La consommation de produits livrés à domicile semble s’ancrer chaque jour un peu plus dans les habitudes. En France, 56 % des consommateurs déclarent se rendre moins souvent dans les magasins pour privilégier des achats drive ou la livraison à domicile. En effet, 41 % des consommateurs se sentent encore mal à l’aise avec l’idée d’aller au restaurant, 45 % prévoient de maintenir un certain niveau de stock de produits de première nécessité (produits alimentaires, papier toilette, produits nettoyants) au sein de leur foyer.
Le baromètre suggère que l’intérêt pour des produits premium va aller en diminuant. À mesure que de plus en plus de consommateurs se concentreront sur le prix, ils seront moins disposés à payer un prix plus élevé, même pour des spécificités tel que l’origine éthique ou durable de ce dernier.
Comment les entreprises doivent-elles réagir ?
De nombreuses entreprises du secteur ont sous-évalué la nécessité d’investir dans la promotion de la marque et dans l’innovation au cours de la dernière décennie. Au cours de cette même période, les distributeurs ont considérablement augmenté la qualité de leurs produits et ont monté en gamme. Dans ce contexte, la tendance d’achat à la hausse des produits MDD associée à la fragilité économique actuelle pourrait conduire à un tournant important. S’agit-il d’une bascule du marché à laquelle les grandes marques devront répondre de manière défensive, ou d’une opportunité dont ils peuvent faire un avantage à long terme ?
Les consommateurs qui indiquent vouloir acheter des marques distributeur ne passeront peut-être pas à l’acte et seule une minorité de consommateurs limiteront leurs achats aux produits de marques distributeurs. Mais nous pensons qu’il est important que les grandes marques investissent dans le bon portefeuille de produits, les bons packagings, canaux de ventes, prix, ciblages et stratégies marketing. Voici cinq actions à mener pour s’adapter à l’évolution de la demande :
1. Suivre l’évolution des décisions des consommateurs et évaluer la performance des produits par rapport aux concurrents traditionnels et aux marques distributeur.
D’après notre expérience, de nombreuses marques sous-estiment l’élasticité des prix et surestiment la façon dont le consommateur perçoit favorablement leurs produits par rapport aux alternatives MDD. Pour comprendre quelles marques sont les plus vulnérables au développement de ces nouveaux concurrents, il est essentiel d’identifier et de consolider les données entre les catégories et les marchés et de les rendre accessibles et visibles aux différents métiers de l’entreprise.
2. Investir dans des éléments de différentiation concurrentielle et réévaluer vos prix afin d’optimiser le mix produit et la marge.
L’innovation est souvent insuffisante parce que les silos fonctionnels ne travaillent pas ensemble efficacement. Les ventes et le marketing doivent travailler en étroite collaboration avec la chaîne d’approvisionnement pour adapter les propositions de valeur, développer des innovations dans les produits et les emballages, et mettre en place des stratégies de commercialisation et de prix qui donneront envie aux consommateurs de choisir la marque au détriment des autres.
3. Revoir les prévisions de demande dans l’ensemble du portefeuille et développer l’agilité de la chaîne d’approvisionnement pour répondre dynamiquement à différents scénarios.
Les données enregistrées avant la pandémie sont insuffisantes. Quels changements seront permanents et quels changements temporaires ? En planifiant différents scénarios, en suivant l’état actuel des ventes et en répondant rapidement, les entreprises peuvent s’assurer que les bons produits soient accessibles aux bons acheteurs/consommateurs. Cela maximisera le volume et les revenus et minimisera le risque que les consommateurs se tournent vers des solutions de substitution.
4. Réorganiser les ressources et les investissements au profit des distributeurs et canaux de ventes prioritaires pour obtenir des résultats mutuellement bénéfiques.
Le paysage de la distribution a changé et va continuer d’accomplir sa mutation. Les entreprises doivent reconfigurer leurs stratégies d’accès au marché et comprendre comment elles affectent leurs coûts. Investir de façon appropriée permettra d’accroître l’efficacité de la chaîne d’approvisionnement et des stocks et d’atténuer l’urgence pour les détaillants d’accélérer le développement d’alternatives aux MDD.
5. Repenser l’engagement des consommateurs afin de maximiser la perception de la marque sur les nouveaux canaux d’achat.
Les entreprises doivent identifier laquelle de leurs marques peut réussir à se différencier au-delà du prix, et quand et comment influencer le client. C’est un défi, car les consommateurs mélangent de plus en plus les canaux numériques et physiques ; les leviers de commercialisation sont similaires, mais la façon dont ils travaillent ensemble est différente et nécessite un nouvel ensemble d’approches marketing. Rendre la planification promotionnelle plus ciblée et axée sur les connaissances limitera les fuites de revenus et stimulera le retour sur investissement.
Pour faire face aux conséquences de la pandémie, il faut beaucoup de ressources et une parfaite attention au marché. C’est pourquoi les entreprises de biens de consommation doivent réexaminer chaque partie de leur chaîne de valeur. Ils se sont déjà engagés pour la plupart dans la transformation des canaux de ventes (du physique vers le digital) ; certains grands acteurs ayant fait état d’une hausse de 50 % ou plus de leurs ventes en lignes au premier semestre. Ils réagissent également à l’essor de la consommation à domicile et à l’augmentation des dépenses liées à la santé personnelle et à l’hygiène des ménages.
Le changement de préférence des consommateurs en faveur des marques distributeur est une autre perturbation que les leaders des produits de consommation doivent garder dans leur radar. Au travers du baromètre, nous avons identifié une déclaration d’intention claire — 60 % des consommateurs disent qu’ils porteront une plus grande attention à l’optimisation de leurs ressources à l’avenir, et 32 % disent qu’ils prévoient d’acheter davantage de produits de première nécessité chez les MDD. Mais vont-ils passer à l’acte ?
Le prix est de plus en plus important pour le consommateur, mais comme l’ont démontré nos segments post Covid-19, ce n’est pas la seule chose qui compte. Les marques peuvent limiter la bascule vers des marques de distributeur en fournissant des produits de qualité supérieure qui répondent aux valeurs et aux priorités changeantes des consommateurs. En effet, 39 % des consommateurs prévoient d’acheter davantage auprès d’organisations qui profitent à la société, même si leurs produits/services sont plus chers. La réévaluation des priorités des consommateurs, conduite par la pandémie, va desservir les marques « complaisantes », mais elle favorise déjà celles qui offrent plus qu’un prix.