Subvention salariale d’urgence du Canada : mise à jour ‑ COVID‑19
FiscAlerte 2020 numéro 28, 1er avril 2020
Pour éviter les mises à pied et dans le cadre de son Plan d’intervention économique du Canada pour répondre à la COVID-19, le gouvernement fédéral a instauré, le 18 mars 2020, un programme de subvention salariale pour les petits employeurs admissibles. Ce programme accordait une subvention salariale de 10 % sous la forme d’une réduction des remises d’impôt sur le revenu versées à l’Agence du revenu du Canada (l’«ARC») (sous réserve d’un plafond). Des précisions supplémentaires concernant cette subvention salariale de 10 % ont été rendues publiques dans le cadre du projet de loi C-13, Loi sur les mesures d’urgence visant la COVID-19, qui a été adopté le 25 mars 2020 (voir le bulletin FiscAlerte 2020 numéro 24 d’EY).
Le 1er avril 2020, le ministre des Finances, Bill Morneau, a présenté des mises à jour importantes concernant le programme de subvention salariale, instaurant un nouveau programme appelé Subvention salariale d’urgence du Canada (la «nouvelle subvention salariale»), qui coexistera avec la subvention salariale initiale de 10 %. Ce nouveau programme de subvention salariale, qui devrait coûter 71 milliards de dollars, s’appliquera aux employeurs qui ont subi une baisse de leurs revenus bruts d’au moins 30 % en mars, en avril ou en mai, par rapport aux mêmes mois en 2019. Non seulement ce programme augmente considérablement le montant des subventions offertes, mais il élargit les catégories d’employeurs admissibles.
Le présent bulletin résume les points saillants de la nouvelle subvention salariale.
Au moment d’écrire ces lignes, aucune proposition législative n’a été publiée. Il faut donc s’attendre à ce que les notions décrites ci-après soient raffinées dans les prochains jours. De plus, ces mesures nécessiteront probablement l’approbation du Parlement (comme l’ont d’ailleurs mentionné le premier ministre et le chef de l’opposition officielle).
Élargissement des catégories d’employeurs admissibles
Les catégories d’employeurs qui semblent admissibles à la nouvelle subvention salariale sont grandement élargies. Alors que la subvention initiale de 10 % visait principalement les petits employeurs, les employeurs admissibles aux fins de la nouvelle subvention salariale comprennent les employeurs de toutes tailles et de tous les secteurs de l’économie, à l’exception des entités du secteur public (comme les municipalités, les sociétés d’État et les universités publiques).
Plus particulièrement, il semble que les grands employeurs, dont les sociétés publiques (ouvertes), pourraient être des employeurs admissibles aux fins de la nouvelle subvention salariale. À l’instar de la subvention initiale de 10 %, parmi les employeurs admissibles au titre de la nouvelle subvention salariale figureraient les particuliers, les organismes à but non lucratif, les organismes de bienfaisance enregistrés et les sociétés de personnes constituées d’employeurs admissibles.
À la lumière du communiqué de presse et du document d’information publiés par le ministère des Finances, la question de savoir si l’employeur en question appartient à des Canadiens ou à des non-résidents du Canada ne semble pas pertinente aux fins de l’admissibilité à la nouvelle subvention salariale. Pour ce qui est des sociétés, le seul critère semble être que la société soit imposable.
Baisse de 30 % des revenus bruts
Seuls les employeurs qui subissent une baisse d’au moins 30 % de leurs revenus provenant de sources sans lien de dépendance en mars, en avril ou en mai, par rapport aux mêmes mois en 2019, sont admissibles à la nouvelle subvention salariale.
Pour la comparaison au mois correspondant de l’année antérieure, le mois civil au cours duquel la période a commencé sera généralement utilisé. Par exemple, si la période de rémunération visée par la demande est celle du 15 mars au 11 avril, les revenus de mars 2020 devront être comparés à ceux de mars 2019.
Dans le cadre du processus de demande, les employeurs devront attester la baisse des revenus requise dans leur demande de subvention.
Le communiqué de presse et le document d’information publiés par le ministère des Finances ne précisaient pas si tous les employeurs au sein d’un groupe de sociétés associées doivent être considérés ensemble pour déterminer s’il y a eu baisse de 30 % des revenus. Étant donné que les entités au sein d’un groupe de sociétés associées sont généralement considérées comme des employeurs distincts aux fins de l’impôt, il peut être raisonnable de considérer les employeurs individuellement pour déterminer s’il y a eu baisse de 30 % des revenus bruts.
Le gouvernement a également indiqué qu’il continuait à collaborer avec des organismes à but non lucratif et des organismes de bienfaisance enregistrés afin de s’assurer que la définition de «revenu» convient bien à ce secteur. Le ministre des Finances s’est également dit ouvert à trouver des moyens appropriés pour composer avec les cas particuliers, comme les entreprises en démarrage qui sont en activité depuis moins de 12 mois.
Montant de la subvention
La nouvelle subvention salariale s’applique au taux de 75 % pour la première tranche de 58 700 $ de la rémunération admissible que touche un employé. La rémunération admissible comprend les traitements, le salaire et les autres rémunérations à l’égard desquels l’employeur serait généralement tenu de retenir l’impôt sur le revenu. La rémunération admissible n’inclut pas les allocations de retraite, les avantages d’options d’achat d’actions ou les avantages relatifs à l’utilisation personnelle d’un véhicule appartenant à l’employeur.
Le montant de la nouvelle subvention correspond à une prestation hebdomadaire maximale de 847 $ par employé. Le programme sera en vigueur pour une durée de 12 semaines, soit du 15 mars au 6 juin 2020.
Une règle spéciale s’appliquera aux employés qui ont un lien de dépendance avec l’employeur. Le montant de la nouvelle subvention pour ces employés sera limité à la rémunération admissible versée au cours de toute période de rémunération entre le 15 mars et le 6 juin 2020, jusqu’à concurrence d’une prestation hebdomadaire maximale de 847 $ ou de 75 % de la rémunération hebdomadaire que l’employé touchait avant la crise.
Les employeurs ne semblent pas assujettis à une subvention maximale. L’absence d’un montant maximal par employeur est conforme à la volonté déclarée du gouvernement d’offrir la nouvelle subvention salariale aux petits et grands employeurs.
Paiements aux employés
Même si la nouvelle subvention salariale sera versée directement aux employeurs, la totalité du montant reçu devrait être octroyée aux employés. Les employeurs qui n’observent pas cette directive s’exposent à des pénalités sévères.
Le gouvernement a indiqué qu’il s’attend à ce que les employeurs qui bénéficient de la nouvelle subvention salariale fassent les efforts possibles pour compléter les salaires jusqu’au niveau de 100 % du montant maximal couvert (c.‑à‑d., versement de 100 % du salaire jusqu’à concurrence de 58 700 $). Par contre, il est difficile de savoir jusqu’où les employeurs doivent aller pour s’acquitter de cette obligation de moyen («efforts possibles»).
Injection de liquidités pour les employeurs
Les employeurs admissibles pourront demander la nouvelle subvention salariale par l’intermédiaire du portail Mon dossier d’entreprise de l’ARC, ainsi que d’une demande en ligne. Les employeurs doivent tenir des registres afin de démontrer la réduction de leurs revenus et la rémunération versée aux employés. D’autres renseignements sur le processus de demande seront disponibles bientôt.
Contrairement au programme de la subvention salariale initiale de 10 %, dans le cadre duquel les employeurs admissibles doivent effectuer les retenues d’impôt conformément aux règles habituelles, mais en réduisant leurs remises de retenues à la source à l’ARC, le nouveau programme de subvention salariale prévoit le transfert de liquidités du gouvernement aux employeurs. L’une des raisons est d’ordre logistique : comme le taux d’imposition marginal le plus élevé au Canada est d’environ 54 %; par conséquent, les employés ne seraient jamais assujettis à des retenues d’impôt au taux de 75 %.
À l’heure actuelle, il est prévu que les fonds commencent à être versés aux employeurs d’ici trois à six semaines.
Interaction avec la subvention salariale de 10 %
La nouvelle subvention salariale coexistera avec la subvention salariale initiale de 10 % annoncée la semaine dernière.
Par exemple, si un employeur est admissible au programme de subvention salariale de 10 %, il pourra toujours accéder aux prestations offertes dans le cadre de ce programme, même s’il ne subit pas une baisse de ses revenus de 30 %.
Toutefois, pour ce qui est d’un employeur admissible aux deux programmes pour une période donnée, toute prestation de subvention salariale équivalant à 10 % des salaires au cours d’une période particulière réduira généralement le montant pouvant être demandé au titre de la nouvelle subvention salariale au cours de cette même période.
Traitement de la nouvelle subvention salariale aux fins de l’impôt
La nouvelle subvention salariale doit être incluse dans le revenu de l’employeur.
Mesures de protection
Vu l’ampleur de cette dépense gouvernementale (le gouvernement estime le coût de cette mesure à 71 milliards de dollars), on s’attend à ce que des vérifications soient effectuées. Les employeurs qui abusent du nouveau programme de subvention salariale s’exposent à des sanctions pécuniaires, voire à des peines d’emprisonnement, mais risquent aussi de voir leur réputation gravement entachée. Le gouvernement a indiqué que les particuliers, les employeurs et les administrateurs d’entreprise qui fournissent des renseignements faux ou trompeurs se verront imposer des sanctions. Il est probable que les administrateurs de société soient aussi passibles de sanctions si un employeur fournit des renseignements faux ou trompeurs ou abuse de toute autre façon du nouveau programme de subvention salariale.
Par conséquent, nous recommandons aux employeurs de non seulement respecter leurs obligations au titre du nouveau programme de subvention salariale, mais aussi d’établir une documentation solide démontrant leur conformité. Par exemple, les employeurs devraient :
- préparer une documentation claire à l’appui de la baisse de leurs revenus bruts de 30 %;
- établir une documentation démontrant clairement que le montant intégral obtenu au titre de la nouvelle subvention salariale a été transféré aux employés admissibles;
- consigner les efforts déployés afin de payer les 25 % restants. Si l’employeur prétend ne pas être en mesure de payer la totalité ou une partie des 25 % restants, il devrait clairement documenter les raisons pour lesquelles il n’est pas en mesure de le faire.
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