Calcul de l’assiette du CII
De façon similaire, le projet de loi C-59 ne comprend aucune modification importante en ce qui a trait au calcul de l’assiette du CII.
Le montant du coût en capital utilisé pour calculer le CII doit être rajusté en fonction des autres CII applicables au bien en vertu de l’article 127. De plus, le CII dans les technologies propres ne peut être demandé pour un bien qui est admissible au titre du crédit d’impôt pour le captage, l’utilisation et le stockage du carbone (« CUSC ») ou d’autres crédits d’impôt pour l’économie propre à venir une fois qu’ils auront été adoptés.
Lorsque le contribuable a reçu une aide, qu’elle provienne du gouvernement ou d’une organisation non gouvernementale, le CII est calculé selon le prix de base du matériel, déduction faite de toute aide financière reçue. Si l’aide est remboursée par la suite ou si le contribuable n’a plus droit à l’aide, le montant de la réduction du coût du bien est rajouté au coût en capital du bien pour le calcul du CII.
Si une partie du coût capitalisé du bien demeure impayée 180 jours après la fin de l’année d’imposition au cours de laquelle le bien est devenu prêt à être mis en service, le montant impayé doit être porté en réduction du coût en capital du bien. Le montant peut par la suite être réintégré au coût en capital au moment où il est payé.
Délai pour demander le CII
Le projet de loi C-59 ne prévoit aucune modification au délai pour demander le CII.
Le projet de paragraphe 127.45(3) prévoit un délai maximal pour la production du formulaire prescrit aux fins de l’admissibilité au CII dans les technologies propres. Plus précisément, le formulaire prescrit doit être produit au plus tard le jour qui suit d’une année la date d’échéance de production qui est applicable au contribuable pour l’année. Une modification corrélative apportée au paragraphe 220(2.2) retire le pouvoir discrétionnaire permettant à l’Agence du revenu du Canada (l’« ARC ») de renoncer à cette exigence.
Récupération du crédit
Comme il expliqué ci-après, le projet de loi C-59 comprend plusieurs modifications aux règles de récupération.
Le projet de loi C-59 prévoit une récupération du crédit si le bien est affecté à une utilisation non admissible, est exporté du Canada ou fait l’objet d’une disposition dans les 10 ans suivant l’acquisition. La période de récupération a donc été écourtée, puisque dans les propositions d’août, elle était de 20 ans.
Le montant à rembourser correspondrait au moins élevé du montant du CII reçu relativement au bien donné et du montant obtenu en multipliant le CII par le produit de disposition (si le bien est vendu dans le cadre d’une opération sans lien de dépendance) ou par la juste valeur marchande du bien (si le bien est vendu dans le cadre d’une opération avec lien de dépendance ou qu’il est affecté à une utilisation non admissible), exprimé en pourcentage du coût en capital du bien à l’égard duquel le CII avait été demandé.
Dans les propositions d’août, la récupération du crédit ne s’appliquait pas lorsque le bien était transféré à une partie liée (qui était aussi un contribuable admissible) et que l’« acheteur » faisait l’acquisition du bien dans des circonstances où le bien aurait été pour lui un bien de technologie propre admissible, vu l’utilisation qui en était faite. Toutefois, cette exception à la règle de récupération a été restreinte dans le projet de loi C-59. Plus précisément, le projet de paragraphe 127.45(13) prévoit que la récupération du crédit ne s’applique pas si le bien donné est transféré par une société canadienne imposable à une société canadienne imposable qui lui est liée. Bien que la disposition vise à faciliter les véritables transferts de bien de technologie propre au sein de groupes de sociétés, les sociétés de personnes et les fiducies de placement immobilier au sein d’un groupe de sociétés n’auraient pas droit à cet allégement.
En outre, les propositions législatives du projet de loi C-59 prévoient que, si les règles de récupération s’appliquent ou si la récupération est différée en raison de l’allégement prévu pour les transferts entre parties liées, le contribuable est tenu d’en aviser le ministre sur le formulaire prescrit et selon les modalités prescrites au plus tard à la date d’échéance de production qui lui est applicable pour l’année. Des modifications corrélatives apportées à la LIR prolongeraient la période de cotisation si le ministre n’a pas été avisé sur le formulaire prescrit ou selon les modalités prescrites.
En outre, le projet de loi C-59 modifie les règles de récupération visant les sociétés de personnes qui se trouvaient dans les propositions d’août. La méthode calcul ne correspond plus à celle utilisée pour les autres contribuables admissibles et les autres CII, et des règles distinctes plus complexes sont désormais prévues.
Exigences en matière de main-d’œuvre
Comme il expliqué ci-après, le projet de loi C-59 comprend certaines modifications aux exigences en matière de main-d’œuvre. Les propositions législatives contenues dans le projet d’article 127.46 de la LIR s’appliquent à l’égard des biens déterminés préparés ou installés le 28 novembre 2023 ou après cette date. Dans les propositions d’août, la date d’entrée en vigueur était le 1er octobre 2023.
En outre, comme c’était le cas dans les propositions d’août, le projet de loi C-59 prévoit certaines exigences en matière de main-d’œuvre auxquelles une société doit satisfaire pour obtenir le plein montant de l’incitatif offert dans le cadre du CII dans les technologies propres. Si ces exigences ne sont pas remplies, le taux maximal du crédit est réduit de 10 points de pourcentage.
Pour satisfaire aux exigences en matière de main-d’œuvre, les demandeurs du CII doivent faire un choix sur le formulaire prescrit et selon les modalités prescrites pour chaque année d’imposition de l’installation (soit une année d’imposition au cours de laquelle la préparation ou l’installation de biens de technologie propre se produit). Les taux réduits du CII (voir le tableau déjà présenté) s’appliqueraient automatiquement dans les situations où le contribuable n’a pas choisi selon les modalités prescrites de satisfaire aux exigences relatives au salaire prévalant et aux exigences à l’égard d’apprentis pour une année d’imposition de l’installation.
Exigences relatives au salaire prévalant
Comme il était prévu dans les propositions d’août, sous réserve des exceptions mentionnées ci-après, le contribuable doit satisfaire aux exigences en matière de main-d’œuvre suivantes pour avoir droit au plein montant de l’incitatif :
- Chaque travailleur visé doit être rémunéré pour son travail conformément à la convention collective qui s’applique à lui (p. ex. une convention collective conclue par un syndicat conformément à la loi provinciale applicable). En l’absence d’une convention collective, le montant de la rémunération (y compris les avantages sociaux) doit équivaloir au moins au montant précisé dans la convention collective qui correspond le plus étroitement au niveau d’expérience du travailleur visé, à ses tâches et à son lieu de travail (calculé selon un taux horaire ou sur une base similaire). C’est ce qu’on appelle les « exigences relatives au salaire prévalant ». Le projet de loi C-59 précise que la rémunération ne comprend pas les heures supplémentaires.
- Le demandeur du CII doit attester, sur le formulaire prescrit et selon les modalités prescrites, qu’il a satisfait à l’exigence relative au salaire prévalant (décrite ci-dessus) en ce qui concerne ses propres travailleurs visés et qu’il a pris les mesures raisonnables pour veiller à ce que les travailleurs visés employés par d’autres personnes qui participent à l’installation de biens de technologie propre soient également rémunérés conformément à l’exigence relative au salaire prévalant.
- Le demandeur du CTI doit également prendre des mesures pour s’assurer que tous les travailleurs visés sont au courant des exigences en leur communiquant un avis, d’une manière facilement visible et accessible, sur le chantier ou par voie électronique. Le demandeur du CII doit aussi expliquer dans un langage clair ce que les exigences relatives au salaire prévalant représentent pour les travailleurs et fournir des renseignements sur la façon de signaler au ministre les omissions de satisfaire à ces exigences.
À ces fins, un travailleur visé s’entend d’un particulier :
- qui participe à l’installation des biens de technologie propre sur le chantier désigné;
- dont le travail ou les fonctions sont principalement manuels ou physiques;
- qui n’est ni un salarié administratif, un employé de bureau ou un cadre ni un visiteur commercial au Canada (au sens de l’article 187 du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés).
Exigences à l’égard d’apprentis
En plus des exigences relatives au salaire prévalant susmentionnées, le demandeur du CII doit faire des efforts sérieux pour s’assurer que les apprentis inscrits à un métier désigné Sceau rouge travaillent au moins 10 % du total des heures de travail effectuées par des travailleurs Sceau rouge dans le cadre de l’installation de biens de technologie propre. Si une loi sur le travail ou une autre convention limite le recours aux apprentis, le demandeur du CII doit déployer des efforts sérieux pour atteindre le plus haut pourcentage possible d’heures de travail effectuées par des apprentis. Un « travailleur Sceau rouge » s’entend d’un travailleur visé dont les fonctions sont, ou équivalent à, celles normalement exercées par des travailleurs dans un métier désigné Sceau rouge.
De plus, le demandeur du CII doit attester, sur le formulaire prescrit et selon les modalités prescrites, qu’il satisfait aux exigences à l’égard d’apprentis relativement aux travailleurs visés sur le chantier désigné.
Le projet de loi C-59 propose le projet de paragraphe 127.46(16), lequel prévoit des mesures précises que le demandeur du CII doit prendre pour démontrer qu’il doit être réputé avoir respecté l’exigence relative aux efforts sérieux susmentionnée. Selon les notes explicatives du ministère des Finances, étant donné que ces mesures visent à illustrer un moyen de satisfaire aux critères d’efforts sérieux, des variations de ces actions afin de mieux refléter des circonstances propres au demandeur du CII peuvent également être considérées comme des efforts sérieux.
Certaines mesures doivent être prises au moins une fois tous les quatre mois relativement à l’année d’imposition de l’installation. Ces mesures visent principalement à satisfaire certaines exigences relatives à la publication d’offres d’emploi, à communiquer avec les syndicats et divers établissements d’enseignement ainsi qu’à confirmer la disponibilité d’apprentis sur les chantiers désignés. Les autres mesures exigent que le demandeur du CII examine et prenne dûment en compte toutes les demandes reçues et atteste, sur le formulaire prescrit et selon les modalités prescrites, qu’il satisfait aux exigences.
Le projet de loi C-59 modifie la définition de « métier désigné Seau rouge », lequel s’entend du métier désigné Sceau rouge pertinent géré par le Conseil canadien des directeurs de l’apprentissage dans le cadre du Programme du Sceau rouge ou, dans les autres cas, d’un métier équivalent agréé par une province.
Pénalités en cas de non-respect des exigences en matière de main-d’œuvre
Outre une réduction de la pénalité pour un nombre insuffisant d’heures travaillées par des apprentis mentionnée ci-après, les pénalités en cas de non-respect des exigences en matière de main-d’œuvre demeurent les mêmes.
Les propositions législatives prévoient une pénalité sous la forme d’un impôt supplémentaire à payer lorsque le contribuable a réclamé un CII en faisant le choix de satisfaire aux exigences en matière de main-d’œuvre, mais qu’il ne parvient pas à satisfaire aux exigences. La pénalité correspond à une somme de 20 $ par jour où le salaire prévalant n’a pas été versé au travailleur visé durant l’année d’imposition de l’installation et, dans le cas des exigences à l’égard d’apprentis, à une somme de 50 $ (100 $ dans les propositions d’août) pour chaque heure de travail qui aurait dû être effectuée par un apprenti, mais qui ne l’a pas été. Les montants utilisés pour calculer la pénalité seront ajustés en fonction de l’inflation après 2023.
De plus, le projet de loi C-59 présente le projet de paragraphe 127.46(17) concernant la répartition de tout impôt supplémentaire ou de toute pénalité imposés lorsque le demandeur de l’incitatif est une société de personnes.
Faute lourde
Aucune modification n’a été apportée à la disposition relative à la faute lourde dans le projet de loi C-59.
Si le demandeur a réclamé le CII au taux régulier au motif qu’il respectait les exigences en matière de main-d’œuvre (voir le tableau des taux ci-dessus) et qu’il est plus tard établi que le demandeur a sciemment (ou dans des circonstances équivalant à faute lourde) omis de satisfaire à ces exigences, le contribuable doit rembourser la partie de l’incitatif à laquelle il n’avait pas droit, en plus de payer une pénalité équivalant à la moitié de la somme qu’il doit rembourser à ce titre.
Mesures correctives
Aucune modification n’a été apportée aux mesures correctives dans le projet de loi C-59.
Si le demandeur du CII reçoit un avis du ministre précisant qu’il n’a pas satisfait aux exigences relatives au salaire prévalant susmentionnées, il peut verser à chaque travailleur visé un montant « complémentaire », plus les intérêts, pour combler l’écart et continuer de satisfaire aux exigences. Le demandeur doit payer le montant complémentaire (y compris les intérêts) dans un délai d’un an suivant la réception de l’avis, sauf si l’ARC estime qu’un délai plus long est acceptable dans les circonstances. Le montant complémentaire serait réputé être un traitement versé dans l’année et être déductible aux fins de l’impôt sur le revenu, mais ne serait pas admissible au titre du CII.
Une pénalité équivalant à 120 % du montant complémentaire s’appliquerait pour tout travailleur visé à l’égard de qui un montant complémentaire n’est pas versé.
Exceptions
Comme il était mentionné dans les propositions d’août, les exigences en matière de main-d’œuvre ne s’appliquent pas à un CII demandé en vue de l’acquisition de véhicules zéro émission hors route ou à l’acquisition et à l’installation de matériel de chauffage à faibles émissions de carbone.
Conclusion
Le CII dans les technologies propres, de même que le CII pour le CUSC, constitue l’un des divers nouveaux CII proposés pour aider le Canada à faire la transition vers une économie propre. Ces deux nouveaux crédits sont les premiers pour lesquels des propositions législatives détaillées ont été publiées dans un projet de loi.
Des propositions législatives sur les CII pour l’hydrogène propre et pour la fabrication de technologies propres ont été publiées le 20 décembre 2023 aux fins de consultation.
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- Voir le bulletin FiscAlerte 2022 numéro 42 d’EY, Énoncé économique de l’automne 2022 du gouvernement fédéral.
- Voir le bulletin FiscAlerte 2023 numéro 20 d’EY, Budget fédéral de 2023‑2024.