9 min de temps de lecture 19 déc. 2022
ciel de foudre

Les 10 principaux risques dans le secteur des télécoms en 2023

Auteurs
Cédric Foray

Associé, EY-Parthenon, Europe West TMT (Technologies, Médias et Télécommunications) Leader, France

Consultant en stratégie depuis plus de 25 ans auprès de grands groupes et de sociétés de taille moyenne principalement dans le secteur des télécommunications, des nouvelles technologies et de la santé

Etienne Costes

Partner Leader SaT France, Europe West

Responsable de l’activité Strategy & Transactions et TMT Leader pour la zone Europe West.

9 min de temps de lecture 19 déc. 2022
Expertises associées TMT Télécommunications Technologie

Alors que l’industrie des télécoms fait maintenant face à une très forte inflation, nous proposons une analyse du top 10 des risques identifiés par les opérateurs.

En résumé :

  • L’inflation arrive à la première place du classement des 10 principaux risques liés aux télécommunications.
  • Les entreprises de télécommunications doivent mettre l'accent sur la sécurité et la confiance : 39 % des responsables des systèmes d'information dans le secteur des télécoms estiment que la sécurité n'est pas suffisamment prise en compte dans les investissements stratégiques.
  • Les mesures visant à améliorer la culture d’entreprise et à mieux gérer le programme de développement durable figurent parmi les impératifs les plus urgents du secteur.

A l'aube de 2023, les opérateurs de télécommunications du monde entier peuvent être encouragés par la résilience collective dont ils ont fait preuve dans le contexte des récentes turbulences géopolitiques et économiques. Au cours des deux dernières années, une combinaison d'augmentations de prix, de fusions et d'acquisitions et d'interventions gouvernementales a permis aux cours des actions du secteur mondial des télécommunications de se redresser après avoir touché le fond pendant la pandémie, même si le rebond reste progressif et inégal.

Aujourd'hui, les entreprises de télécommunications revoient leurs stratégies pour faire face à un environnement opérationnel volatile. Ils élargissent la portée et l'ambition de leurs initiatives de transformation numérique. Elles se recentrent sur le développement durable, notamment en cherchant à améliorer la diversité et l'intégration de la main-d'œuvre et à attirer de nouveaux talents.

Les opérateurs de télécom sont-ils suffisamment conscients des risques actuels et émergents auxquels ils sont confrontés pour atteindre ces objectifs ?
Dans un contexte d'inflation élevée, les entreprises de télécommunications doivent également faire face à une série de défis dont l'évolution des attentes en matière de sécurité et les changements de perception de la culture d’entreprise.

Nous avons identifié les 10 principaux risques dans le secteur des télécoms.

1. Prise en compte insuffisante de la pression sur le pouvoir d’achat

La crise de l’inflation pousse les ménages à réévaluer les services de leurs fournisseurs de télécommunications. L'étude EY Global Decoding the Digital Home montre que 45 % des ménages pensent qu'ils paient trop cher pour les services de contenu, et 44 % pensent que leur fournisseur de haut débit ne les conseille pas bien pour les orienter vers la meilleure offre. Certains régulateurs exigent que les opérateurs de télécom fassent davantage pour proposer des "tarifs sociaux" afin d'améliorer l'accessibilité au numérique.

2. Sous-estimation des impératifs de sécurité et de confiance

Les opérateurs de télécoms ont du mal à faire face aux cybermenaces croissantes : 46 % des consommateurs pensent qu'il est impossible de sécuriser leurs données personnelles lorsqu'ils utilisent internet.¹ Notons également que 39 % des responsables de la sécurité des systèmes d’information (RSSI) des opérateurs télécoms estiment que les aspects liés à la sécurité ne sont pas suffisamment pris en compte dans les investissements stratégiques de leurs entreprises.² En revanche, plus de la moitié des RSSI pensent que la pandémie a permis aux professionnels de la cybersécurité d'améliorer leur positionnement au sein de leur organisation. Mais la fonction de sécurité est souvent confrontée à des niveaux de confiance relativement faibles de la part d'autres parties de l'entreprise, telles que les équipes de développement de produits.

3. Incapacité à améliorer la culture d’entreprise et les méthodes de travail

Les opinions des employeurs et des employés sur la culture d’entreprise sont divergentes : la rotation du personnel rend les employeurs plus pessimistes quant à l'impact de la pandémie sur la culture d'entreprise, mais les employés se sentent responsabilisés par le travail à distance et estiment que la culture s'est améliorée depuis le début de la crise sanitaire.³ Selon le rapport intitulé "How workforce rebalancing is building pressure in the talent pipeline", 91 % des employés du secteur des technologies, des médias et du divertissement et des télécommunications (TMT) souhaitent travailler à distance au moins deux jours par semaine, et 25 % des employeurs du secteur TMT pensent que tout le monde devrait revenir cinq jours par semaine. Les entreprises de télécoms doivent écouter et répondre à leurs employés au risque sinon de perdre des talents clés.

4. Trop faible communication autour de l’agenda lié au développement durable

Selon le baromètre EY  sur les risques climatiques au niveau global, la qualité des informations communiquées par les opérateurs de télécommunications sur le changement climatique se détériore d'une année à l'autre, la communication des paramètres environnementaux, sociaux et de bonne gouvernance (ESG), tels que la consommation d'énergie renouvelable et la gestion des déchets électroniques, fait souvent défaut. En effet, 39 % des entreprises de télécommunications ne divulguent pas de stratégie nette zéro, de plan de transition ou encore de programme de décarbonisation. Notons également que les besoins des clients évoluent rapidement : 47 % des grandes entreprises ne pensent pas que les cas d'utilisation de la 5G et de l’IoT pensés par les fournisseurs de télécoms répondent de manière adéquate à leurs besoins en matière de développement durable.⁴ Les opérateurs doivent revoir leurs priorités pour s'adapter aux nouvelles attentes des parties prenantes.

5. Incapacité à tirer parti de la transformation numérique

Les pressions qui découlent de l’inflation font qu'il est encore plus vital pour les opérateurs télécoms d'accroître leur efficacité et leur agilité. Pourtant, l'étude EY Tech Horizon révèle que leur capacité à se transformer grâce aux nouvelles technologies reste très complexe. Le facteur « humain » limite les progrès. En effet, les opérateurs citent « l'impact négatif du télétravail sur la collaboration » comme étant le principal défi culturel auquel ils sont confrontés dans leur programme de transformation.

6. Difficultés à maintenir la résilience des infrastructures

La fiabilité du réseau reste un point sensible pour les clients. L'étude « EY Global Decoding the Digital Home » montre que 28 % des ménages sont souvent confrontés à une connexion à haut débit peu fiable. Le défi pour les opérateurs s’est amplifié par l'augmentation incessante de l'utilisation des données. La pression exercée sur les infrastructures s'accompagne d'une inquiétude quant à la fracture numérique. La pandémie ayant accentué la polarisation entre les nantis et les démunis du numérique. Même dans les zones où internet est disponible, les ménages ont du mal à s'offrir des forfaits de télécoms.

7. Incapacité à développer des nouvelles activités

La combinaison d’une part, de la saturation des marchés grand public, et d’autre part, du développement contraint du revenu moyen par utilisateur (ARPU), mène de nombreux opérateurs à donner la priorité aux opportunités de croissance B2B. Toutefois, la croissance tarde à se constater, en partie parce que la proportion des revenus provenant d'offres plus onéreuses, comme l'IdO et le cloud, reste relativement faible. Il y a également un manque d'alignement entre les nouvelles offres des télécoms et ce que les clients recherchent réellement, en particulier dans les domaines de nouveaux services.

8. Valorisation limitée de leurs infrastructures

La volonté des opérateurs de télécommunications de dégager de la valeur des infrastructures s'accélère. Ils ont recours à des cessions, des scissions et des coentreprises pour reconfigurer les modèles de propriété des infrastructures. Les actionnaires activistes représentent un autre catalyseur. 63 % des sociétés de télécoms déclarent que la pression des activistes les ont incités à réviser leur stratégie.⁵ Il existe également des défis internes. La plupart des PDG des sociétés de télécommunications estiment qu'une distinction plus claire entre les infrastructures essentielles et non-essentielles aurait pu faciliter leurs plans de cession, et beaucoup d’entre eux pensent qu'ils ont raté des occasions de repenser leurs activités principales lors de cessions.

9. Engagement inefficace avec les écosystèmes externes

Plusieurs pays ont imposé des restrictions aux fournisseurs à haut risque, et les progrès technologiques ont favorisé l'arrivée de nouveaux fournisseurs de réseaux centrés sur les logiciels. Nous observons également une demande croissante pour des réseaux privés de 5G. Les entreprises recherchent activement des fournisseurs de télécoms ayant des relations pertinentes avec les écosystèmes.⁶ Toutes ces évolutions obligent les opérateurs de télécoms à intensifier leurs collaborations externes. Pourtant, l'engagement dans l'écosystème n'est toujours pas au cœur de leurs stratégies, seuls 11 % d'entre eux considèrent les partenariats multiples comme essentiels aux nouveaux modèles économiques.⁷

10. Problème d’adaptation à l'évolution du paysage réglementaire

Les priorités réglementaires évoluent. La fragmentation des approches réglementaires pose des défis particuliers. De nombreux pays promulguent ou modifient les règles de protection des données et de la vie privée. Notons que l'accent réglementaire croissant sur l'IA peut ajouter un risque supplémentaire. Toutefois, les politiques numériques peuvent également créer des opportunités, par exemple par le biais d'un soutien gouvernemental à la modernisation des infrastructures.

Comment atténuer ces risques ?

Alors que l'univers des risques du secteur des télécoms continue d'évoluer dans un monde en mutation rapide, les opérateurs doivent continuer à scruter l'horizon pour détecter les menaces émergentes et développer de nouvelles stratégies pour y faire face. Pour y parvenir, il est essentiel de comprendre les liens entre certains risques qui, au départ, peuvent sembler très distincts.

Ce qu'il faut retenir

À l'aube de l'année 2023, les opérateurs de télécom peuvent se réjouir de la solidité de leurs performances dans un contexte de volatilité récente. Ils doivent maintenant s'efforcer de trouver une voie à travers l'incertitude persistante, tout en augmentant le rythme de leurs efforts de digitalisation et en redoublant d'efforts en matière de développement durable.

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Cédric Foray

Associé, EY-Parthenon, Europe West TMT (Technologies, Médias et Télécommunications) Leader, France

Consultant en stratégie depuis plus de 25 ans auprès de grands groupes et de sociétés de taille moyenne principalement dans le secteur des télécommunications, des nouvelles technologies et de la santé

Etienne Costes

Partner Leader SaT France, Europe West

Responsable de l’activité Strategy & Transactions et TMT Leader pour la zone Europe West.