Un portrait photographique de Stephanie Peipers
L’éducation, il y en aura toujours besoin, sous quelque forme que ce soit.

Stephanie Peipers 

Stephanie Peipers est cofondatrice et présidente de la plateforme numérique World Schools. Après avoir débuté sa carrière dans l’univers très masculin de la vente et de la réparation automobile, elle se lance à son compte dans le web marketing. Forte de ses études d’informatique, elle se forme au design, au marketing digital et au développement web en autodidacte. Double championne suisse de taekwondo, elle a également remporté le Clio R3 Trophy Rally en qualité de copilote.

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09 Novembre 2021

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Stephanie Peipers, cofondatrice et présidente de la plateforme en ligne World Schools, nous parle du rôle essentiel de l'éducation et de la différence que peut faire un certain état d'esprit. 
Comment avez-vous eu l’idée de travailler dans ce domaine ?

Je travaillais dans le développement web en tant que freelance et mon mari était directeur d’un camp de vacances qui accueillait 5 000 enfants par an. Il allait donc visiter toutes les écoles internationales en Asie, en Afrique, en Amérique du Sud… En discutant, on a constaté qu’il n’y avait pas beaucoup de structures de conseil en ligne pour les parents. On a donc lancé un site et on a grandi comme ça.

Dans cette « nouvelle normalité », quelles sont vos priorités à titre personnel ?

Malgré la pandémie, elles n’ont pas beaucoup changé. En tant que femme, j’ai toujours l’objectif de concilier l’éducation de mes enfants et la croissance de mon entreprise. J’adore développer de nouveaux projets professionnels, mais je dois aussi veiller à être là pour les enfants ; à chaque étape de leur vie, ce sont différents équilibres à trouver.

La crise a-t-elle changé vos rapports avec vos employés ? Et plus généralement, quel regard portez‑vous sur le télétravail ?

J’ai toujours été favorable à l’idée de choisir son lieu de travail, que ce soit la maison, un coworking, un bureau… Mais les mentalités n’étaient pas encore prêtes. Désormais, tout le monde est conquis, et les gens sont devenus plus tolérants. Un exemple simple : avant, c’était mal vu d’entendre un bébé en arrière-plan quand on passait un coup de fil professionnel. Mais, pendant une année, ça a été le lot de tout le monde, alors c’est devenu moins grave.

Avec la crise, on a pu offrir plus de liberté à nos salariés. Une de mes collaboratrices rêvait d’aller vivre à Majorque. Pendant la crise, comme on travaillait déjà à distance, je lui ai proposé de refaire son contrat pour qu’elle puisse s’y installer. Aujourd’hui, elle est plus proche de sa famille, et elle est très heureuse. Elle travaille depuis chez elle et se rend de temps en temps dans un coworking : pour elle, c’est la solution idéale. Une autre de nos employées peut travailler de chez elle depuis qu’elle est enceinte, ça lui évite une heure de transport par jour, et elle peut organiser ses tâches comme elle veut. Ce sont des choses qui étaient déjà possibles avant, mais qui n’étaient pas acceptées. De ce point de vue, du moins, je dirais que la crise a eu du positif. Les pays ont aussi dû adapter leur législation, car il y avait un vide juridique autour du télétravail pour les employeurs.

Pour finir, je dirais que nous sommes une entreprise familiale, nous voulons donc faciliter la vie de nos employés, leur permettre de s’épanouir, d’être heureux, de fonder une famille tout en continuant à évoluer professionnellement, notamment les femmes.

J’ai toujours été favorable à l’idée de choisir son lieu de travail, mais les mentalités n’étaient pas encore prêtes.
Stephanie Peipers
Cofondateur et président de la plateforme en ligne World Schools
L’adaptation du cadre légal vous a-t-elle aidée ?

On a modifié les contrats de travail pour en faire des contrats freelance, donc plus flexibles, mais qui restent des accords de longue durée, avec des garanties pour les employés. Avant, les bases juridiques n’étaient pas stables. Aujourd’hui, chacun est libre d’utiliser l’indemnité dont il dispose pour travailler en coworking ou s’aménager une pièce en plus, et ça se passe très bien, on fait en sorte que ce soit bénéfique pour tout le monde. Et au moins, on a pu poser par écrit les formes pour l’espace de travail.

Comment parvenez-vous à conserver un esprit d’équipe et une cohésion avec vos salariés ?

Par certains côtés, on s’est rapproché parce qu’on communique par tchat toute la journée. Certains sujets plus longs ou plus complexes passent encore par mail, mais le tchat permet de finir ce qu’on a à faire avant de répondre, c’est moins intrusif qu’une interaction en face à face. On organise aussi des pauses café par Zoom, même si ça ne remplace pas le fait de se voir en personne. C’est pourquoi il est aussi important d’organiser des moments de retrouvailles pour partager un lien plus réel, même si c’est juste pour manger ou boire un verre, sans forcément parler du travail.

On dit souvent qu’une crise, c’est aussi une période d’opportunités. En l’occurrence, êtes-vous d’accord ? Et qu’en est-il des menaces ?

Oui, je suis tout à fait d’accord. Le digital a vu s’ouvrir un monde d’opportunités encore plus grand. Prenons Zoom, par exemple : avant, combien de personnes l’utilisaient ? et maintenant ? Dans le domaine médical également, beaucoup de gens ont fait des consultations à distance. Ça n’existait pas avant. Pareil pour les écoles en ligne. Enfin, il y a des choses qui étaient déjà possibles digitalement, mais pour lesquelles on n’avait pas encore franchi le pas, à commencer par la possibilité de mieux intégrer sa vie de famille avec sa vie professionnelle. Cela profite à beaucoup de monde, notamment aux femmes.

La crise a favorisé la conversion du secteur de l’éducation au numérique. Les écoles physiques se sont retrouvées confrontées à des problèmes, certains examens ont dû se faire en ligne, et il fallait que les diplômes soient quand même reconnus. C’était un peu une année pilote, et maintenant que le dispositif existe, cette option sera présente de manière durable. Nous voyons toutefois une tendance nette au retour à la normale, en présentiel, sauf dans quelques rares pays, comme la Thaïlande, où de fortes restrictions sont encore en vigueur.

Pour ce qui est des menaces, je pense aux mesures qui empêchent les gens d’exercer leur métier. C’était le cas pour les camps de vacances : en Suisse, ils ont pu opérer, mais ce n’était pas le cas de tous les pays. L’été dernier, au Royaume-Uni, tous les parents cherchaient une solution pour leurs enfants, et ils n’en trouvaient pas. Le problème, c’est qu’on ne peut pas tout dématérialiser.

Quand on est dans l’urgence, on fait les choses plus efficacement. Si l’on s’attend à la catastrophe, on n’est peut-être pas dans le meilleur état d’esprit pour trouver des solutions.
Stephanie Peipers
Cofondateur et président de la plateforme en ligne World Schools
Que changeriez-vous si vous pouvez remonter dans le temps, et avez-vous confiance dans l’avenir ?

Pour moi, le passé, c’est le passé. Je ne sais pas si ce serait très bon de savoir à l’avance tout ce qui va arriver. Parfois, quand on est dans l’urgence, on fait les choses plus efficacement. Si l’on s’attend à la catastrophe, on n’est peut-être pas dans le meilleur état d’esprit pour trouver des solutions.

Je ne cherche pas vraiment à savoir quand la crise sera terminée. Je ne fais pas de pronostics et je planifie toujours les deux options. Plan A, tout redevient comme avant, plan B, ça reste complètement digital. J’essaie d’être flexible et prête à tout.

En revanche, je suis convaincue d’une chose : l’éducation, il y en aura toujours besoin, sous quelque forme que ce soit. L’éducation internationale également, pour les familles expatriées comme pour les familles locales. Ce sont des choses qui ne vont pas disparaître, que ce soit en ligne, en personne, en hybride... Il y aura de toute façon une solution, quelle qu’elle soit, pour que les enfants soient éduqués. L’accès à l’éducation est un droit fondamental. Après, à nous d’aider les parents et les écoles au mieux dans cette transition.

Le comportement et les demandes de vos clients ont-ils évolué, et si oui, avec quelles conséquences pour votre activité ?

On observe de nouvelles demandes : le home office a permis à certaines familles de réaliser leur rêve d’aller vivre à tel ou tel endroit, par exemple. Du coup, il fallait trouver une école adaptée sur place. Il y a aussi des parents qui ont expérimenté l’école en ligne et qui veulent continuer. Enfin, il y a des parents qui tiennent à ce que leurs enfants continuent d’aller physiquement à l’école pendant la crise, ce qui reste autorisé en boarding school dans certains pays. En revanche, il est difficile d’obtenir un visa pour aller visiter l’établissement. Les parents doivent donc prendre la décision sans se déplacer. Les écoles se sont adaptées en proposant des visites virtuelles.

Le passage au « tout numérique » joue en notre faveur car toute notre offre de conseil est digitale. Ce sont plutôt les agences d’événementiel dans le domaine de l’éducation internationale qui en ont pâti.

Comment vous préparez-vous à ce que l’avenir nous réserve ?

Notre mission est de faciliter, grâce à nos services en ligne, la mise en contact entre les écoles, les camps de vacances et les parents. On va également suivre l’évolution des écoles en ligne et des nouveaux programmes d’enseignement.

Professionnellement, nous essayons de rester flexibles, notamment sur le plan technologique. Mais, quoi qu’il en soit, on s’adapte à ce qui arrive. On ne peut pas anticiper. Si quelqu’un vous disait qu’il sait de quoi demain sera fait, il mentirait, non ?

Plus généralement, j’espère que mon partage d’expérience aidera des entrepreneurs ou des femmes qui hésitent à se lancer. Le digital, ça permet beaucoup de choses.

Pour finir, la résilience est-elle une faculté innée ou qui s’acquiert au gré des crises ?

Le fait de rebondir demande déjà une certaine confiance en soi, de la créativité et de l’imagination. L’an dernier, tout le monde a dû faire de son mieux face à un événement inattendu, et trouver le moyen d’améliorer la situation.

Le fait de rebondir demande déjà une certaine confiance en soi.
Stephanie Peipers
Cofondateur et président de la plateforme en ligne World Schools

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