6 minutes de lecture 24 mai 2021

            Femmes debout près de panneaux solaires

Pourquoi de plus en plus de voix s’élèvent‑elles pour réclamer des normes mondiales sur la durabilité?

Par Marie-Laure Delarue

Vice‑présidente mondiale, Certification

Agente du changement. Passionnée par les gens de talent. Instigatrice d’innovation. Bilingue. Aime les dégustations de vins.

6 minutes de lecture 24 mai 2021

Le moment est venu d’établir des normes mondiales uniformes en matière de présentation de l’information non financière.

En bref
  • Actuellement, il n’existe aucun consensus quant à la nature des données à fournir par les entreprises en matière de durabilité et d’information non financière et sur la méthode à utiliser pour les recueillir. 
  • Afin de jouer un rôle efficace dans la lutte contre les changements climatiques, les entreprises doivent être en mesure de présenter l’information au moyen de normes sur la durabilité acceptées à l’échelle mondiale.
  • Les cadres, méthodes et paramètres actuels doivent être consolidés pour accélérer les progrès menant vers un avenir plus durable.

Comment une organisation arrive‑t‑elle à évaluer sa performance sur le plan de la réduction des émissions de carbone ou de l’écart salarial entre les sexes si elle ne fixe pas d’objectifs dans ces domaines et qu’elle ne mesure pas ses progrès de manière à pouvoir les comparer avec ceux de ses pairs?

On ne peut gérer ce qu’on ne mesure pas, et ce qu’on mesure ne peut inspirer confiance si on ne se conforme pas à des normes communes qui répondent aux exigences des parties prenantes. Cette constatation s’observe particulièrement dans les organisations qui tentent d’évaluer les aspects non financiers de leur rendement.

Il est plus urgent que jamais d’obtenir des données exactes, comparatives et solides afin que l’information non financière soit complète et de qualité du fait que les organisations se tournent de plus en plus vers un modèle d’affaires axé sur leur durabilité. Celles qui s’engagent résolument sur cette voie savent qu’il s’agit de la bonne chose à faire, et beaucoup d’entre elles ont commencé à nommer des chefs de la durabilité afin d’élaborer un plan de transition et le mettre en œuvre.

 L’importance de ce rôle a été reconnue lors de la création du forum S30, qui regroupe 30 chefs de la durabilité de premier plan. Cette initiative a été lancée dans le cadre de la Sustainable Markets Initiative parrainée par Son Altesse Royale le prince de Galles, en collaboration avec Ernst & Young s.r.l./S.E.N.C.R.L., et l’agence de communication Freuds.

On ne peut gérer ce qu’on ne mesure pas, et ce qu’on mesure ne peut inspirer confiance si on ne se conforme pas à des normes communes qui répondent aux exigences des parties prenantes.

Mesures transparentes et confiance

Cependant, les organisations veulent aussi répondre aux exigences changeantes de leurs clients, de leurs employés et de leurs investisseurs, ainsi qu’à celles des politiciens et des organismes de réglementation. Elles comprennent qu’une approche transparente et que la qualité de l’information fournie au chapitre de la durabilité sous tendent une saine gestion des affaires et contribuent à acquérir et à préserver la confiance des parties prenantes. L’information non financière peut également jouer un rôle important dans l’accès aux marchés des capitaux.

Parallèlement, les investisseurs évaluent de plus en plus le rendement de l’entreprise et sa stratégie de valeur durable à long terme à l’aide de facteurs environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG), et cherchent à s’assurer qu’elle prend en compte les risques environnementaux et sociaux de façon adéquate. Ils souhaitent obtenir des données standardisées qui les aident à bien comprendre les modèles de l’entreprise et à comparer celle-ci avec d’autres organisations du même groupe pour prendre des décisions d’investissement éclairées. Malheureusement, des études d’EY ont révélé une hausse de l’insatisfaction des investisseurs quant à l’information qu’ils reçoivent sur les risques ESG depuis 2018.

Le problème n’est pas l’absence de cadres offerts pour mesurer la durabilité et l’information non financière ou la présenter; il réside plutôt dans l’absence de cadres et de normes uniformes applicables à l’échelle mondiale, comme les Normes internationales d’information financière (IFRS) utilisées pour l’information financière. Actuellement, il n’existe aucun consensus quant à la nature des données à fournir par les entreprises en matière de durabilité et d’information non financière et sur la méthode à utiliser pour les recueillir. En outre, l’information présentée n’est pas nécessairement assujettie à une vérification externe, ce qui peut soulever des questions sur sa véracité.

Sans surprise, de plus en plus de voix s’élèvent pour réclamer une consolidation des cadres, méthodes et paramètres actuels. L’objectif ultime consiste à réunir le bassin de connaissances et d’expérience acquises au fil des ans pour élaborer des cadres et des normes de durabilité uniformes et acceptées à l’échelle mondiale, de sorte à répondre aux demandes communes des parties prenantes.

Cinq organismes se consacrant à cette mission (pdf)  —collaborent déjà en ce sens : le CDP (auparavant appelé Carbon Disclosure Project), le Climate Disclosure Standards Board, la Global Reporting Initiative, l’International Integrated Reporting Council et le Sustainability Accounting Standards Board. L’idéal serait de permettre aux équipes des finances de comprendre clairement les données ESG et les méthodes requises pour recueillir et divulguer cette information.

Un autre développement important est le document de consultation au sujet des rapports sur la durabilité qui a été publié par les administrateurs de l’IFRS Foundation en septembre 2020. Il y était question de savoir si cette dernière devait participer à la définition de normes mondiales sur la durabilité en plus de s’acquitter de son rôle de normalisateur concernant l’information financière. Le document présentait aussi des propositions pour la mise sur pied d’un comité sur les normes de durabilité qui serait régi par l’IFRS Foundation, sous certaines réserves.

De plus en plus de voix s’élèvent pour réclamer une consolidation des cadres, méthodes et paramètres actuels. L’objectif ultime consiste à réunir le bassin de connaissances et d’expérience acquises au fil des ans pour élaborer des cadres et des normes de durabilité uniformes et acceptées à l’échelle mondiale.

La pressante nécessité d’élaborer des normes mondiales sur la durabilité

Les premières réponses au document, qui ont été communiquées en mars 2021, confirment la pressante nécessité d’élaborer des normes mondiales sur la durabilité et d’obtenir le soutien de l’IFRS pour leur mise en œuvre. Un groupe de travail composé de l’International Accounting Standards Board, du Task Force on Climate-Related Finance Disclosures, des cinq organismes mentionnés précédemment et du Forum économique mondial a été formé afin d’accélérer la convergence des normes pour la présentation de l’information, en particulier celles qui concernent la valeur de l’entreprise.

EY a joué un rôle actif dans l’élaboration de normes sur la durabilité grâce à sa participation au projet Embankment pour un capitalisme inclusif et à l’élaboration de mesures du capitalisme axé sur les parties prenantes du Forum économique mondial. De plus, EY appuie la proposition de mise sur pied d’un comité, car cette initiative faciliterait la création de cadres et de normes mondiales uniformes qui respecteraient les exigences de toutes les parties prenantes (y compris les exigences réglementaires), tout en assurant de meilleurs liens entre l’information financière et l’information non financière.

Un ensemble de normes mondiales en matière de durabilité pourrait également aider les organisations — qui sont souvent dépassées par le rythme d’élaboration des normes — à réévaluer les aspects des communications ESG les plus importantes pour leur modèle et leur stratégie. Ce faisant, elles seraient plus à même de se concentrer sur les questions de durabilité, de mesurer et de présenter plus efficacement la valeur à long terme qu’elles génèrent tant financière que non financière, et de se distinguer auprès des parties prenantes et de la société en général.

Si de telles normes voient le jour, l’information divulguée en vertu de celles‑ci devra‑t‑elle faire l’objet d’un audit ou être assujettie à une forme de vérification externe? Selon les administrateurs de l’IFRS Foundation, pour parvenir à des pratiques uniformes à l’échelle mondiale en matière de production de rapports sur la durabilité, une vérification externe sera nécessaire. Elle s’appliquerait tant aux chiffres qu’aux activités sous‑jacentes et à leurs retombées.

Afin que les organisations luttent efficacement contre les changements climatiques — et suscitent la confiance des parties prenantes quant à leurs actions durables — elles doivent être en mesure de fournir l’information sur la durabilité au moyen de normes acceptées à l’échelle mondiale et de la faire vérifier. EY a tenu compte des attentes changeantes de ses parties prenantes, surtout ses employés, pour bâtir un monde meilleur : en janvier 2020, elle a annoncé ses plans visant à afficher un bilan de carbone négatif en 2021 et zéro émission nette en 2025..

Puisque tous les acteurs concernés s’entendent sur la nécessité de cadres et de normes mondiales uniformes sur la durabilité (organisations, auditeurs, organismes de normalisation et de réglementation, investisseurs et gouvernements), il est grand temps de se concerter et de les établir pour mesurer et accélérer les progrès vers un avenir plus brillant et plus durable.

Résumé

Actuellement, les cadres pouvant servir à mesurer les informations sur la durabilité et les autres informations non financières et les présenter abondent. Cependant, il n’existe aucun consensus quant à la nature des données qui devraient être mesurées et à l’information qui devrait faire l’objet d’une vérification externe. Il faut un cadre ou un ensemble de normes uniformes pouvant être appliqué à l’échelle mondiale.

À propos de cet article

Par Marie-Laure Delarue

Vice‑présidente mondiale, Certification

Agente du changement. Passionnée par les gens de talent. Instigatrice d’innovation. Bilingue. Aime les dégustations de vins.