
Partie 1
Avant la pandémie de la COVID-19, les Industries Culturelles et Créatives rythmaient la croissance et l’internationalisation de l’économie européenne
Une période de croissance solide et continue et d’intense innovation
Fin 2019, les ICC comptaient parmi les poids lourds de l’économie de l’Union Européenne
Avec des revenus estimés à 643 milliards d’euros et une valeur ajoutée générée de 253 milliards d’euros en 2019, les industries culturelles et créatives (ICC) représentaient 4,4 % du PIB de l'UE en termes de chiffre d'affaires, soit une contribution économique supérieure à celle des télécommunications, de la haute technologie, de l’industrie pharmaceutique ou de l’industrie automobile.
Revenus estimés
643milliards d’euros avant la crise du COVID-19 (4,4% du PIB de l’UE en CA)
Entre 2013 et 2019, le chiffre d’affaires total des ICC avait augmenté de 93 milliards d'euros, soit une croissance de près de 17% sur la période.
Fin 2019, plus de 7,6 millions de personnes en Europe travaillaient dans l’économie culturelle et créative, et le secteur avait créé plus de 700 000 emplois en 7 ans (+10%), parmi lesquels des auteurs, des interprètes et d’autres professionnels de la création.
Sur la période, les 10 secteurs des ICC ont quasiment tous connu une croissance solide et continue, mais à des vitesses différentes : plus de 4% par an pour les jeux vidéo, la publicité, l'architecture et la musique, entre 0,5% et 3% pour l'audiovisuel (AV), la radio, les arts visuels, les arts du spectacle et les livres. Seule la presse a vu son activité reculer fortement (-1,7%) en raison notamment d’une transition difficile vers le numérique.
Les six dernières années ont été le théâtre d’une intense dynamique d’innovation : diversification des modes de distribution, transformation des expériences culturelles, déploiement d’offres digitales, développement de nouveaux contenus… Cette innovation a été portée par une intensification de la consommation en ligne : en 2018, 81% des utilisateurs d'internet dans l'UE l’ont utilisé pour écouter de la musique, regarder des vidéos ou jouer en ligne – soit plus que pour le e-commerce ou les réseaux sociaux.
L’international et l’entrepreneuriat sont entrés dans l’ADN des secteurs culturels européens
Si les plus grands pays de l’UE-28 (France, Allemagne, Italie, Espagne et Royaume-Uni) restent le centre de gravité de l’économie culturelle européenne avec 69% des revenus, les pays d’Europe centrale et orientale affichent les taux de croissance les plus dynamiques.
L’économie culturelle est un puissant levier d’exportation et de rayonnement pour l’Union Européenne, les exportations de biens culturels représentant plus de 28,1 milliards d’euros en 2017, soit 1,5% des exports de l’UE. La balance commerciale européenne est excédentaire sur les biens culturels, de l’ordre de 8,6 Mds €, dans le même ordre de grandeur que le secteur de l’alimentation, boissons et tabac (9,1 milliards d'euros en 2018).
Un puissant levier d’exportation
28,1milliards d’euros d’exportation de biens culturels en 2017
L’économie culturelle repose sur un tissu dense et riche de structures entrepreneuriales : plus de 90 % des entreprises des ICC sont des petites ou moyennes entreprises et les freelance constituent 33 % de la main-d'œuvre – soit deux fois plus que dans toute l'économie européenne (14%).
Chocs et contre-chocs de la transformation digitale
Historiquement, les entreprises des ICC ont été pionnières dans l’adoption des technologies numériques innovantes, de la photo numérique au streaming, en passant par la réalité virtuelle et les supports numériques comme les DVD et les Blu-Ray. De même, Internet n’aurait pu devenir ce qu’il est aujourd’hui sans les contenus culturels, qui ont grandement contribué à la croissance et à la généralisation du réseau. Aujourd’hui, les services culturels représentent toujours une part importante de la consommation de la bande passante européenne.
Depuis 2013, les entreprises et organisations des ICC ont largement investi dans les technologies digitales sur toute la chaîne de valeur, de la création à la diffusion. Au cours des six dernières années, le chiffre d'affaires généré par les contenus, services et œuvres culturels en ligne a cru d’environ 11,5% par an.
Excédent commercial
8,6milliards d’euros d’excédent commercial en 2019
La transformation digitale provoque néanmoins des chocs considérables, et une asymétrie des rapports de force avec les plateformes mondiales qui peut compromettre la viabilité financière, l'emploi, l'innovation et les investissements futurs dans le secteur.
La digitalisation toujours plus rapide des modes de consommation soulève de nombreux défis pour les acteurs culturels, allant de la rémunération des ayants droit au bon fonctionnement des marchés, en passant par la lutte contre le piratage d’œuvres protégées.
8,4x – dans l’UE, les ICC comptent 8,4 fois plus d’emplois que le secteur des télécommunications.
81% – des internautes de l’UE écoutent de la musique, jouent ou regardent des vidéos en ligne.
8,6 milliards d’€ – excédent commercial des biens culturels de l’UE en 2019.

Partie 2
La crise de la COVID-19 a conduit les Industries Culturelles et Créatives au bord de l’asphyxie économique
Un secteur économique parmi les plus affectés d’Europe
En 2020, l’économie culturelle et créative européenne a perdu environ 31% de son chiffre d’affaires
Le chiffre d’affaires total des ICC en 2020 s’est effondré de près de 199 milliards d’euros par rapport à 2019, pour atteindre 444 milliards d’euros selon nos estimations.
Avec une chute de 31% de son chiffre d’affaires, l’économie culturelle et créative fait partie des secteurs les plus affectés par la crise en Europe. Si le transport aérien est le secteur le plus en souffrance, les ICC ont connu des pertes de chiffre d’affaires supérieures à celles subies par d’autres secteurs phares de l’économie européenne que sont le tourisme et l’automobile (respectivement -27% et -25%).
Un secteur affecté par la crise
31%de baisse de chiffre d’affaires
Les ondes de choc de la crise du COVID-19 se font ressentir dans l’ensemble des secteurs culturels et créatifs : le spectacle vivant (-90% entre 2019 et 2020) et la musique (-76%) sont les plus touchés ; les arts graphiques, l’architecture, la publicité, les livres, la presse et l’audiovisuel font face à des baisses de -20% à -40% de chiffre d’affaires par rapport à 2019. Seule l’industrie des jeux vidéo semble tenir bon avec une croissance d’environ 9% de son chiffre d’affaires.
Tous les secteurs sont touchés, y compris ceux qui ont pu atteindre leurs publics via des solutions digitales ou le e-commerce. L’expérience occupe toujours une place fondamentale dans le modèle économique de toute l’économie créative, qui aujourd’hui voit ses capacités à produire et à développer de nouveaux contenus fortement menacés.
Les ICC ont été le plus sévèrement touchées par la crise en Europe centrale et orientale (de -36% pour les ICC en Lituanie à -44% en Bulgarie et en Estonie).
La crise de la COVID-19 aura un impact massif et durable sur l’ensemble de la chaîne de valeur des ICC
Les restrictions sanitaires ont atteint les secteurs culturels dans toutes leurs dimensions : fermeture des lieux culturels et de spectacle, restrictions sur les ventes physiques, augmentation des coûts, augmentation des délais, réduction de la capacité à investir. Nous estimons que cela ira bien au-delà de l’année 2020, au regard des mécanismes d’investissements et de rémunération des acteurs de la filière.
Ainsi, les auteurs et interprètes vont subir en 2021 et 2022 l’impact financier de la chute des droits collectés (-35%) par les organismes de gestion collective.
Par ailleurs, les dépenses des consommateurs dans les contenus, services et œuvres en ligne ne compensent pas la perte de revenus liée à la baisse des ventes physiques (pour les livres, la presse, les CDs…) et les évènements physiques dans la plupart des secteurs. Dans le secteur de la musique, les ventes physiques (CDs, vinyles) vont chuter de 35%, tandis que les revenus de l’exploitation numérique des œuvres devraient croître de 8% seulement. Les mêmes tendances s’observent dans le secteur de l’audiovisuel, et plus particulièrement le cinéma, avec une baisse de 75% des revenus des salles de cinéma en Europe en 2020.
En l’absence d’une réelle reprise des activités de production, de distribution et de promotion physiques en 2021, la capacité des ICC à maintenir les investissements dans de nouveaux projets de création et d’innovation sera sérieusement menacée.
Au cours de l’enquête récente « EY Future Consumer Index », 46% des répondants déclarent ne pas se sentir à l’aise avec l’idée d’aller à un concert avant plusieurs mois, et 21% d’entre eux avant plusieurs années au moins.

Partie 3
Après la COVID-19 : la culture pour reconstruire l’Europe
Trois défis pour sauver, redémarrer et relancer l’industrie
Trois défis ont été identifiés par la communauté d’experts et de professionnels de la culture en Europe pour sauver, redémarrer et relancer les industries culturelles et créatives européennes :
1. Financer le retour à la croissance et irriguer l’ensemble des maillons des ICC
Apporter un soutien financier public massif et soutenir l’investissement privé aux entreprises, organisations, entrepreneurs et créateurs des ICC – deux leviers indispensables pour encourager le redémarrage des activités culturelles.
2. Recréer la confiance par un cadre économique et législatif inclusif
Promouvoir la diversité de l’offre culturelle européenne au travers d’un cadre légal solide, pour encourager le développement de l’investissement privé dans la production et la distribution – en créant les conditions nécessaires de rentabilité pour les entreprises, et de juste rémunération pour les créateurs.
3. Mobiliser les imaginaires et les forces créatrices de la culture pour répondre aux défis de demain
Mobiliser les ICC – et la puissance de ses millions de talents, individuels et collectifs – comme un accélérateur des transitions économiques, sociales et environnementales en Europe.
Ce qu'il faut retenir
Fin 2019, les ICC comptaient parmi les poids lourds de l’économie de l’Union Européenne. Les six dernières années ont été le théâtre d’une intense dynamique d’innovation. Cette innovation a été portée par une intensification de la consommation en ligne.
En 2020, l’économie culturelle et créative européenne a perdu environ 31% de son chiffre d’affaires. La crise COVID-19 aura un impact massif et durable sur l’ensemble de la chaîne de valeur des ICC. En l’absence d’une réelle reprise des activités de production, de distribution et de promotion physiques en 2021, la capacité des ICC à maintenir les investissements dans de nouveaux projets de création et d’innovation sera sérieusement menacée.