Alerte en immigration – Échelle mondiale
Une tendance légère, mais pouvant s’accentuer, émerge : la révocation par le département d’État de visas délivrés aux étudiants étrangers et la résiliation par la Immigration and Customs Enforcement (ICE) des dossiers correspondants de ces étudiants dans le Student and Exchange Visitor Information System (SEVIS). Les étudiants qui demeurent aux États‑Unis après la révocation de leur visa et la résiliation de leur inscription au SEVIS ne peuvent pas continuer à travailler et peuvent faire l’objet d’un renvoi des États‑Unis.
Contexte
Le 29 janvier 2025, le président Donald J. Trump a signé un décret afin d’intensifier la lutte contre l’antisémitisme. Le décret présidentiel ordonne l’utilisation de « tous les moyens juridiques appropriés à disposition afin de poursuivre en justice, de renvoyer ou d’une autre façon de » tenir pour responsables les personnes qui se sont livrées à du harcèlement et à des actes de violence à caractère antisémite. Le texte du décret cible les étudiants et le personnel dans les établissements d’enseignement supérieur des États‑Unis qui sont des ressortissants étrangers.
Le 27 mars 2025, le secrétaire d’État Marco Rubio a annoncé que le département d’État avait déjà révoqué le visa d’environ 300 étudiants étrangers, dont bon nombre auraient participé à des manifestations ou dénoncé d’une autre façon la guerre entre Israël et le Hamas. En vertu de la loi en vigueur, le département d’État peut procéder à la révocation par précaution d’un visa s’il soupçonne une inadmissibilité ou une déchéance de droit, si la personne ne satisfait pas aux conditions d’entrée aux États‑Unis ou si la situation le justifie, y compris si le département d’État reçoit des renseignements défavorables d’un autre organisme gouvernemental. Le département d’État a révoqué des visas pour suspicion de fraude, fausses déclarations, infractions criminelles, conduite avec facultés affaiblies, préoccupations liées à la sécurité ou manquement aux conditions de visa.
De plus, les médias ont aussi rapporté la publication d’un câble par le département d’État qui impose des mesures renforcées de contrôle et de vérification des réseaux sociaux pour les demandeurs de visa d’étudiant, en plus d’une analyse de la révocation de visa, qui sont en phase avec les fonctions de politique étrangère et de sécurité nationale de l’organisme.
Selon les rapports, les fonctionnaires consulaires peuvent examiner les demandes de visa d’étudiant pour relever toute intention de voyager aux États‑Unis afin de s’y livrer à une activité illégale ou à une activité qui diffère de celle indiquée dans la demande. De plus, les fonctionnaires consulaires peuvent refuser une demande de visa d’étudiant si le demandeur ne parvient pas à démontrer de façon crédible que ses activités sont conformes aux exigences de la catégorie de visa indiquée dans la demande. Les fonctionnaires ont comme directive de demander à ce que le contenu des réseaux sociaux des demandeurs fasse l’objet d’un examen s’ils répondent à l’un des critères suivants :
- le demandeur du visa d’étudiant, de l’avis du fonctionnaire consulaire, a ouvertement milité en faveur de la cause d’une organisation terroriste étrangère désignée;
- le demandeur a précédemment détenu le statut d’étudiant ou de visiteur participant à un programme d’échange aux États‑Unis de catégorie F, M ou J entre le 7 octobre 2023 et le 31 août 2024;
- l’inscription au SEVIS précédente du demandeur a été résiliée entre le 7 octobre 2023 et aujourd’hui.
Dans le câble, les fonctionnaires consulaires auraient reçu l’instruction de faire une capture d’écran du profil des demandeurs de visa sur les médias sociaux et de la conserver comme preuve.
Analyse
La révocation d’un visa n’équivaut pas nécessairement à l’incapacité de conserver un statut aux États‑Unis. S’il est déjà présent aux États‑Unis, la révocation de visa n’aura pas d’incidence sur la capacité de l’étudiant à fréquenter l’école tant qu’il respecte les conditions et les modalités de son statut.
Cependant, ICE pourrait entamer une procédure de renvoi afin d’expulser un ressortissant étranger au motif qu’il est présent aux États‑Unis en violation de la loi ou que son visa de non‑immigrant a été révoqué. De plus, en vertu du sous‑alinéa 237(a)(4)(A) de l’Immigration and Nationality Act (INA), une personne dont « la présence ou les activités aux États‑Unis [sont telles que] le secrétaire d’État a des motifs raisonnables de croire qu’[elles] sont susceptibles d’avoir des conséquences défavorables potentiellement graves sur la politique étrangère des États‑Unis, est passible d’expulsion ».
Les universités ont signalé que le département de la Sécurité intérieure (Department of Homeland Security – DHS) a résilié l’inscription au SEVIS de plusieurs étudiants et diplômés détenteurs d’un visa F‑1, y compris ceux qui détenaient une autorisation de travail Optional Practice Training (OPT) ou STEM OPT, par suite des révocations de visas, en se fondant sur les dispositions législatives suivantes :
- La division 237(a)(4)(C)(i) de l’INA : une personne est susceptible d’expulsion en raison de ses activités si le secrétaire d’État a des motifs raisonnables de croire qu’elles peuvent avoir de graves conséquences sur la politique étrangère des États‑Unis.
- La division 237(a)(1)(C)(i) de l’INA : une personne est susceptible d’expulsion si elle omet de conserver le statut de non‑immigrant ou de respecter les conditions d’un tel statut.
- Le sous‑alinéa 237(a)(1)(B) de l’INA : une personne est susceptible d’expulsion en cas de violation des lois des États‑Unis ou de révocation de son visa de non‑immigrant ou d’un autre document d’entrée.
- Le paragraphe 221(i) de l’INA : une disposition législative confère au département d’État le pouvoir de révoquer les visas ou d’autres documents à sa discrétion.
La résiliation de l’inscription au SEVIS des étudiants a plusieurs effets immédiats. Selon le DHS, l’étudiant perdra toute autorisation d’emploi sur le campus et hors campus. De plus, si la résiliation est attribuable à une violation du statut par l’étudiant, ce dernier devra partir immédiatement, aucun délai de grâce ne sera accordé. ICE peut procéder à des investigations plus poussées pour confirmer que l’étudiant est bel et bien parti.
Tout étudiant qui choisit de rester aux États‑Unis pour demander le rétablissement de son statut d’étudiant ou exercer un autre recours risque de faire l’objet d’une procédure de renvoi par ICE, par la délivrance d’un avis de comparution devant un juge du tribunal de l’immigration. Cela pourrait entraîner une détention dès le début de la procédure.
Conséquences
Si le visa d’un étudiant est révoqué, l’étudiant sera généralement avisé par le poste consulaire des États‑Unis qui l’a délivré, mais ce n’est pas toujours le cas. Selon le manuel des affaires étrangères du département d’État, lorsqu’un visa est révoqué par application du pouvoir discrétionnaire du secrétaire d’État, il n’est pas obligatoire d’en aviser le titulaire du visa.
Sous l’administration actuelle, les étudiants qui ont été avisés de la révocation de leur visa sont aussi informés que la révocation a été communiquée à ICE et que leur établissement d’enseignement sera ensuite notifié. Les étudiants qui font le choix de quitter les États‑Unis et d’éviter de faire l’objet d’une procédure de renvoi devront obtenir un nouveau visa avant de retourner aux États‑Unis et peuvent s’attendre à ce que leur nouvelle demande soit soumise aux mesures renforcées de contrôle et de vérification du contenu des médias sociaux dont il est question plus haut.
Les employeurs ne peuvent pas maintenir sciemment en poste un ressortissant étranger qui a perdu son autorisation de travail. Si un employé indique que son inscription au SEVIS a été résiliée, l’employeur doit communiquer avec un professionnel d’EY Cabinet d’avocats s.r.l./S.E.N.C.R.L. ou de Mehlman Jacobs LLP afin d’établir s’il est tenu de se séparer de l’employé jusqu’au rétablissement de son statut d’étudiant et de l’autorisation de travail correspondante ou jusqu’à l’obtention d’une autre forme d’autorisation de travail valide.