le Parlement et approuvée par le Conseil européen. La directive introduit des exigences quantitatives et qualitatives importantes en matière d’informations extra-financières. Sur base de certains critères7, ce sont désormais près de 50.000 entreprises en Europe qui devront partager des informations sur leur stratégie Environnementale, Sociale ou de Gouvernance, d’un point de vue financier et non financier (double matérialité). Ce rapport reposera sur des indicateurs prédéfinis, et sera soumis à une assurance limitée. Un grand pas donc vers une quantification et une vérification des informations de durabilité, dans l’esprit des normes de rapports financiers.

La première « vague » d'applicabilité de la CSRD impactera les rapports annuels extra-financiers de 2025, couvrant l'exercice financier 20248. Compte tenu du périmètre très large de cette Directive et du nombre d’indicateurs inédits qui nécessitent une collecte de données robuste, il est clé d’entamer une analyse d'écarts entre les informations, initiatives et publications existantes et les nouvelles exigences soulevées par la CSRD – aussi en prévision d’un audit de ce rapport.

En dehors des impacts non-financiers, les Banques devront mettre à jour leurs modèles de risques afin d’intégrer, là aussi, des notions de durabilité. 2023 sera marquée par le Pilier 3 ESG de l'Autorité Bancaire Européenne, qui exigera des institutions dont les titres sont négociés sur les marchés réglementés de l'Union Européenne qu’elles rendent compte de leurs évaluations des risques environnementaux, sociaux et de gouvernance.

Et ensuite ?

2023 exigera des acteurs financiers d’approfondir leur mise en conformité avec un ensemble de règlementations et de consolider leur approche en la matière.

Au-delà de la complexité de l’appréhension du champ règlementaire, que de nombreuses institutions adressent désormais avec des gouvernances et équipes dédiées, les prochaines années marqueront plus que jamais le besoin d’avoir une transposition opérationnelle effective et efficiente.

Les nombreux rapports (périodiques pour SFDR, extra-financiers pour CSRD, …) vont mettre à l’épreuve la robustesse des processus et des outils des Banques (notamment pour la collecte des données), mais aussi la formation interne du personnel afin d’aborder sereinement ces sujets avec les clients et de les intégrer dans leurs activités quotidiennes.

L’objectif initial du plan d’action européen pour la finance durable était de structurer le secteur financier autour des trois objectifs de durabilité : réorientation des flux de capitaux vers des activités durables, intégration des facteurs ESG dans la gestion des risques, assurance de la transparence sur le long terme. Quatre ans plus tard, si le sujet a le mérite d’avoir progressé auprès des acteurs du secteur financier, de leurs clients et des investisseurs il reste encore du chemin à parcourir tant sur les définitions et la compréhension commune de ce qu’est la durabilité, que sur la mise en pratique. Tout cela, sans perdre de vue l’objectif premier, qu’est la nécessité urgente d’agir à l’échelle de la planète et de l’humanité.

[1] Commission Delegated Regulation (EU) 2021/1253 ; Commission Delegated Directive (EU) 2021/1269 of 21 April 2021, Europa.eu

[2] European Commission, “Sustainability-related disclosure in the financial services sector”, October 2022

[3] European Supervisory Authorities – EBA, EIOPA, ESMA, “Final Report on draft Regulatory Technical Standards”, JC 2022 42, September 2022

[4] European Commission, “EU taxonomy for sustainable activities”, Europa.eu 

[5] European Commission, “Corporate sustainability reporting”, Europa.eu

[6] EY, “ESG Regulatory Reporting Asset Management Survey 2022”, December 2022 

[7] EY “How the EU’s new sustainability directive (“CSRD”) is becoming a game changer”, November 2022

[8] Council of the European Union, “Council gives final green light to corporate sustainability reporting directive”, November 2022

Cet article a été publié dans l'AGEFI.

Summary

2022 a de nouveau été une année chargée pour les acteurs du secteur financier en matière de règlementations du plan d’action européen pour la finance durable, à l’image de l’entrée en vigueur des amendements à la directive MiFID2, qui imposent aux Banques de collecter les préférences ESG de leurs nouveaux clients, assignant un « profil ESG » à chaque investisseur, nécessitant par conséquent que les produits financiers proposés soient adaptés pour bien répondre aux attentes des clients.

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