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Réinventer le pilotage de la gestion des risques de tiers : le rôle stratégique de l’IA

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Face aux risques tiers croissants, l’IA et la centralisation réinventent la gestion pour plus d’agilité, de sécurité et de performance.


En résumé :

  • L’IA et la centralisation transforment la gestion des risques tiers en réponse à un paysage de menaces plus rapide et plus complexe.
  • Les modèles traditionnels de gestion du risque de tiers montrent leurs limites face à la multiplication des fournisseurs et aux exigences accrues en matière de conformité.
  • Pour rester compétitives, les entreprises doivent adopter une gouvernance transverse, investir dans des outils IA et anticiper les ruptures technologiques.

Transformer une fonction critique en levier stratégique

Crises, réglementation, cybersécurité : les risques se multiplient.

Les chaînes d’approvisionnement mondiales, déjà fragilisées par les crises sanitaires, géopolitiques et climatiques, sont confrontées à une montée en puissance des risques de cybersécurité, à une pression accrue en matière de conformité réglementaire, et à une exigence croissante des parties prenantes sur les critères ESG. Dans ce contexte instable, les entreprises doivent reconsidérer leur approche de la gestion des risques liés aux tiers (Third-Party Risk Management, ou TPRM).

La réponse ? Une transformation en profondeur, rendue possible par deux leviers majeurs : l’intelligence artificielle (IA) et la centralisation des fonctions TPRM

TPRM : un modèle traditionnel à bout de souffle

Selon l’édition 2025 de l’enquête mondiale EY Third Party Risk Management, les méthodes traditionnelles (audits périodiques, approches en silo, évaluations manuelles) peinent à suivre le rythme d’un environnement interconnecté, non linéaire, dont les mutations s’accélèrent. Résultat : des angles morts, des coûts élevés et une gestion fragmentée des risques. 

Un exemple parmi d’autres, dans de nombreuses entreprises, une équipe cybersécurité peut évaluer un fournisseur comme sûr d’un point de vue technique, sans tenir compte de sa fragilité financière. Sans vision intégrée, il reste impossible d'anticiper les risques systémiques.

Team of two girls deftly managed to sail in the sea
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Chapitre 1

La complexification des risques tiers appelle un nouveau type de réponse.

La gestion des tiers évolue vite : face à la complexité croissante et à l’essor des risques, les entreprises doivent adopter des approches plus intégrées, agiles et résilientes.

La gestion des relations avec les tiers devient de plus en plus complexe : multiplication des partenaires, diversification des modèles (cloud, SaaS, prestataires spécialisés), sous-traitance en cascade… Dans ce contexte, les risques opérationnels, de cybersécurité, réglementaires ou liés à la continuité deviennent majeurs.

L’enquête mondiale EY Third Party Risk Management 2025 met en lumière une tendance claire : l’environnement de risques se transforme plus vite que les méthodes traditionnelles de gestion. Les organisations continuent d’appliquer des approches séquentielles, lentes et cloisonnées, alors même que les attentes des régulateurs, des clients et des conseils d’administration imposent une vision plus intégrée et proactive.

Faits marquants :

  • Le risque opérationnel est devenu le premier critère dans l’évaluation des fournisseurs, cité par 57 % des répondants (vs 40 % en 2023).
  • La résilience, la cybersécurité et l’impact financier deviennent des indicateurs centraux pour déterminer la criticité d’un tiers.
  • En cas de défaillance de réponse, les entreprises sont plus nombreuses à suspendre la relation ou exiger une remédiation rapide.

Enjeux pour les organisations : gérer plus de partenaires, sur plus de fonctions, avec des profils plus variés… tout en assurant un contrôle rigoureux et agile.



Great view of sailing boats at a sea regatta
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Chapitre 2

L’IA et la centralisation : une double opportunité pour transformer la gestion du risque de tiers

Centralisation et IA redéfinissent la gestion des risques tiers : automatisation, analyse prédictive et suivi intelligent ouvrent une nouvelle ère de performance et de résilience.

Face à ces défis, deux leviers se démarquent comme moteurs de transformation : la centralisation du pilotage des risques tiers, et le recours à l’intelligence artificielle (IA).

Les modèles centralisés, déjà adoptés par plus de la moitié des grandes organisations interrogées, permettent :

  • une réduction des redondances dans les contrôles ; 
  • une standardisation des processus et des données ; 
  • une meilleure vision transversale des risques. 

L’IA, quant à elle, ouvre une nouvelle ère : elle ne se limite pas à automatiser l’existant — elle réinvente la façon dont les risques sont identifiés, évalués et gérés :

Exemples d’usage concrets :

  • Identification des fournisseurs : au lieu de constituer manuellement des listes de prestataires, l’IA utilise des algorithmes pour explorer des bases de données et identifier des fournisseurs selon des critères prédéfinis, rendant le processus plus rapide et plus exhaustif.
  • Évaluation des risques : les modèles d’IA évaluent les risques à partir de données historiques et d’analyses prédictives, fournissant des scores de risque objectifs et actualisés.
  • Due diligence : l’IA remplace les revues manuelles, longues et coûteuses, par une collecte automatisée et une analyse intelligente des documents fournisseurs (informations financières, attestations de conformité, etc.).
  • Négociation contractuelle : grâce au traitement en langage naturel (NLP), l’IA analyse les clauses contractuelles, identifie les points de vigilance et suggère des améliorations conformes aux meilleures pratiques du marché.
  • Onboarding : l’IA fluidifie le processus d’intégration des fournisseurs grâce à des workflows automatisés et des check-lists, tout en garantissant la conformité aux exigences réglementaires et internes.
  • Surveillance : l’IA assure un suivi continu des performances fournisseurs en analysant les données en temps réel et en générant des alertes en cas d’anomalie ou de manquement.
  • Gestion des incidents : l’IA utilise des modèles prédictifs pour détecter en amont les risques d’incidents et réaliser des analyses de scénarios, afin d’anticiper les effets domino souvent invisibles dans les approches linéaires ou cloisonnées. 
  • Formation et sensibilisation : l’IA propose des modules de formation personnalisés, adaptés au profil, au niveau de responsabilité et au style d’apprentissage de chaque collaborateur.

Les fonctions TPRM les plus avancées utilisent désormais des assistants intelligents (agents IA) capables de dialoguer entre eux, d’agir de manière autonome dans un cadre défini, et de remonter des recommandations aux responsables humains.

View of the sunset over the mediterranean sea and the southern coast of Menorca/Minorca in the Balearic Islands (Spain), from the rocky shores, with a sailboat in the foreground.
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Chapitre 3

Accélérer, oui, mais comment ?

Anticiper les ruptures, structurer les données et intégrer l’IA : trois leviers stratégiques pour transformer le TPRM en un atout de performance et de résilience.

Pour tirer pleinement parti de ces opportunités, les leaders des risques doivent agir sur trois fronts stratégiques : 

1. Adopter une approche d’entreprise transverse

La gouvernance des risques tiers ne peut plus être éclatée entre métiers. Elle nécessite une coordination stratégique, une vision commune et la nomination de pilotes de risques capables de relier les objectifs métiers aux exigences réglementaires et à la performance globale. 

2. Investir dans des outils boostés à l’IA

Les outils existent, mais leur déploiement reste encore limité. Il est crucial de : 

  • améliorer la qualité et la structure des données (data governance) ; 
  • former les équipes à l’IA appliquée au risque ; 
  • tester des cas d’usage concrets pour construire progressivement la confiance. 

3. Préparer et anticiper les points de bascule

Comme pour l’adoption massive du cloud, le passage à l’IA générative ou agentique pourrait créer un basculement rapide. Les entreprises qui s’y préparent dès maintenant auront un avantage compétitif en évitant de devoir réagir dans l’urgence lors de la prochaine crise. 

Un TPRM du futur à portée de main

En couplant automatisation, agilité et intelligence prédictive, l’IA et la centralisation permettent de transformer le TPRM d’un centre de coûts en levier de performance stratégique. Anticiper les ruptures, sécuriser les écosystèmes complexes, gagner en réactivité face aux crises… telles sont les promesses d’un TPRM réinventé. 

Vers une adoption à grande échelle de l’IA : les trois étapes clés

  1. Adopter une approche transversale
    • Nommer un “risk steward” pour faire le lien entre les métiers (achats, juridique, IT, conformité) et orchestrer les efforts TPRM à l’échelle de l’entreprise. 
  2. Investir dans la maturité IA
    • Nettoyer et structurer les données (data readiness), former les équipes, intégrer l’IA dans les outils métiers. 
  3. Préparer les bascules technologiques
    • Comme pour le cloud il y a 10 ans, l’IA franchira un point de bascule. Se préparer maintenant permet de ne pas subir, mais de capitaliser pleinement sur cette révolution. La transformation est en marche. À nous de la concrétiser.

Ce qu'il faut retenir

Dans un contexte de menaces croissantes et de complexité accrue, les approches traditionnelles de gestion des risques tiers montrent leurs limites. Cet article explore comment l’intelligence artificielle et la centralisation permettent aux entreprises de transformer cette fonction critique en un véritable levier stratégique. De la détection proactive des risques à l’automatisation des processus de due diligence, en passant par une meilleure coordination entre les métiers, cette nouvelle approche du TPRM ouvre la voie à une gestion plus agile, prédictive et résiliente face aux défis futurs.

Contributeur : Clément Vuattier, Directeur Risk Consulting, TPRM Leader pour la France

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