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Changement de vitesse : avec le ralentissement des ventes des véhicules électriques, la collaboration et le recentrage sur l’infrastructure seront des éléments cruciaux pour réussir à soutenir un avenir à zéro émission.


Coauteur : Jason Clifton, associé, Consultation, EY Canada

Alors que les premiers utilisateurs de véhicules électriques (VE) sont en passe de devenir la majorité, la coopération et la collaboration seront essentielles pour bâtir une infrastructure durable, répondre aux préoccupations des consommateurs et maintenir l’élan du Canada vers un avenir à zéro émission.  


En bref

  • L’indice EY de la mobilité des consommateurs 2024 a confirmé qu’en dépit de gains modestes au cours de la dernière année l’intérêt pour les véhicules électriques semble ralentir au Canada.
  • La collaboration entre les gouvernements, les services publics, les investisseurs et les parties prenantes du secteur des véhicules électriques sera essentielle si nous voulons atteindre les cibles de durabilité pour l’avenir.
  • Le fait de disposer de l’une des principales chaînes d’approvisionnement en batteries lithium‑ion au monde et des matières premières nécessaires pour être un chef de file dans ce secteur continuera à positionner le Canada comme un acteur clé sur le marché des véhicules électriques. À présent, il convient de se concentrer sur l’infrastructure et la prestation d’une expérience utilisateur plus efficace au cours des prochaines années, de manière à bien positionner le Canada lors de la transition vers le marché des véhicules électriques.

Lannée 2024 marque presque un quart de siècle depuis que le premier véhicule électrique a quitté les chaînes de montage à l’échelle mondiale, amorçant un changement radical dans la façon dont le monde perçoit les transports. Au cours des décennies qui ont suivi, l’intérêt et l’innovation à l’égard des véhicules électriques n’ont fait qu’augmenter. 

Toutefois, l’intérêt des consommateurs à l’égard des véhicules électriques pourrait montrer des signes de ralentissement, selon l’indice EY de la mobilité des consommateurs 2024. Bien que, à l’échelle mondiale, l’intention d’acheter un véhicule ait augmenté de 7 %, passant de 44 % à 51 % depuis l’année dernière, et que l’intention d’acheter un véhicule électrique ait connu une hausse de 2 % pour s’établir à 57 %, la tendance semble s’être stabilisée au Canada. Selon l’indice de cette année, alors que 48 % des Canadiens achèteraient un véhicule au cours de la prochaine année, soit une hausse par rapport à 42 % l’an dernier, seulement la moitié d’entre eux envisageraient d’acheter un véhicule électrique, soit une baisse de 2 % d’une année à l’autre. 
 
La baisse d’intérêt peut être attribuée à l’usure du caractère nouveau de la technologie des véhicules électriques et à la stabilisation de la vague de premiers adoptants. Les Canadiens continuent cependant d’exprimer leurs préoccupations et de réclamer des améliorations dans certains domaines qui, s’ils ne sont pas traités au cours des prochaines années, pourraient avoir une incidence négative sur les ventes de véhicules électriques et sur nos objectifs visant à atteindre 20 % de véhicules neufs vendus d’ici 2026, 60 % d’ici 2030 et, ultimement, 100 % d’ici 2035¹.

L’incidence positive des véhicules électriques sur l’environnement est bien documentée. De plus, la baisse des coûts d’utilisation est certainement un point positif pour les consommateurs, compte tenu de la transition vers les déplacements à zéro émission. Mais ces avantages sont‑ils suffisants? Le Canada est‑il prêt à répondre aux préoccupations afin de surmonter la prochaine vague de difficultés croissantes prévue au cours des prochaines années? 

La cavalerie

 

Les conditions économiques défavorables combinées aux facteurs négatifs traditionnels, tels que l’inquiétude liée à la charge et à l’autonomie, ainsi que le coût initial, ont contribué à l’indice de cette année. À cela s’ajoutent de nouvelles préoccupations associées à de nouveaux défis à relever, comme les coûts d’entretien et de remplacement des batteries, lesquels ont augmenté ces dernières années, les véhicules électriques plus anciens et les technologies de recharge commençant à montrer des signes d’usure. 

 

Selon l’indice, l’infrastructure de recharge demeure le principal frein à l’entrée sur le marché. Plus de la moitié des répondants ont indiqué que les coûts d’installation des bornes de recharge résidentielles (57 %) et les coûts de l’électricité (54 %) étaient en tête de liste de leurs préoccupations, tandis que 42 % ont indiqué que la faible disponibilité et les longs temps d’attente des bornes de recharge publiques avaient une incidence négative sur leur expérience utilisateur.

 

Si les fabricants de véhicules électriques espèrent séduire de futurs acheteurs, il est évident que notre infrastructure nationale de recharge devra suivre le rythme, en adoptant une approche mesurée visant non seulement à répondre à la demande actuelle, mais aussi à anticiper la croissance future. Pour reprendre le célèbre paradoxe « l’œuf ou la poule », devons‑nous nous concentrer en priorité sur les bornes de recharge ou les véhicules? Les parties prenantes ont choisi d’investir dans les véhicules électriques à un rythme dépassant à la fois l’infrastructure nécessaire pour les soutenir et l’acceptation par les consommateurs. 

 

Nouvelles percées

 

Le discours change. Alors que l’horizon temporel s’est avéré plus long que prévu, les gouvernements, les services publics et les principales parties prenantes commencent à comprendre la complexité et les coûts astronomiques associés à la mise en place d’une infrastructure de recharge et à la maintenance des équipements et des réseaux pour les rendre plus fiables. 

 

Partout dans le pays, les villes recherchent des solutions pour accélérer la capacité de recharge, en offrant par exemple des remises sur l’installation pour les bâtiments résidentiels. La croissance des infrastructures devra être exponentielle pour suivre le rythme de l’augmentation du nombre de véhicules électriques en circulation, qui devrait passer de 480 000 aujourd’hui à 21 millions d’ici 2040². 

 

Selon Ressources naturelles Canada, plus de 1,6 million de places de stationnement devront être rénovées dans des immeubles à logements multiples d’ici 2030 et près de 3,2 millions d’ici 2035 pour répondre à la demande privée, en plus des 40 000 bornes de recharge publiques nécessaires, pour un coût estimé à 18 milliards de dollars³. C’est sans compter la coordination nécessaire pour mettre en place les changements de politique requis afin de rendre de nouveaux logements prêts pour les véhicules électriques, les incitatifs pour compenser les coûts de modernisation pour les consommateurs et les investissements publics et privés indispensables pour faire face à l’augmentation de la demande sur le réseau⁴.

Pied au plancher!

 

Sur une note plus positive, le Canada dispose d’une solide chaîne d’approvisionnement de bout en bout pour les véhicules électriques. Nous sommes un chef de file dans le domaine de la production de minéraux d’origine éthique et disposons d’assez de ressources pour créer des produits propres et durables pour le marché nord‑américain. Les sociétés mondiales le remarquent et choisissent d’investir au Canada. 

 

Des projets d’aménagement d’infrastructures de grande envergure dans des zones plus habitées et urbaines pourraient être un signe de bonnes choses à venir. Par exemple, la giga‑usine d’éléments de batterie de St. Thomas, qui devrait générer 90 gigawattheures et alimenter un million de véhicules électriques annuellement à compter de 2027⁵. Ou encore la coentreprise d’une valeur de 5 milliards de dollars entre Stellantis et LG Energy Solution (LGES), visant la construction de la première usine de fabrication de batteries lithium‑ion à grande échelle à Windsor, qui devrait commencer sa production l’an prochain⁶.

 

Des efforts concertés, coordonnés et collaboratifs entre les gouvernements, les investisseurs et les parties prenantes des véhicules électriques seront nécessaires, non seulement pour installer les bornes de recharge, mais aussi pour offrir des incitatifs qui aideront à combler l’écart entre la réalité et les attentes des consommateurs et à poursuivre l’élan favorisant l’adoption des véhicules électriques. Les programmes d’infrastructures qui financent des projets régionaux prioritaires à l’appui d’infrastructures d’électricité propre contribueront à maintenir cet élan.

 

De même, les prévisions, la planification et la budgétisation à long terme seront essentielles pour éviter les retards dans les efforts en matière de recharge. Au‑delà des centres urbains, un accès aux chargeurs le long des autoroutes et dans les banlieues sera nécessaire pour assurer un réseau fiable partout au pays, qui apaisera les préoccupations liées à l’autonomie au fil du temps. 

 

Tout comme les programmes de rabais pour les véhicules à zéro émission. Les mesures d’incitatifs financiers ont pris de l’importance, une augmentation de 5 % d’une année à l’autre pour s’établir à 28 %, et représentent un facteur de motivation principal pour encourager l’achat de véhicules électriques, suivant de près les prix élevés du carburant et les préoccupations environnementales. Les offres fédérales, comme le programme iVZE, offrant jusqu’à 5 000 $ au point de vente, plus les programmes provinciaux offrant des rabais pouvant atteindre 7 000 $⁷. Bien que nous continuions de constater une progression de la parité entre les véhicules électriques et les véhicules à moteur à combustion interne (dans certains cas, elle s’est déjà produite lorsque les deux types de véhicules sont à égalité en termes de coûts), ces rabais aident à réduire certains coûts pour les véhicules électriques par rapport aux modèles à combustion. 

 

Toutefois, le resserrement des budgets pourrait entraîner l’abandon ou la récupération de ces programmes au moment où ils sont le plus importants pour maintenir la trajectoire future. Par conséquent, des ajustements continus seront nécessaires pour prévoir l’évolution des attentes des clients, soutenir les budgets et prévoir l’avenir.  



Résumé

La tendance quant aux véhicules électriques et au transport durable ne faiblit pas. Alors que nous passons de l’étape de l’innovation et de l’adoption préliminaire à celle de la majorité naissante, ces tendances laissent entrevoir un changement important. Alors que les investissements dans les véhicules électriques ont peut‑être devancé l’acceptation des consommateurs, et ce, à mesure que les bornes de recharge et la capacité des batteries offrent une plus grande autonomie, une meilleure efficacité et des économies de carburant et d’achat pour les nouveaux acheteurs, il est temps de recentrer les efforts sur les aspects essentiels aux yeux des consommateurs afin de soutenir l’adoption et la croissance des véhicules électriques dans l’avenir. 
 
La demande de véhicules électriques continuera d’augmenter sous la pression des gouvernements, dans un contexte de baisse des prix et de recherche par les consommateurs d’économies à la pompe. La collaboration entre les parties prenantes nous permettra de décider au mieux comment et où investir pour relever les défis, soutenir le réseau et ouvrir la voie à l’avenir des véhicules électriques.

À propos de cet article

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