Personnes marchant dans la rue

Quelle réponse à la trajectoire IReF : réponse stratégique ou tactique ?


Une explosion des reportings réglementaires depuis 20 ans… et ce n’est pas fini !


En résumé :

  • « La BCE prévoit le déploiement de l’initiative IReF (Integrated Reporting Framework) à horizon 2027 dont l’objectif est de normaliser la production des données réglementaires et de réduire la charge de travail dédiée à la production des reportings par les banques »
  • Les établissements doivent anticiper et adapter les évolutions réglementaires et s’interroger sur le modèle de données et le modèle opérationnel pour la production des reportings réglementaires d’ici là
  • Pour supporter la trajectoire IReF, la BCE a également proposé un dictionnaire de données (BIRD, Banks’ Integrated Reporting Dictionary)
  • Ces nouvelles attentes présentent également leur lot de challenges, les banques doivent anticiper l’agenda réglementaire à venir notamment sur la thématique ESG et l’intégration des données extra-financières

Depuis 2006 et la mise en place des Finrep / Corep, le nombre de reportings réglementaires a augmenté de 80% : reportings en normes locales (avec SURFI devenu RUBA en 2022), reportings BCE (solvabilité, liquidité…) réguliers et ad-hoc.  A ces reportings « core », de nombreux reportings « satellites » sont venus s’ajouter, permettant de produire de l’information analytique complémentaire : STE sur les taux d’intérêt, Fundings plans pour la planification, ainsi que de nombreuses demandes ad-hoc du régulateur (AQR, stress-tests…). Enfin, des reportings encore plus récents comme ANACREDIT et ANATITRE imposent de fournir de l’information très granulaire et transactionnelle.

La pression devrait encore s’accroître avec une réglementation ESG qui entre progressivement en vigueur : taxonomie verte déployée du 1er janvier 2022 à 2024, directive CSRD en 2023, exercices de stress-tests climatiques… Les banques doivent donc désormais gérer une quantité exponentielle de données granulaires à communiquer aux régulateurs pour se conformer aux exigences des déclarations.

Des coûts opérationnels de production importants découlent de la fréquence élevée, des délais très courts et des volumes importants à fournir. A ces éléments s’ajoute la complexité relative à la gestion des données collectées, les établissements bancaires devant stocker des volumes de données considérables et hétérogènes, issus de sources multiples.

Les banques doivent également s’assurer que les données fournies aux régulateurs via les différents reportings sont homogènes et cohérentes. Cet objectif n’est parfois pas aisé à atteindre en raison de l’hétérogénéité des sources de production des reportings et des référentiels. Le défi principal pour les banques consiste ainsi à répondre au mieux à la réglementation, sans détruire de valeur.

C’est pour aider les banques à répondre à ces défis que l’EBA a mené une étude permettant de comprendre les coûts réels des reportings réglementaires supportés par les banques. Quatre types de recommandations ont été émises à l’issue de cette étude en 2021 :

  • Changements dans le processus de développement du cadre européen
  • Modifications de la conception des exigences de reporting prudentiel de l’EBA et du contenu des rapports
  • Coordination et intégration des demandes de données et des exigences de reporting
  • Modification du processus de reporting, y compris via l’utilisation plus large de la technologie

Aujourd’hui, quelle est la réponse des directions financières ?

Les enjeux liés à la maîtrise des données ne sont pas nouveaux et les acteurs financiers s’y attèlent depuis plus d’une dizaine d’années. Tout repose ainsi sur la structuration d’un modèle de données unique et l’utilisation qui en est faite.

Il est donc nécessaire de mettre en place un modèle de données unique pour répondre à ces multiples enjeux permettant ainsi aux collaborateurs des environnements Finance de concentrer leurs efforts sur des tâches à plus forte valeur ajoutée.

Une grande partie des acteurs met en place des projets de convergence de données finance et risques pour ces filières étroitement liées permettant ainsi d’optimiser la qualité de la donnée, d’assurer une maîtrise et un pilotage de ces dernières et enfin de mutualiser les coûts élevés des développements systèmes associés.

Une nouvelle opportunité avec le reporting intégré ?

Le Banks’ Integrated Reporting Dictionary (BIRD) et l’Integrated Reporting Framework (IReF) sont deux initiatives parallèles du Système Européen de Banques Centrales (SEBC) dont l’objectif commun est de standardiser les données réglementaires et de réduire la charge de travail des banques en matière de Reporting.

Le modèle BIRD est un modèle de données créé en 2019 visant à fournir des définitions communes aux reportings prudentiels (dictionnaire de données) mais également à fournir des règles de validation et de transformation permettant de produire l’ensemble des indicateurs des reportings réglementaires européens. Les banques peuvent ainsi organiser efficacement via ce modèle leurs données internes et standardiser leurs processus de reportings. Ce modèle de données est préconisé par la BCE mais n’a pas vocation à être rendu obligatoire.

L’IReF est un système de reporting intégré qui pourrait permettre à horizon 2027 (avec un caractère obligatoire cette fois) de simplifier les processus de déclaration en assurant le système de collecte des données en une seule fois. Le régulateur pourrait ensuite utiliser ce système intégré pour générer lui-même des analyses spécifiques (permettant de reproduire ce qui est fait actuellement avec FINREP, COREP… mais également mener des analyses complémentaires).

Les reportings réglementaires pourraient ainsi être reconstitués directement à partir des données brutes et limiter les demandes ad-hocs du régulateur.

Comment les banques doivent-elles se préparer ?

Si peu de banques ont pour le moment déployé le modèle de données BIRD (car les établissements disposaient préalablement de modèles de données internes permettant de générer les reportings réglementaires), elles sont toutefois nombreuses à s’y intéresser. Ces établissements savent en effet que le déploiement du reporting intégré IReF pourrait être grandement facilité par le déploiement préalable de BIRD.

Les banques vont devoir revoir l’ensemble de leur processus de production ainsi que les architectures fonctionnelles qui les soutiennent. Elles vont également devoir anticiper les impacts opérationnels et de conduite du changement.

Les banques doivent tout d’abord réaliser la gap analysis entre leur modèle de données interne et le modèle de données BIRD. Elles doivent déterminer les données qu’elles vont utiliser et celles qu’elles n’auront pas à collecter. Une banque de détail ne collectera pas les données requises par BIRD pour le portefeuille de trading par exemple.

Elles doivent ensuite identifier les systèmes amonts (systèmes opérationnels, comptables…) qui vont alimenter le modèle de données, contenu dans un puits de données (Datawarehouse, Datalake).

Dès cette étape, la banque doit être en mesure d’identifier les impacts sur son modèle opérationnel de production des reportings règlementaires.

Il s’agit ensuite d’identifier les processus de production impactés par la mise en place du modèle de données BIRD (reportings réglementaires concernés) ainsi que les interfaces de données.

Sur la base des travaux de cadrage, la banque peut lancer le projet après avoir identifié les chantiers à mener, défini le planning de mise en œuvre et budgétisé le projet.

Le projet de déploiement doit s’appuyer sur une équipe pluridisciplinaire qui regroupe des compétences fonctionnelles financières et réglementaires fortes mais également techniques (IT). Une des clés de la réussite consiste à bien arrimer ces équipes autour d’une ambition forte et clairement partagée au sein de l’organisation. L’utilisation de la méthode « agile » tend à démontrer son efficacité pour déployer ce type de projet. Elle permet de réduire le cycle de développements et de répondre plus rapidement et efficacement aux demandes des équipes fonctionnelles Finance.

Le projet s’articulera autour de deux axes bien distincts :

  1. Alimentation de la base de données selon le modèle BIRD via les systèmes amonts
  2. Génération en aval des reportings réglementaires

Déployer BIRD : un préalable nécessaire au déploiement des nouveaux reportings ESG ?

L’ESG devient une préoccupation majeure pour le régulateur, afin de répondre aux exigences de la Commission européenne formulées dans son vaste plan d’action établi en 2018 intitulé « Financer la croissance durable ». Dans ce cadre, de nouvelles réglementations sont entrées ou vont entrer en vigueur prochainement.

En particulier, la taxonomie verte, (système de classification, établissant une liste des activités durables pour l’environnement), est un enjeu majeur des années à venir. Les banques vont devoir publier des indicateurs de durabilité comme le ratio d’actifs « verts » permettant de déterminer la part des actifs de l’établissement de crédit alignés à la taxonomie verte. Le déploiement de ce nouveau reporting est progressif : seule l’éligibilité des financements de la banque à la taxonomie doit être publiée cette année. Ce n’est qu’à horizon 2024 que les banques devront publier l’alignement à la taxonomie de leurs financements pour six objectifs environnementaux.

La directive CSRD (Corporate Sustainability Reporting Directive) entrera en vigueur en 2024 et vise renforcer et homogénéiser en Europe les rapports dit extra-financiers jusque-là, c’est-à-dire couvrant des thématiques ESG (actuellement régis par la directive NFRD). Le rapport extra-financier va devenir beaucoup plus quantitatif.

Il devra notamment :

  • Définir un langage compris par tous (via l’utilisation de la taxonomie verte pour l’ensemble des éléments chiffrés)
  • Réancrer le reporting RSE dans l’intégration des risques et impacts dans la stratégie
  • Lier risques & impacts, stratégie, objectifs, résultats

Pour ces reportings, mais également pour les autres à venir, la banque va devoir intégrer de nouvelles catégories de données dans son modèle :

  1. Des données complémentaires sur les caractéristiques des contreparties financées (ex : éligibilité des contreparties à la directive NFRD/CSRD, code NACE)
  2. Des données complémentaires sur les caractéristiques des financements octroyés ou sur les sous-jacents des financements et permettant de qualifier l’alignement à la taxonomie verte.

Ces données d’un nouveau genre devront être intégrées au modèle de données de la banque. La BCE pourrait ainsi potentiellement compléter le modèle de données BIRD pour intégrer les données ESG nécessaires aux nouveaux reportings réglementaires. Les banques pourront sinon compléter ce modèle avec les nouvelles données demandées.

EY à vos côtés pour accompagner cette nouvelle ambition

Au vu de l’ampleur des chantiers à mener (déploiement d’un reporting intégré à horizon 2027, mise en place des reportings ESG comme la taxonomie), les banques doivent anticiper dès à présent les enjeux et s’assurer que les options structurantes de leur architecture SI mais également que les processus de production des reportings réglementaires (existants et nouveaux) sont en cohérence avec les exigences de la BCE, et notamment le modèle de données BIRD.

Afin de répondre à cette ambition, nous mettons à votre disposition une expertise approfondie dans la transformation du modèle opérationnel de la banque.

Via les projets de déploiement réussis & les gap analysis déjà menées entre les modèles de données actuels et BIRD, nous vous aidons à déterminer la meilleure stratégie pour vous conformer aux exigences futures du régulateur.

Notre capacité d’enrichissement d’équipes fonctionnelles réglementaires par des spécialistes de la Finance durable permet d’appréhender au mieux l’intégralité des aspects de ce type de projet.

Nous vous accompagnons à travers différents axes comme la définition des enjeux stratégiques (gouvernance via le rapprochement des départements Développements Durables et Finance, le positionnement de la Finance comme acteur majeur sur les problématiques ESG ou encore la revue du modèle de coûts qui doit être un modèle « gagnant »), la revue et l’optimisation des procédures opérationnelles de production, l’amélioration des réponses et des échanges avec le régulateur.

Ce qu'il faut retenir

Demain, la banque ne doit plus seulement répondre aux exigences du régulateur. Elle doit aussi anticiper les besoins futurs et déployer des processus permettant d’assurer la qualité des données transmises.

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