Personne travaillant sur un ordinateur portable avec des écouteurs dans un espace extérieur.

Travailleurs indépendants, freelances, slasheurs : un nouveau défi stratégique pour les DRH

Freelances, slasheurs, indépendants : ils redéfinissent la gestion des talents. Un nouveau défi stratégique pour les RH.


En résumé :

  • Le travail indépendant s’impose comme une composante structurante des organisations modernes, portée par les attentes des jeunes générations.
  • Cette évolution oblige les RH à adapter leurs pratiques pour intégrer, sécuriser et valoriser les talents hors du cadre salarié.
  • L’enjeu clé : passer d’une gestion du personnel à une stratégie globale de gestion des contributions, au sein d’un écosystème hybride.

Le travail indépendant prend une place croissante dans nos organisations. Il ne s’agit plus d’un phénomène marginal, mais d’une véritable transformation structurelle des modes de collaboration. La frontière entre salariés permanents et contributeurs externes s’estompe, redessinant les contours de la gestion des talents.

De quoi parle-t-on ? La Gig Economy et les nouvelles formes d’emploi

La « Gig Economy » désigne un modèle d’emploi fondé sur des missions ponctuelles, des collaborations temporaires, souvent facilitées par des plateformes numériques. Si l’image du livreur à vélo s’impose souvent, elle ne reflète qu’une partie de la réalité.

Aujourd’hui, ce modèle inclut une diversité de profils : développeurs, consultants, designers, chefs de projet, experts en cybersécurité ou en data science… La prestation intellectuelle est le segment à la croissance la plus rapide du travail indépendant en Europe, selon une étude Malt de 2024.

Quelques chiffres qui parlent d’eux-mêmes

  • En France, 11 % de la population active est indépendante.
  • À l’échelle mondiale, on estime entre 154 et 435 millions le nombre de freelances en ligne – soit jusqu’à 12 % de la main-d’œuvre mondiale.
  • Le marché des plateformes de freelances pourrait atteindre 14,17 milliards de dollars d’ici 2029, avec un taux de croissance annuel de près de 17 %.
  • Le phénomène touche particulièrement les secteurs des services intellectuels et des nouvelles technologies.

Pourquoi cette évolution ? Une mutation des attentes et du rapport au travail

Le succès des modèles alternatifs de travail s’explique en grande partie par les transformations des attentes, notamment des jeunes générations :

  • La Génération Z ne se projette pas spontanément dans une carrière linéaire. Elle cherche du sens, de la liberté, des expériences variées.
  • Les générations Y et Z aspirent à un travail "sur-mesure", fondé sur la confiance, la flexibilité et la reconnaissance individuelle.

Le rapport "Début de carrière : ce que veulent les futurs diplômés en 2025", réalisé par JobTeaser et l’Edhec NewGen Talent Centre, confirme cette recherche d’agilité et de sens.

Quels profils ? Une mosaïque de talents hors cadre traditionnel

Les nouvelles formes de travail regroupent une pluralité de statuts et de parcours :

  • Les micro-entrepreneurs, qui exercent à leur compte, dans des secteurs variés.
  • Les freelances experts, mobilisés pour des missions à haute valeur ajoutée.
  • Les "slasheurs", cumulant plusieurs activités, souvent à cheval entre salariat et indépendance. On en compte 4,5 millions en France.

Contrairement aux idées reçues, ces profils sont souvent hautement qualifiés. Ils interviennent sur des projets stratégiques, à fort enjeu d’innovation.

Ce que cela change pour les fonctions RH : de la gestion du personnel à l’orchestration des talents

L’essor de ces profils hybrides impose une transformation profonde des pratiques RH :

Des bénéfices indéniables…

  • Agilité accrue : capacité à ajuster les ressources en fonction des besoins projets.
  • Accès rapide à des expertises pointues, parfois rares sur le marché.
  • Réduction des coûts fixes : moins de charges sociales, de coûts d’infrastructure.
  • Recrutement accéléré : processus simplifié, engagement plus rapide.

… mais aussi de nouveaux défis à relever

  • Intégration organisationnelle : comment créer une dynamique d’équipe avec des talents externes ?
  • Fidélisation : difficile avec des indépendants. Comment bâtir une relation de confiance durable ?
  • Gestion des compétences : attention au risque de dépendance à des savoir-faire critiques hors de l’entreprise.
  • Cohésion et culture : comment embarquer des freelances dans une culture d’entreprise à laquelle ils n’appartiennent pas formellement ?

Panorama avantages / limites : une gestion stratégique du "contrat étendu"

Points de vigilance pour les fonctions RH

  1. Construire une politique d’intégration des freelances : onboarding, accès aux outils, participation aux rituels d’équipe.
  2. Piloter une marque employeur élargie : l’expérience freelance fait aussi partie de l’image de l’entreprise.
  3. Clarifier les aspects juridiques : droits, responsabilités, assurance, confidentialité.
  4. Éviter la fuite des savoirs-clés : cartographier les compétences critiques et sécuriser leur pérennité en interne.

Et demain ? Vers une fonction RH élargie aux talents externes

La tendance ne va pas ralentir. Nous allons vers des modèles hybrides, mêlant CDI, freelances, temps partiels, slasheurs, partenaires… L’entreprise devient un écosystème ouvert de talents, et les RH, les chefs d’orchestre de cette complexité.

Le défi ? Passer d’une logique de gestion du personnel à une stratégie de gestion des contributions.

Contributrices de cet article : Hélène Frieh, Marion Cognard, Camille Timmerman, Camille Creton

Ce qu'il faut retenir

Le travail indépendant bouleverse les modèles traditionnels d’organisation. De plus en plus présents, freelances et slasheurs imposent une réinvention du rôle RH. Agilité, expertise, flexibilité : les avantages sont réels, mais nécessitent une approche structurée pour intégrer ces talents, préserver la culture d’entreprise et sécuriser les compétences clés. Les RH doivent désormais orchestrer un écosystème hybride fondé sur la contribution, pas seulement sur le contrat.


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