5 min de temps de lecture 10 mai 2021
L’Afrique, un continent d’entrepreneurs

Christian Kamayou : L’Afrique, un continent d’entrepreneurs

Par EY Alumni

Building a better working world

Le réseau Alumni d’EY en France offre à ses près de 10 000 membres des occasions d’élargir leurs opportunités et expériences futures tout en nourrissant les liens qu’ils ont tissés avec EY.

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« EY m’a permis d’acquérir une bonne connaissance du secteur bancaire, ce qui représentait pour moi un véritable atout. »

Qu’avez-vous retenu de votre parcours chez EY ?

A la fin de mes études à HEC Paris, j’étais stagiaire à la Société Générale. De ma fenêtre, à la Défense, j’observais la tour EY au moment du dépôt de candidature. En intégrant EY en 1999, j’ai rejoint l’audit au sein du département Banques Assurances qui m’intéressait particulièrement. Je garde le souvenir de missions plus ou moins longues, qui pouvaient durer une semaine ou s’étendre jusqu’à un mois, souvent très intenses. Elles m’ont permis d’acquérir une connaissance des banques, ce qui représentait pour moi un véritable atout. Je garde également un souvenir mémorable du séminaire d’intégration à Bénodet. C’était mon premier job en sortie d’école et nous étions encore de jeunes diplômés avec un esprit très étudiant, complice, qui nous a permis de créer des liens forts. Ces liens d’amitié tissés en France et en Afrique Francophone sont des souvenirs indélébiles ! Après 2 ans d’audit chez EY, ma trajectoire a évolué vers un bref passage à la Direction de la stratégie de Sodexo, puis à la Direction du Marketing du Crédit Agricole en 2004, pour prendre en charge le suivi de la concurrence et la stratégie tarifaire de la banque. 

En 2010, vous vous êtes lancé dans l’aventure entrepreneuriale en créant financestesetudes.com. Comment en êtes-vous venu à cela ?

Je suis passé par plusieurs phases de transition. Comment suis-je donc passé de l’audit bancaire à l’entrepreneuriat ? Je dirais que le fil conducteur a été mon intérêt pour le secteur bancaire et ensuite pour les fintechs. En effet, lorsque j’auditais des banques, en particulier les multinationales bancaires, je m’étais déjà rendu compte que j’étais davantage intéressé par les PME bancaires et les petites structures du monde de la finance, car il était plus aisé d’avoir une vision globale de toute leur activité. J’ai donc commencé à m’intéresser à l’environnement des PME et aux TPE.

Lorsque j’ai rejoint le Crédit Agricole, une compétence clé de mon poste était d’avoir à la fois le sens des chiffres et des connaissances poussées en marketing et en techniques d’analyses de la concurrence bancaire. Quand j’ai quitté ce poste, j’ai donc tout naturellement décidé de créer une TPE dans le secteur de la finance, ou plutôt une fintech qui met en concurrence les banques : le premier courtier spécialiste des prêts bancaires pour étudiants. En effet, j’avais observé que, contrairement à ce qui se passait lors de l’achat d’un bien immobilier, les banques n’étaient pas mises en concurrence pour proposer aux jeunes des offres de financement de leurs études. J’ai ainsi intégré l’incubateur de HEC Paris où je me suis formé pour mieux appréhender mon nouvel univers : celui des start-up et du numérique.  Pour lancer mon activité, j’ai effectué une première levée de fonds d’1 million d’euros avec le soutien de Xavier Niel, Marc Simoncini et Jacques-Antoine Granjon. C’est ainsi que Financestesetudes.com est née en 2011 ; je l’ai pilotée jusqu’en 2018 où je l’ai cédée.

En 2017 vous créez MyAfricanStartup puis Akiba Business Partners en 2019. Pouvez-vous nous en dire quelques mots ?

Durant la fin de cette expérience entrepreneuriale significative, je voyageais beaucoup pour partager à l’étranger les réalités de l’entrepreneuriat en France et témoigner dessus. J’ai pris un tournant majeur lors de l’Africa CEO forum de Genève, un évènement emblématique qui réunit régulièrement les 800 plus grands patrons et financiers qui exercent une activité sur le continent africain. Leur parler de création de start-up et témoigner de mon expérience de Camerounais entrepreneur en Europe a aussi été l’opportunité de leur faire passer ce message fort : le développement économique en Afrique ne passe pas uniquement par des grandes entreprises multinationales ou de grands projets financés à coup de dizaines ou centaines de millions de dollars… mais aussi, et en priorité par l’innovation et la création d’entreprise, autrement dit cet écosystème de TPE et start-up appelé à grandir pour soutenir la croissance économique de l’Afrique de demain. Le constat était évident. Certes je suis camerounais, j’ai créé une start-up en France, j’ai réussi à séduire des patrons d’entreprise fortunés qui ont investi dans ma fintech. En aurait-il été de même si j’avais voulu créer cette entreprise en Afrique ? Je mettais ainsi en évidence un problème que rencontre l’entrepreneuriat en Afrique : l’insuffisance des capitaux pour les start-up en phase d’amorçage. En effet, pour une start-up africaine, trouver des investisseurs pour moins de 1 million d’euros, voire 500 000 euros, est très compliqué. Or je considérais que ces 800 chefs d’entreprise africains pouvaient jouer le rôle de business angel et investir pour faire décoller de jeunes pousses.

Je leur ai présenté une action concrète à mettre en œuvre, inspirée de mon expérience préalable. Chaque année le magazine Challenges publie le palmarès intitulé « 100 start-up françaises où investir ». En 2011, j’ai eu la chance de faire partie des lauréats. Cela avait apporté de la visibilité à mon initiative, et conduit les business angels à me contacter. J’ai donc proposé aux patrons africains de piloter la création d’un index similaire qui identifierait 100 start-up africaines innovantes. L’objectif étant de leur donner un coup de projecteur pour attirer l’attention des médias et des investisseurs. Cette initiative a vu le jour sous le nom du Palmarès annuel MyAfricanStartup 100 avec le soutien de partenaires tels que la Banque Africaine de Développement, HEC Paris et un jury indépendant pour sélectionner les entreprises africaines.

Pourquoi avoir créé Akiba Business Partners, un cabinet de conseil basé en France, pour accompagner des start-up et des PME en Afrique ?

On ne cesse de dire que l’Afrique est le continent de l’avenir. Mais c’est aussi un continent dans lequel il y a tout un ensemble de problèmes à résoudre et certains, sinon tous, peuvent l’être via l’entrepreneuriat. Cependant, lorsque je me déplace dans les pays africains, j’ai souvent entendu cette objection : « Mon cher Christian, tu as certes créé une start-up en France mais je ne suis pas sûr que tu aurais réussi à en créer une ici en Afrique. » En effet, même si les opportunités sont nombreuses, l’environnement est beaucoup plus complexe qu’en France.

Grâce au lancement du palmarès de start-up africaines, j’ai pu aller sur le terrain et mieux connaître l’écosystème local et les tendances, ce qui m’a conduit à créer une activité de conseil auprès des PME africaines sur des sujets liés à l’innovation et sur les levées de fonds auprès des investisseurs. Nous avons dans notre ADN le fait d’être des anciens entrepreneurs au service d’entrepreneurs en activité.  Akiba signifie « merci » en langue du Cameroun, mais aussi « faire des économies » en swahili, la langue la plus parlée d’Afrique. Notre plus grande satisfaction est d’aider nos clients à croître et innover à moindre coût.

Je n’oublie pas que je suis avant tout entrepreneur, camerounais, et j’aimerais vraiment entreprendre en Afrique maintenant, mais il faut d’abord que je trouve l’inspiration avant de me lancer. J’ai quelques idées que j’explore...

Comment identifiez-vous les bons profils de business angels ?

C’est une question assez compliquée. En Europe ou aux États-Unis, c’est simple, un business angel investit et le fait savoir. Mais dans certains pays africains, il y a une certaine forme d’opacité dans ces décisions d’investissement. Il m’est arrivé de rencontrer des personnes qui étaient fortunées mais communiquaient peu ou pas sur leurs investissements. Cela ne crée pas un cercle vertueux.

D’autre part pour la communauté des entrepreneurs, les business angels peuvent sembler très peu accessibles, ou les personnes possédant un patrimoine financier peuvent donner l’impression de ne pas s’intéresser à ce type de transaction. Start-up et potentiels investisseurs : Il s’agit vraiment de deux univers totalement différents, étanches l’un à l’autre.

Le deuxième élément important est le manque de success stories entrepreneuriales pour créer de l’émulation parmi ceux qui ont un patrimoine financier significatif. Dans les pays d’Afrique, ceux qui ont bâti une fortune significative l’ont souvent bâtie dans un secteur très traditionnel. Or, lorsque l’on parle de start-up, on parle souvent de technologie pour appréhender et résoudre certains problèmes ou apporter des solutions aux clients. Je fais l’hypothèse que c’est cette dimension et ce mindset tech et numérique qui manquent à certains investisseurs potentiels africains pour analyser les start-up, dont le potentiel est fondé sur une forme de spéculation sur les revenus futurs.

Pour que l’entrepreneuriat africain tech ou à forte croissance puisse se développer, il faut donc créer une communauté de business angels, qui vont non seulement apporter de l’argent mais également un accompagnement.

Quel conseil donneriez-vous à un entrepreneur qui souhaite se lancer en Afrique ?

Bien s’entourer. Selon moi l’équipe est l’élément le plus fondamental : c’est elle qui exécute, l’idée ne vaudra rien sans elle. L’exécution est la tâche la plus importante. Les Africains ont, à tort ou à raison, souvent peur du « vol de l’idée de création d’entreprise ». Or, le fait d’en parler autour de soi pendant la construction permet de recueillir des objections constructives. Ne pas en parler, c’est aussi prendre le risque de s’enfermer dans une vision qui n’est pas la bonne. L’équipe peut aussi avoir des travers, il faut constituer une bonne équipe.

Les principaux défis et problèmes pour créer sa start-up en Afrique sont le manque d’accompagnement, de formation, de réseaux de business angels et d’incubateurs où l’on reçoit des conseils, comme par exemple celui de signer un pacte d’actionnaires pour éviter tout désagrément en cas de désaccord par la suite. En termes de création, tous les pays sont dynamiques et l’Afrique est un continent d’entrepreneurs ! On observe une vitalité incroyable dans des secteurs clés tels que la santé, l’éducation, la logistique, les services financiers, l’agriculture et bien d’autres. Bref, les opportunités sont immenses.

Vous êtes également impliqué dans le réseau Alumni HEC ?

Diplômé de HEC Paris, je sais à quel point un réseau Alumni est important et peut être bénéfique pour celui qui sait donner de son temps aux autres et recevoir en retour. Je suis donc impliqué dans la vie de l’association HEC Alumni. Je contribue à faire mieux connaître l’Afrique dans cette communauté au sein du Club Développement International. Concernant EY, à l’instar d’HEC, j’ai aussi gardé plusieurs amis. Le parcours de l’un d’entre eux, a marqué mon esprit : il était initialement en audit avec moi et il est maintenant avocat. Comme quoi l’audit chez EY peut mener à tout !

Ce qu'il faut retenir

Diplômé de HEC Paris et attaché à ses origines et à l’Afrique, Christian Kamayou nous explique son cheminement professionnel, de l’audit bancaire à l’entrepreneuriat. Il revient sur l’initiative qu’il a lancée en 2017, MyAfricanStartUp, un palmarès annuel des 100 start-up africaines innovantes avec pour objectif de leur donner un coup de projecteur pour attirer l’attention des médias et des investisseurs. Christian est convaincu que le développement économique en Afrique ne passe pas uniquement par des grandes entreprises multinationales ou de grands projets financés … mais aussi, et en priorité, par l’innovation et la création d’entreprise, pour soutenir la croissance économique de l’Afrique de demain.

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