3 minute read 16 Feb 2022
Pourquoi les Family Offices deviennent-ils des investisseurs de référence dans les stratégies Private Equity ?

Pourquoi les Family Offices deviennent-ils des investisseurs de référence dans les stratégies Private Equity ?

Authors
Laurent Capolaghi

EY Luxembourg Partner, Private Equity Leader

Entrepreneur, passionate and keen to assist our clients navigating the changing landscape of Private Equity.

Marie-Sophie Hélier

EY Luxembourg ITTS Banking and Insurance Partner

Tax professional for more than 10 years. Expertise on tax regulations. Deputy leader of Family Office initiative. Passionate about dancing and ballet. Creativity is my mojo.

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L’appétence des Family Offices pour le capital investissement continue de grandir. D’après Preqin, les investissements effectués par les Family Offices représentent 2,5% du marché global des fusions et acquisitions, une part relativement modérée si on la compare à celle des fonds de Private Equity (PE), mais qui reste en constante augmentation depuis la crise financière de 2009. Ce chiffre en hausse s’explique tant par le souhait des familles d’améliorer la rentabilité de leurs actifs sous gestion, que par leur ancrage entrepreneurial. Pour cette raison, Family Offices et fonds de PE tendent à se retrouver face aux mêmes opportunités d’investissement. 

L’ADN entrepreneurial des Family Offices

L’origine du Family Office (que l’on peut traduire littéralement par “bureau familial”) remonte à la seconde moitié du XIXème siècle, lorsque des familles américaines telles que les Rockefeller ont décidé de gérer elles-mêmes certains aspects de la gestion de leur patrimoine en créant des structures ad hoc. Ce n’est que bien plus tard que le terme sera vulgarisé pour désigner une branche du secteur financier à part entière.

Bien souvent, la fortune de ces familles provient du succès d’une entreprise familiale et de la vision de son fondateur qui, en plus de cultiver son goût pour l'entrepreneuriat, a réussi à le transmettre aux générations suivantes. C’est donc dans cet effort de continuité que certaines d’entre-elles se sont tournées vers les investissements en Private Equity. 

La crise de 2009 a marqué un tournant décisif dans l’approche de ces familles envers l’investissement dans des actifs non cotés.

En effet, un grand nombre de familles fortunées ont été déçues par les gestionnaires de fonds qui n’ont pas su protéger leur capital lorsque les marchés étaient baissiers, malgré leurs promesses. En conséquence, certaines ont décidé de reprendre le contrôle de leur patrimoine et de capitaliser sur leur savoir-faire. D’un modèle d’investissement passif, ces familles vont alors passer à une stratégie active et mettre à profit leurs propres compétences, investissant directement dans des entreprises et utilisant leurs propres réseaux pour identifier des opportunités d’investissement.

Au-delà des compétences, le relationnel

En une décennie, les meilleurs Family Offices ont ainsi su professionnaliser leurs équipes en attirant les talents provenant du monde des banques d’investissements et des fonds alternatifs. Ainsi, ils se retrouvent désormais en concurrence avec les fonds de Private Equity sur les mêmes opportunités d’investissement. Dès lors, un entrepreneur souhaitant céder son entreprise ou être accompagné dans son développement devra désormais s’interroger sur le choix du meilleur partenaire et tenir compte dans la balance de la relation de confiance, des critères de la stratégie d’investissement, des compétences partagées, du degré d’implication souhaité et de la période de détention. 

Le relationnel est essentiel avant d’envisager tout projet de partenariat. C’est en construisant des liens de confiance avec son principal bénéficiaire économique et ses équipes, qu’un investisseur pourra connaître sa philosophie, ses projets d’investissement, les compétences qu’il peut mettre à contribution – en particulier lorsque le degré d’implication dans l’entreprise est fort.

Une stratégie d’investissement plus souple 

Cette autonomie constitutrice, les Family Offices ont su la préserver jusqu’à leur stratégie d’investissement. De même que chaque famille est façonnée par sa propre histoire, chacune d’entre elles poursuit les objectifs qui lui sont propres et peut décider de changer d’objectif, d’industrie ou de secteur géographique au fil du temps. Imaginez par exemple qu’un membre de la famille cède sa place à un successeur dont la vision d’investissement diffère complètement : c’est tout le cap qui change.  

Au contraire, les fonds de Private Equity disposent d’un cadre légal strict les obligeant à spécifier quelle stratégie d’investissement ils vont poursuivre. De ce point de vue, ces derniers offrent un cadre fixe, plus transparent et rassurant pour l’entrepreneur qui a toutefois l’inconvénient d’être moins flexible.

Compétences apportées et degré d’implication souhaité

Certains Family Offices souhaitent mettre à profit leurs compétences entrepreneuriales au profit de l’entreprise dans laquelle ils investissent. Le degré d’implication de l’investisseur est donc un facteur à prendre également en compte. Cette implication peut fortement varier, certains laissant aux entreprises une totale liberté dans leur gestion, d’autres au contraire souhaitant mettre à profit un savoir-faire particulier, voire proposer une réorganisation de l’entreprise, tout comme un fonds de Private Equity pourrait le faire.

Le « temps long » un atout qui fait la différence  

La période de détention est une autre donnée essentielle à prendre en compte dans le choix d’un entrepreneur lorsqu’il souhaite être accompagné dans le développement de son entreprise. En effet, les cycles de détention sont différents selon le type d’investisseur.

Celui d’un fonds de Private Equity varie entre 7 à 10 ans en moyenne, entre la levée de fonds initiale et la revente à d’autres investisseurs. La période de détention et l’allocation d’investissement par un family Office peut être beaucoup plus longue étant donné qu’il pourra offrir du capital « patient » et ainsi détenir une entreprise pendant 30 ans, puis décider de la conserver dans son portefeuille car elle y aura sa place légitime. 

Enfin, il faut noter qu’à la différence des fonds de Private Equity, les Family Offices n’ont pas d’incitation à déployer leur capital sur une période d’investissement donné et ont donc une plus grande capacité d’attendre qu’un actif se présente au bon prix.

Les facteurs ESG & impact

En ce qui concerne les facteurs ESG liés aux investissements, là encore, aucun Family Office ne ressemble à un autre. Si certains commencent à se tourner vers des projets durables, d’autres ne l’envisagent pas encore.

A cela s’ajoute la variante générationnelle : le choix d’investissement d’une génération ne sera pas forcément le choix de celle qui suivra. Si la génération Y1 (ou "Millennials") est plus sensible aux thématiques du développement durable et de la finance d’impact, la génération des baby-boomers2 l’est souvent moins.

Dans tous les cas, la rentabilité reste le premier choix d’investissement d’un Family Office. Qu’il soit durable ou pas, un projet d’investissement doit avant tout lui paraître pérenne et rentable. Avec les changements générationnels, on peut toutefois prévoir une hausse des tendances d’investissement ESG & impact dans les prochaines années. 

De leur côté, poussés par leurs investisseurs et une réglementation de plus en plus stricte, les fonds de PE affichent de manière beaucoup plus transparente leurs objectifs ESG et impact dans leurs projets d’investissement. De fait, les entreprises détenues par ces fonds devront aussi poursuivre un projet de transformation durant la période de détention, avec l’obligation de joindre des indicateurs de référence à leur reporting non financier.

Le cadre règlementaire

Même si certains Family Offices se sentent l’obligation morale d’afficher plus de transparence, ils opèrent dans un cadre beaucoup réglementaire plus souple que les fonds de capital investissement qui doivent rendre des comptes non seulement à leurs Limited Partners (LPs.) mais également à leur autorité de supervision. 

En conclusion

Les considérations de prix, les compétences apportées ou encore le niveau d’implication souhaités sont autant de critères à prendre en compte dans le choix d’un investisseur.

Ainsi, les cédants pourraient trouver dans les Family Offices un partenaire plus flexible, notamment sur la période de détention et l’allocation d’investissement. De plus, ces derniers subissent peu de pression autour du déploiement de leur capital, contrairement aux fonds. Néanmoins, la gouvernance d’un Family Office étant moins standardisée, et intimement liée à la personnalité du dirigeant, il est capital d’engager des relations clés et de s’assurer que cette vision entrepreneuriale soit alignée.

[1]  La génération Y, les milléniaux regroupent l'ensemble des personnes nées entre le début des années 1980 et la fin des années 1990.

[2]  Cette génération comprend les personnes nées entre 1943 et 1965.

Summary

L’appétence des Family Offices pour le capital investissement continue de grandir. D’après Preqin, les investissements effectués par les Family Offices représentent 2,5% du marché global des fusions et acquisitions, une part relativement modérée si on la compare à celle des fonds de Private Equity (PE), mais qui reste en constante augmentation depuis la crise financière de 2009. 

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Laurent Capolaghi

EY Luxembourg Partner, Private Equity Leader

Entrepreneur, passionate and keen to assist our clients navigating the changing landscape of Private Equity.

Marie-Sophie Hélier

EY Luxembourg ITTS Banking and Insurance Partner

Tax professional for more than 10 years. Expertise on tax regulations. Deputy leader of Family Office initiative. Passionate about dancing and ballet. Creativity is my mojo.

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