Sous la Ve république, les ministres du travail enchaînent les propositions de loi en matière de travail, d’emploi, de formation professionnelle, de dialogue social ou de préventions des maladies professionnelles afin d’édifier un environnement de travail plus stable et en conformité avec des besoins humains et stratégiques en constante mutation.
1. Eric Woerth en 2010 : Remettre à l’équilibre le système de cotisations sociales et de retraite
Aujourd’hui, alors que l’âge de départ à la retraite est un sujet abordé par la plupart des personnels politiques, en 2010, Eric Woerth, ministre du Travail, de la Solidarité et de la Fonction publique soutient la réforme des retraites sous le gouvernement Fillon. Son projet de loi vise à décaler l’âge légal minimal de départ à la retraite de 60 à 62 ans, impactant en premier la génération née en 1951 avec une hausse de 4 mois par an. Cependant, les dispositifs de pénibilité et de carrières longues ont été aménagés pour que certains travailleurs puissent maintenir leur âge de départ à 60 ans sous certaines conditions.
2. François Rebsamen en 2015 : Améliorer le dialogue social
Permettre une meilleure intégration du salarié en entreprise et une meilleure représentativité syndicale a été un sujet d’étude porté par François Rebsamen, ministre du Travail, de l’Emploi et du Dialogue en 2015. Il est à l’initiative de la loi Rebsamen, promulguée en 2015, et apporte du renouveau dans la représentativité du personnel, l’information et dans les négociations sociales. Son projet de loi est marqué par 4 axes majoritaires :
- augmenter la représentativité des TPE dans le dialogue social en instaurant des commissions paritaires régionales, composées de salariés et d’employeurs, et l’extension de la DUP (Délégation unique du personnel) ;
- valoriser le rôle du syndicat dans l’entreprise ;
- simplifier le fonctionnement des instances représentatives du personnel et valoriser les compétences du CHSCT ;
- favoriser le recours au CDD et au contrat intérimaire.
Les réformes de la loi Rebsamen se sont inscrites dans une optique de rationalisation et de modernisation du dialogue social, objectif qui a été parachevé par les ordonnances dites Macron en septembre 2017.
3. Myriam El Khomri en 2016 : Moderniser le travail
La « Loi Travail » du 9 août 2016, portée par la ministre Myriam El Khomri, a pour objectif de mieux protéger le salarié, de favoriser l’embauche et de donner davantage de marge de manœuvre à la négociation en entreprise à travers 130 décrets et arrêtés.
Cette loi intervient dans différents domaines, notamment :
- le domaine du numérique avec le droit à la déconnexion, l’amplification du télétravail, le Compte personnel d’activité (CPA) et la majoration du Compte personnel de formation (CPF) pour les formations en ligne ;
- la négociation collective avec la mise en place des accords majoritaires et des dispositifs de compétitivité ;
- la flexibilité du temps de travail et la majoration des heures supplémentaires ;
- les conditions de suivi médical des salariés.
Lors de sa promulgation en 2016, cette loi fait l’objet de nombreuses controverses et divise les opinions en 2016, mais elle a posé les bases d’une modernisation du Code du travail. Laquelle a été un tremplin considérable pour les ordonnances Macron ayant pour objectif « d’aller au-delà de la loi Travail » l’année suivante.
4. Michel Sapin en 2016 : Améliorer la transparence et la lutte contre la corruption en France
Sur la scène internationale, la France connaît un retard indéniable dans la lutte contre la corruption et dans la transparence de ses activités économiques.
À l’adoption de la loi Sapin 2 en 2016 sous l’impulsion de Michel Sapin ministre du Travail, le gouvernement français espère consolider sa capacité à sanctionner le manque de transparence des entreprises nationales et ainsi renforcer celles ayant des activités à l’étranger. Cette loi fait suite à la Loi Sapin 1 promulguée en 1993, relative à la prévention de la corruption et de la transparence de la vie économique et des procédures politiques, et met l’accent sur la corruption en entreprise.
Concernant aussi bien le secteur privé que public, la loi Sapin 2 vise à mettre en œuvre un dispositif de prévention et de détection de la corruption avec la création de l’Agence française anticorruption (AFA) et notamment par la mise en place de mesures de protection pour les lanceurs d’alerte. Une mission d’information de la Commission des Lois propose un renforcement de la loi Sapin 2 selon 4 axes de propositions :
- clarifier l’organisation institutionnelle ;
- favoriser le recours à la convention judiciaire d’intérêt public ;
- renforcer la protection des lanceurs d’alerte ;
- améliorer la transparence des décisions publiques.
Cinq ans après l’entrée en vigueur de la loi, le bilan de son impact reste mitigé : alors que l’action de l’AFA semble porter ses fruits, la portée du dispositif de protection des lanceurs d’alerte reste encore faible, notamment à l’étranger. Sur la scène internationale, des efforts doivent être maintenus pour garantir la transparence et l’éthique des activités économiques françaises.
5. Muriel Pénicaud en 2018 : Donner aux Français le choix de leur avenir professionnel
Alors que la crise sanitaire ne touche pas encore le marché du travail français, celui-ci est en pleine transformation. La loi « Avenir Professionnel » soutenue par Muriel Penicaud en 2018 vise à donner les clés à la population active française pour choisir son avenir professionnel. Cette réforme permet de transformer l’apprentissage et la formation professionnelle, et comprend 3 chantiers majoritaires :
- la création d’une nouvelle société de compétences avec un investissement massif dans la formation ;
- une indemnisation du chômage plus universelle et la lutte contre le chômage de masse ;
- des dispositions relatives à l’emploi en protégeant les travailleurs les plus vulnérables.
Pour soutenir cette loi, 15 milliards d’euros ont été débloqués sur 5 ans pour permettre de former et d’accompagner un million de demandeurs d’emploi.
À l’aube des 4 ans de la loi Avenir Professionnel, les résultats des réformes de formation et d’apprentissage sont les suivants : le seuil des 7000 000 contrats d’apprentissage a été dépassé et le volume de téléchargement de l’application Mon Compte de Formation est relativement haut avec environ 4 millions de téléchargements.
Les efforts doivent perdurer et des progrès restent à faire, notamment au niveau des mesures de l’assurance chômage qui restent controversées et n’ont pas pu être menées à terme, le bilan étant alourdi par la crise de la Covid-19.
Et maintenant, quels sont les nouveaux horizons ?
Elisabeth Borne, ministre actuelle du Travail a également porté de nombreux projets de loi comme celui de la réforme de l’assurance-chômage, entrée en vigueur le 1er décembre 2021, qui durcit les règles d’obtention de l’allocation chômage et de la durée d’affiliation. D’autres projets sont en cours d’étude par le ministère du Travail, notamment un projet de loi de financement, également porté par Elisabeth Borne pour 2022, allouant un budget de 16,6 milliards d’euros au financement des politiques de l’emploi et de la formation. À l’approche des élections présidentielles, des changements et des évolutions sont à prévoir dans le secteur du droit du travail.