Incidences potentielles de la réforme fiscale américaine sur la compétitivité du Canada
La réforme fiscale américaine devrait avoir une incidence économique mitigée au Canada, mais l’on s’attend généralement à ce qu’elle soit défavorable. D’une part, compte tenu des impôts moins élevés sur les capitaux et la main-d’œuvre et de la croissance économique qui devrait en résulter aux États-Unis, le Canada pourrait tirer son épingle du jeu en exportant davantage de produits et de services. D’autre part, un cadre fiscal plus concurrentiel aux États-Unis, combiné à une montée éventuelle du protectionnisme commercial au sud de la frontière, pourrait faire en sorte que le Canada perde des capitaux et de la main-d’œuvre spécialisée au profit du marché plus vaste des États-Unis.
Cependant, la réforme fiscale américaine se fera particulièrement sentir au chapitre de la compétitivité fiscale du Canada. En tenant compte des taux d’imposition étatiques, le nouveau taux d’impôt sur le revenu des sociétés fédéral et étatique combiné baissera considérablement, passant de 39,1 % à 26 %, taux légèrement inférieur au taux d’impôt sur le revenu des sociétés fédéral-provincial combiné au Canada, qui est d’environ 26,7 %. Cette importante modification pourrait créer de nouvelles possibilités de planification fiscale pour les sociétés établies au Canada et aux États-Unis qui exercent des activités au-delà des frontières.
Toutefois, la situation n’est pas désespérée pour le Canada. Même si les entreprises canadiennes seront imposées à un taux plus élevé que les entreprises américaines, le Canada offre d’autres avantages importants en matière d’investissement. Dans la foulée de l’adoption de la taxe sur les produits et services/taxe de vente harmonisée dans la plupart des provinces, les taxes de vente ont cessé de s’appliquer à une grande partie des achats d’immobilisations par les entreprises. Aux États‑Unis, des taxes de vente au détail sont perçues sur des achats d’immobilisations similaires et ont une incidence notable sur la compétitivité fiscale.
Riposte des entreprises et des décideurs politiques canadiens
Les mesures de la réforme fiscale américaine ont une incidence sur le rapport des prix de la main-d’œuvre et des capitaux dans les deux pays et sur les rendements des investissements des entreprises. La compétitivité fiscale n’est qu’un des nombreux facteurs dont les entreprises tiennent compte lorsqu’elles prennent des décisions en matière d’investissement. Néanmoins, l’élimination de l’avantage dont le Canada jouissait au chapitre de la compétitivité fiscale par rapport aux États‑Unis au cours des dernières années pourrait influer sur les décisions des entreprises en matière de planification fiscale et d’investissement.
Non seulement les investissements seront-ils touchés, mais les entreprises devront repenser leurs structures de financement et se demander s’il convient d’investir plus d’argent aux États-Unis pour leur expansion ou à d’autres fins.
Conséquemment, parce que l’économie du Canada et celle des États-Unis sont étroitement intégrées, les nouveautés liées à la réforme fiscale américaine devraient inciter les autorités fiscales au Canada à entreprendre une réflexion et une réponse appropriées sur le plan de la politique fiscale. Les partisans d’une révision exhaustive de la politique fiscale au Canada étant déjà nombreux, les dernières nouveautés pourraient contribuer à faire avancer les choses.
Perspectives
Les États-Unis seront plus attrayants pour les investissements des entreprises dans l’avenir grâce aux taux d’imposition moins élevés s’y appliquant. Le protectionnisme commercial grandissant pourrait également rendre plus difficiles les échanges commerciaux transfrontaliers, ce qui forcera les entreprises à réexaminer leur chaîne d’approvisionnement actuelle et les incitera peut-être à déplacer la production pour répondre à la demande sur le marché protégé des États-Unis.
Le Canada a montré qu’il peut rivaliser avec n’importe quel pays quand il s’agit d’attirer des investissements internationaux. Le défi se situe maintenant dans un contexte qui a considérablement changé en faveur de son plus important concurrent. Grâce à la réforme fiscale américaine, les États-Unis sont passés du troisième au quatorzième rang pour ce qui est des taux d’imposition des sociétés les plus élevés parmi les pays de l’OCDE, soit deux rangs derrière le Canada dont les taux sont les douzièmes plus élevés.
La réponse des entreprises et des décideurs politiques déterminera si le Canada sera en mesure de redevenir une destination attrayante pour l’investissement ou s’il sera en perte de vitesse faute d’une nouvelle vision de l’avenir.