46 minutes de lecture 3 nov. 2022
EY - Femme sur un quai admirant le coucher du soleil

Questionsfiscales@EY – novembre 2022

Par EY Canada

Organisation de services professionnels multidisciplinaires

46 minutes de lecture 3 nov. 2022

Questionsfiscales@EY : un bulletin mensuel canadien pour rester au fait des nouveautés en fiscalité et en jurisprudence, des publications, etc. Des questions liées à la fiscalité des particuliers et des entreprises aux nouveautés législatives et jurisprudentielles, nous vous présentons l’information d’actualité pertinente.

Votre pire obligation fiscale serait-elle celle que vous ne voyez pas?

Les questions fiscales nous concernent tous. Nous avons compilé des nouvelles et de l’information sur des sujets d’actualité en fiscalité pour vous tenir à jour. Dans ce numéro, nous abordons :


(Chapter breaker)
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Chapitre 1

Poser de meilleures questions de planification fiscale de fin d’année – partie 1

 

Remarque : Pour de plus amples renseignements sur des sujets comme l’imposition des investisseurs et la planification successorale, consultez la plus récente version du guide d’EY Comment gérer vos impôts personnels : Une perspective canadienne.

Candra Anttila, Maureen De Lisser et Alan Roth, Toronto

Vous est-il déjà arrivé de chercher des possibilités d’économies d’impôt en remplissant votre déclaration de revenus en avril? Le cas échéant, vous avez probablement constaté qu’à ce moment vous ne pouvez plus faire grand-chose pour réduire le solde que vous devez ou augmenter votre remboursement d’impôt. Au moment de préparer votre déclaration, vous retournez à l’année qui est terminée et déclarez simplement les données s’y rapportant.

Mais ne vous en faites pas. À l’approche de la fin de l’année, il reste encore un peu de temps pour la planification. Vous pouvez aborder la planification de fin d’année en vous posant certaines questions ou en passant en revue une liste de contrôle. Suivre un cadre pour la planification de fin d’année, comme celui proposé à la fin du présent article, peut aussi vous être utile.

Les mois de novembre et de décembre sont toujours occupés, mais le fait de prendre du temps pour réfléchir à ces questions peut vous aider à trouver de meilleures réponses qui pourraient réduire l’impôt que vous devrez payer pour 2022 et les années suivantes.

La première partie du présent article « Poser de meilleures questions de planification fiscale de fin d’année » porte sur les questions à avoir, les sujets à aborder et les techniques de planification fiscale que vous pourriez mettre en œuvre chaque année. La seconde partie, qui paraîtra dans le numéro du mois prochain, se concentrera sur les questions et les sujets propres à l’année d’imposition 2022 et sur les récentes modifications apportées à l’impôt sur le revenu des particuliers, notamment les nouvelles règles temporaires relatives à la passation en charges immédiate au titre de certaines dépenses en capital et diverses modifications de crédits d’impôt.

Pouvez-vous utiliser des techniques de fractionnement du revenu?

Vous pourriez être en mesure d’alléger le fardeau fiscal global de votre famille en tirant parti des différences entre les fourchettes d’imposition des membres de votre famille et en utilisant l’un ou plusieurs des mécanismes suivants :

  • Prêts aux fins de fractionnement du revenu – Vous pouvez prêter des fonds à un membre de la famille au taux d’intérêt prescrit de 3 % (pour les prêts consentis après le 30 septembre 2022)1. Le membre de la famille peut investir l’argent, et le revenu de placement ne vous sera pas attribué (c.‑à‑d. qu’il ne sera pas considéré comme votre revenu aux fins de l’impôt), à condition que les intérêts pour chaque année civile soient versés au plus tard le 30 janvier de l’année suivante.
  • Salaires raisonnables aux membres de la famille – Si vous avez une entreprise, envisagez d’employer votre époux ou conjoint de fait ou vos enfants afin de bénéficier des possibilités de fractionnement du revenu. Leur salaire doit être raisonnable, compte tenu du travail accompli2. Cependant, d’autres possibilités de fractionnement du revenu mettant en cause votre entreprise pourraient être limitées (voir le paragraphe ci-dessous relatif au fractionnement du revenu d’entreprise d’une société privée).
  • Régime enregistré d’épargne-retraite (« REER ») au profit du conjoint – Les REER au profit du conjoint peuvent servir au fractionnement du revenu durant les années de retraite, mais également avant la retraite. L’époux ou le conjoint de fait qui a le revenu le plus élevé peut profiter de l’avantage fiscal lié aux cotisations à un régime au profit du conjoint à un taux d’imposition élevé, et après une période de trois ans sans versement de cotisations, le conjoint dont le revenu est plus faible ou nul peut retirer des fonds et payer peu ou pas d’impôt.
  • Fractionnement du revenu de pension – Si vous recevez certains types de revenus de pension admissibles en 2022, vous pourriez avoir la possibilité de transférer jusqu’à la moitié de votre revenu de pension admissible à votre époux ou conjoint de fait, ou vice versa. Grâce au fractionnement du revenu de pension, certains couples peuvent réaliser d’importantes économies d’impôt. Toutefois, l’ampleur des économies réalisées dépendra de divers facteurs3.

Avez-vous payé vos dépenses donnant droit à une déduction ou à un crédit d’impôt pour 2022?

  • Dépenses donnant droit à une déduction d’impôt – Un grand nombre de dépenses, dont les frais d’intérêts et les frais de garde d’enfants, ne peuvent être réclamées à titre de déduction dans une déclaration de revenus que si elles sont payées avant la fin de l’année civile.
  • Dépenses qui donnent droit à des crédits d’impôt – Les dons de bienfaisance, les contributions politiques, les frais médicaux, les frais de rénovation pour l’accessibilité domiciliaire, les dépenses pour abonnement aux nouvelles numériques et les frais de scolarité doivent être payés au cours de l’année (ou, dans le cas des frais médicaux, durant une période de 12 mois se terminant au cours de l’année) pour que vous puissiez vous prévaloir des crédits. Il est aussi à noter que, pour 2022 et les années suivantes, le plafond annuel des dépenses admissibles (c.-à-d. les frais de rénovation pour l’accessibilité domiciliaire) qui peuvent être réclamées au titre du crédit d’impôt pour l’accessibilité domiciliaire a été augmenté pour s’élever à 20 000 $ (il était auparavant de 10 000 $).
  • Importance de déterminer si la valeur d’une déduction ou d’un crédit est plus grande cette année ou l’année prochaine – Si vous pouvez contrôler le moment de vos déductions ou crédits, songez à tout changement prévu de votre niveau de revenu, de votre tranche d’imposition ou de votre taux marginal d’impôt sur le revenu des particuliers. Les déductions vaudront davantage lorsque vous serez assujetti à un taux marginal d’imposition supérieur. De plus, votre niveau de revenu peut avoir une incidence sur l’accessibilité ou la valeur de certains crédits d’impôt (comme le crédit d’impôt pour frais médicaux et le crédit d’impôt pour dons)4.

Avez-vous effectué des dépenses en capital déductibles dans l’année?

Pour qu’un contribuable puisse déduire la totalité ou une partie du coût de certaines immobilisations utilisées en vue de tirer un revenu d’une entreprise ou d’un bien dans l’année – comme des ordinateurs, du mobilier de bureau, des outils et de la machinerie –, les biens doivent avoir été acquis et être devenus prêts à être mis en service avant la fin de l’année.

Le montant déductible pour l’année dépend de la catégorie de déduction pour amortissement (« DPA ») à laquelle le bien appartient. De plus, certains biens acquis après 2021 peuvent être admissibles à la passation en charges immédiate au lieu d’être assujettis au taux d’amortissement dégressif de la catégorie de DPA applicable.

Pour en apprendre davantage sur les règles relatives à la passation en charges immédiate, consultez le bulletin FiscAlerte 2022 numéro 30, Élargissement temporaire de la passation en charges immédiate. Ces règles seront aussi présentées de façon plus détaillée dans la seconde partie du présent article, qui paraîtra dans le prochain numéro du bulletin Questionsfiscales@EY.

Détenez-vous des placements passifs au sein de votre société privée?

L’accès d’une société privée sous contrôle canadien (« SPCC ») à la déduction accordée aux petites entreprises et, par conséquent, son accès au taux d’imposition des petites entreprises5 peuvent être restreints par le montant du revenu de placement passif gagné dans l’année précédente. Consultez votre conseiller en fiscalité afin de connaître les stratégies possibles pour atténuer l’incidence défavorable des règles à cet égard.

Par exemple, si vous envisagez de réaliser des gains accumulés dans le portefeuille de placements de la société avant la fin de son année d’imposition 2022, et que, ce faisant, la société est susceptible de dépasser le seuil de revenu de 50 000 $, envisagez de reporter les gains à l’année suivante afin que l’année d’imposition 2023 ne soit pas touchée. Vous pouvez aussi évaluer les avantages et les inconvénients de détenir en votre nom personnel une partie ou la totalité du portefeuille au lieu de détenir les placements par l’intermédiaire de la société.

L’incidence de ces règles sur les SPCC assujetties à l’impôt en Ontario ou au Nouveau-Brunswick n’est pas aussi importante, car les deux provinces ont confirmé qu’elles n’adopteraient pas ces règles aux fins de leur déduction provinciale pour petite entreprise respective.

Pour obtenir des renseignements supplémentaires, consultez l’article intitulé « Le budget fédéral simplifie les propositions sur le revenu de placement passif » paru dans le numéro de mai 2018 du bulletin Questionsfiscales@EY.

Fractionnez-vous le revenu d’entreprise d’une société privée avec des membres adultes de la famille?

Des règles relatives à l’impôt sur le revenu pourraient limiter les possibilités de fractionnement du revenu avec certains membres adultes de la famille au moyen de sociétés privées.

Prenons l’exemple d’une entreprise exploitée au moyen d’une société privée dont un membre adulte de la famille dans une fourchette d’imposition inférieure souscrit des actions. Une partie du revenu d’entreprise est distribuée à ce dernier sous forme de dividendes. Selon ces règles, le taux marginal d’impôt sur le revenu des particuliers le plus élevé (l’impôt sur le revenu fractionné, dont le taux fédéral est de 33 % pour 2022) s’applique au revenu de dividendes reçu, sauf si le membre de la famille satisfait à l’une des exceptions à l’application de cet impôt prévues par la loi. Par exemple, si le membre adulte de la famille participe activement à l’entreprise de façon régulière en travaillant au moins 20 heures par semaine en moyenne pendant l’année (ou au cours de cinq années d’imposition antérieures, pas nécessairement consécutives), l’impôt sur le revenu fractionné pourrait ne pas s’appliquer.

Consultez votre conseiller en fiscalité pour en savoir plus sur la manière dont ces règles pourraient s’appliquer dans votre situation.

Pour obtenir des renseignements supplémentaires sur ces règles, consultez l’annexe E, « Règles révisées relatives à l’impôt sur le revenu fractionné », de la plus récente version du guide Comment gérer vos impôts personnels : Une perspective canadienne, ainsi que les articles « Impôt sur le revenu fractionné : l’ARC donne des précisions sur l’exception fondée sur les actions exclues » dans le numéro de février 2020 et « Impôt sur le revenu fractionné : exception visant une entreprise exclue » dans le numéro de novembre 2020 du bulletin Questionsfiscales@EY.

Avez-vous maximisé vos placements à l’abri de l’impôt en cotisant à un compte d’épargne libre d’impôt (« CÉLI ») ou à un REER?

  • CÉLI – Versez votre cotisation pour 2022 et rattrapez les droits de cotisation inutilisés des années antérieures. La cotisation ne sera pas déductible, mais le revenu tiré des sommes investies sera libre d’impôt. De plus, afin de maximiser le revenu libre d’impôt, songez à faire votre cotisation pour 2023 en janvier.
  • Retraits d’un CÉLI et fonds retirés versés de nouveau – Les retraits d’un CÉLI sont libres d’impôt et les fonds retirés au cours de l’année sont ajoutés à vos droits de cotisation pour l’année suivante. Or, si vous avez versé le montant maximal de cotisations à un CÉLI chaque année6 et que vous retirez une somme durant l’année, les fonds retirés et versés de nouveau au cours de la même année pourraient donner lieu à des cotisations excédentaires, qui seraient assujetties à un impôt de pénalité. Si vous n’avez pas de droits de cotisation disponibles et que vous prévoyez retirer un montant de votre CÉLI, envisagez de le faire avant la fin de 2022 afin de pouvoir cotiser de nouveau en 2023, sans qu’il y ait d’incidence sur votre plafond de cotisation pour 2023. Pour obtenir des renseignements supplémentaires sur les conséquences défavorables de verser des cotisations excédentaires à un CÉLI, consultez les articles « CÉLI : l’incapacité de rectifier une cotisation excédentaire involontaire peut mener à des pénalités » dans le numéro d’octobre 2021 et « CÉLI : l’ARC poursuit ses initiatives en matière de conformité » dans le numéro d’octobre 2017 du bulletin Questionsfiscales@EY.
  • REER – Plus vous cotisez tôt, plus vos placements auront le temps de croître. Alors songez à verser vos cotisations pour 2023 tôt dans l’année afin de maximiser la croissance des placements dont l’imposition sera reportée. Si votre revenu est faible en 2022, mais que vous prévoyez être dans une fourchette d’imposition plus élevée en 2023 ou plus tard, pensez à cotiser à votre REER le plus tôt possible, mais n’utilisez la déduction qu’au cours d’une année future lorsque vous serez dans une fourchette d’imposition supérieure. Si vous avez 71 ans à la fin de 2022, il s’agit de la dernière année de votre régime, et vous devez verser votre cotisation au plus tard le 31 décembre 2022 pour obtenir une déduction d’impôt dans votre déclaration de revenus des particuliers de 2022.

    En outre, vous devez fermer votre REER avant la fin de l’année. Vous pouvez choisir de le faire en retirant les fonds, lesquels seront assujettis à une imposition complète dans l’année du retrait, en les transférant dans un fonds enregistré de revenu de retraite (« FERR ») ou en achetant une rente. Ces deux dernières possibilités vous permettront de continuer de bénéficier d’un certain report d’impôt.

    S’il vous reste des droits de cotisation inutilisés après avoir effectué votre dernière cotisation à un REER et que votre époux ou conjoint de fait est plus jeune, vous pouvez continuer de cotiser à un REER au profit du conjoint jusqu’à la fin de l’année où votre époux ou conjoint de fait atteint l’âge de 71 ans.

    Pour obtenir d’autres conseils de planification fiscale relativement aux REER, consultez le chapitre « Planification de la retraite » dans la plus récente version du guide Comment gérer vos impôts personnels : Une perspective canadienne.

Songez-vous à retirer des fonds d’un REER dans le cadre du Régime d’accession à la propriété (« RAP »)?

Si vous êtes un acheteur d’une première habitation7, le RAP vous permet de retirer jusqu’à 35 000 $8 d’un REER pour en financer l’achat. Aucun impôt n’est perçu sur les fonds retirés du REER en vertu de ce régime. Si vous retirez des fonds de votre REER dans le cadre du RAP, vous devez acquérir l’habitation avant le 1er octobre de l’année qui suit l’année de votre retrait, et vous devez reverser ces fonds à votre REER dans un délai d’au plus 15 ans à compter de la deuxième année civile suivant celle du retrait. Par conséquent, si possible, songez à attendre que l’année ait pris fin avant d’effectuer un retrait dans le cadre du RAP afin de reporter d’un an les échéances de l’achat de l’habitation et du remboursement.

Un nouveau type de compte enregistré visant à aider les particuliers à épargner en vue d’une mise de fonds pour leur première habitation a été instauré par suite du budget fédéral de 20229. Ce nouveau type de compte, le compte d’épargne libre d’impôt pour l’achat d’une première propriété (le « CELIAPP »), sera disponible à un moment donné en 2023.

Il est important de savoir que, lorsque vous achetez une habitation, vous devrez choisir entre retirer des fonds de votre CELIAPP et retirer des fonds de votre REER en vertu du RAP, vous ne pourrez faire les deux pour le même achat admissible.

Pour obtenir des renseignements supplémentaires, consultez l’article « Quelles sont les nouveautés pour les acheteurs d’une première habitation? » paru dans le numéro d’octobre 2022 du bulletin Questionsfiscales@EY : spécial patrimoine familial. Ce nouveau type de compte sera aussi présenté de façon plus détaillée dans la seconde partie du présent article qui paraîtra dans le prochain numéro du bulletin Questionsfiscales@EY.

Avez-vous maximisé l’épargne-études en cotisant à un régime enregistré d’épargne-études (« REEE ») pour vos enfants ou petits-enfants?

  • Cotisations – Versez des cotisations à un REEE pour vos enfants ou petits-enfants avant la fin de l’année. Pour une cotisation à hauteur de 2 500 $ par enfant de moins de 18 ans, le gouvernement fédéral versera 500 $ annuellement (maximum à vie de 7 200 $ par bénéficiaire) dans le régime au titre de la Subvention canadienne pour l’épargne-études.
  • Droits de cotisation inutilisés – Si vous avez des droits de cotisation inutilisés pour des années antérieures, la subvention annuelle peut atteindre 1 000 $ (pour une cotisation de 5 000 $)10.

Existe-t-il une façon de réduire ou d’éliminer les intérêts non déductibles?

Les intérêts à l’égard des fonds empruntés à des fins personnelles ne sont pas déductibles. Si possible, songez à utiliser les liquidités disponibles pour rembourser une dette personnelle avant de rembourser des prêts à des fins de placement ou d’affaires à l’égard desquels les intérêts peuvent être déductibles.

Avez-vous passé en revue votre portefeuille de placements?

Pertes cumulées qui pourraient être portées en déduction de gains réalisés – Les impôts ne devraient pas dicter vos décisions en matière de placement, mais il pourrait être judicieux de vendre les titres cumulant des pertes afin de compenser les gains en capital réalisés plus tôt dans l’année. Si les pertes subies excèdent les gains réalisés dans l’année, elles peuvent être reportées rétrospectivement et portées en réduction des gains nets réalisés au cours des trois dernières années. Veuillez noter que le dernier jour pour régler des opérations en 2022 pour les titres inscrits à une bourse canadienne ou américaine est le mercredi 28 décembre 2022.

N’oubliez pas de faire attention aux règles sur les pertes apparentes, qui peuvent entraîner le refus de la perte en capital résultant de la disposition d’un titre. Ces règles peuvent s’appliquer si vous, votre époux ou conjoint de fait, une société contrôlée par l’un de vous deux ou une société de personnes ou une fiducie affiliée (comme votre REER, FERR, CÉLI ou REEE) faites l’acquisition du même titre ou d’un titre identique au cours de la période commençant 30 jours avant la disposition et se terminant 30 jours après la disposition, et que le titre est encore détenu à la fin de la période.

Pertes à reporter prospectivement – Si vous avez reporté prospectivement des pertes en capital d’années précédentes, vous pourriez envisager d’encaisser certains de vos « bons coups » dans votre portefeuille. N’oubliez pas que la date limite pour vendre des titres inscrits à une bourse canadienne ou américaine afin que l’opération soit réglée en 2022 est le 28 décembre 2022. Ou songez à transférer les titres admissibles cumulant des gains à votre CÉLI ou à votre REER (jusqu’à concurrence de votre plafond de cotisation). Le gain en capital qui en découlera sera compensé par les pertes en capital disponibles, et les gains futurs réalisés à l’égard de ces titres seront libres d’impôt (dans le cas d’un CÉLI) ou bénéficieront d’une imposition différée (dans le cas d’un REER).

Don de titres cumulant des gains – Vous pouvez aussi envisager de faire don de titres cotés en bourse (p. ex. actions, obligations, unités ou actions de fonds communs de placement canadiens) cumulant des gains à une œuvre ou fondation de bienfaisance. Si vous choisissez cette option, le gain en capital qui en résultera ne sera pas imposable, et vous recevrez également un reçu pour don de bienfaisance d’un montant égal à la juste valeur marchande des titres donnés.

Pouvez-vous améliorer la situation quant aux conséquences de l’impôt sur le revenu sur vos liquidités?

Assurez-vous d’avoir produit votre déclaration de l’année précédente – Si vous n’avez pas produit votre déclaration de revenus des particuliers pour 2021 parce que vous n’aviez aucun impôt à payer, vous courez le risque de rater certains crédits d’impôt remboursables et avantages auxquels vous pourriez avoir droit, comme le crédit pour la taxe sur les produits et services / taxe de vente harmonisée (la « TPS/TVH ») et les paiements de l’incitatif à agir pour le climat. Vous devez résider en Alberta, en Ontario, au Manitoba ou en Saskatchewan pour être admissible aux paiements de l’incitatif à agir pour le climat, dont le versement ne dépend pas du niveau de revenu11.

Demande de réduction des retenues d’impôt à la source – Si vous recevez régulièrement des remboursements d’impôt en raison de la déduction de cotisations à un REER, de frais de garde d’enfants ou de paiements de pension alimentaire pour ex-conjoint, envisagez de demander à l’Agence du revenu du Canada (l’« ARC ») d’autoriser votre employeur à réduire l’impôt retenu sur votre salaire (formulaire T1213). Cette astuce n’aura pas d’incidence sur vos impôts pour 2022, mais, en 2023, vous profiterez de l’avantage fiscal lié à ces déductions pendant toute l’année au lieu d’avoir à attendre que votre déclaration de revenus de 2023 ait été produite.

Importance de déterminer si vous êtes tenu de verser un acompte provisionnel le 15 décembre – Si vous prévoyez que le montant final d’impôt à payer pour 2022 sera considérablement inférieur au montant de 2021 (par exemple en raison d’un revenu plus faible d’une source en particulier, de pertes subies en 2022 ou de déductions additionnelles disponibles en 2022), vous pourriez avoir déjà payé suffisamment d’impôt sous forme d’acomptes provisionnels. Vous n’êtes pas tenu de respecter le calendrier des paiements suggéré par l’ARC, et vous pouvez fonder le montant de vos acomptes provisionnels sur le montant estimatif de l’impôt que vous vous attendez à payer pour 2022. Toutefois, si vous sous-estimez votre solde pour 2022 et que vos acomptes provisionnels s’avèrent insuffisants ou que les deux premiers paiements (dus en mars et en juin) n’étaient pas assez élevés, vous risquez de devoir payer des intérêts et possiblement une pénalité12.

Avez-vous pensé à la planification successorale?

Revoyez votre testament – Vous devriez examiner et mettre à jour votre testament périodiquement pour vous assurer qu’il reflète les changements dans votre situation familiale et financière et qu’il tient compte des modifications de la loi.

Évaluez vos besoins en matière d’assurance-vie – L’assurance-vie est un outil important pour prévoir le remboursement de diverses dettes (impôts compris) qui peuvent être exigibles à votre décès et pour fournir à vos personnes à charge une source de fonds pour remplacer vos revenus. Réexaminez votre protection pour vous assurer qu’elle demeure appropriée par rapport à votre situation financière.

Songez à un gel successoral pour réduire l’impôt et/ou les droits d’homologation au décès – Le gel successoral est le principal outil utilisé pour gérer l’impôt à payer à la suite du décès et consiste à immobiliser (c.-à-d. « geler ») la valeur d’une entreprise, de placements ou d’autres biens et à en transférer la croissance future aux membres de la famille. Tenez compte de l’incidence des règles fiscales relatives aux fiducies testamentaires, aux successions assujetties à l’imposition à taux progressifs et à la planification des dons de bienfaisance ainsi que de celle des règles relatives à l’impôt sur le revenu fractionné (voir la précédente rubrique « Fractionnez-vous le revenu d’entreprise d’une société privée avec des membres adultes de la famille? ») sur les stratégies de fractionnement du revenu utilisant les gels successoraux.

Prenons l’exemple d’un gel successoral dans le cadre duquel les parents transfèrent la croissance future de la valeur d’une entreprise à la prochaine génération. Les dividendes versés en 2018 ou dans les années suivantes à un enfant adulte peuvent être assujettis au taux marginal d’imposition du revenu des particuliers le plus élevé en vertu des nouvelles règles, sauf si le membre de la famille satisfait à l’une des exceptions à l’application de cet impôt prévues par la loi.

Pour en savoir plus, consultez le chapitre 12, « Planification successorale », de la plus récente version du guide Comment gérer vos impôts personnels : Une perspective canadienne.

Envisagez d’établir un plan de relève pour votre entreprise – Un plan de relève consiste à concevoir une stratégie pour faire en sorte que les actifs de votre entreprise passent aux bonnes personnes au bon moment.

Ces questions peuvent sembler familières, mais comme les règles fiscales se complexifient, il importe encore plus d’avoir une vue d’ensemble sur le plan fiscal tout au long de l’année ainsi que d’année en année au fur et à mesure que votre situation évolue. Entamez une discussion avec votre conseiller en fiscalité pour trouver de meilleures réponses.

  Liste des choses à faire

Avant le 31 décembre 2022 :
  • Cotiser à un CÉLI pour 2022
  • Cotiser à un REEE pour 2022
  • Verser vos dernières cotisations à un REER si vous avez 71 ans à la fin de l’année et liquider votre REER en choisissant d’en retirer les fonds, de les transférer dans un FERR ou d’acheter une rente
  • Payer les dépenses donnant droit à une déduction ou à un crédit d’impôt
  • Aviser l’employeur par écrit en cas d’admissibilité à un avantage relatif à une automobile réduit
  • Demander à l’ARC l’autorisation de réduire les retenues d’impôt à la source en 2023
  • Passer en revue son portefeuille de placements pour repérer d’éventuelles dispositions permettant de réaliser des gains ou de subir des pertes en 2022 (le dernier jour pour régler une opération en 2022 est le 28 décembre sur les bourses canadiennes et américaines)
  • Faire l’acquisition d’immobilisations pour son entreprise
  • Évaluer la stratégie de rémunération du propriétaire-exploitant (pour obtenir des renseignements supplémentaires, consulter l’article « Planification de fin d’année en matière de rémunération » dans le numéro de décembre 2021 du bulletin Questionsfiscales@EY)
  • Envisager des stratégies de fractionnement du revenu autorisées
Au début de 2023 :
  • Payer les intérêts à l’égard des prêts contractés à des fins de fractionnement du revenu au plus tard le 30 janvier
  • Cotiser à un REER pour 2022 (si ce n’est pas déjà fait) au plus tard le 1er mars
  • Cotiser à un REER pour 2023
  • Cotiser à un CÉLI pour 2023
  • Cotiser à un REEE pour 2023
Un cadre pour la planification fiscale de fin d’année

Il y a deux avantages à effectuer une planification fiscale de fin d’année alors qu’il reste assez de temps dans l’année pour bien la faire.

D’abord, vous avez plus de chance d’éviter, au mois d’avril suivant, les surprises qui peuvent être économiquement et émotionnellement stressantes. Ensuite, si la planification fiscale de fin d’année s’inscrit dans une perspective plus vaste de planification financière et successorale globale, elle peut vous permettre de savoir si vous faites ce qu’il faut de la bonne façon; elle peut non seulement réduire au minimum l’impôt sur le revenu à payer, mais faciliter grandement l’atteinte de vos objectifs financiers à plus long terme.

Demandez-vous comment vous pouvez aborder la planification de cette fin d’année en ayant une perspective d’avenir. En évaluant toute mesure importante prise aujourd’hui pour son incidence sur la planification fiscale, financière et successorale au cours des prochaines étapes de votre vie, vous pouvez éviter des choix qui réduiront la flexibilité de la planification et pourraient augmenter le revenu imposable dans l’avenir.

Vous devriez également déterminer si le montant et/ou la composition de votre revenu changeront considérablement l’an prochain. Les changements dans votre vie personnelle (tels que le changement de votre état matrimonial ou parental) doivent notamment être pris en considération. Cette information pourrait s’avérer importante au moment de choisir et d’élaborer des mesures de planification fiscale particulières.

Planification fondée sur les revenus

Vous devriez bien comprendre la composition de vos revenus d’emploi, d’entreprise ou de profession libérale (salaire, prime, options, revenu d’un travail indépendant, etc.), la façon dont chaque composante est imposée cette année et dont elle le sera au cours des années à venir et la mesure dans laquelle vous pouvez contrôler le moment où vous touchez chaque type de revenu ainsi que le montant.

Les impôts ne constituent qu’un des facteurs à prendre en considération pour décider s’il convient d’entreprendre une certaine planification fondée sur les pertes dans votre portefeuille. Toutefois, il pourrait y avoir des pertes en capital qui peuvent être réalisées et/ou portées en réduction de gains. Vous devriez également comprendre la composition de vos revenus de placement (c’est-à-dire les intérêts, les dividendes et les gains en capital) et la mesure dans laquelle vous pouvez contrôler le moment, la nature et le montant de chaque élément que vous recevrez.

Un autre enjeu de planification fiscale associé aux placements est l’« emplacement des actifs », c’est-à-dire le choix des bons placements à détenir respectivement dans des comptes imposables ou des comptes permettant un report d’impôt. Même de légers ajustements sur ce plan pourraient vous procurer d’importants avantages plus tard.

Planification fondée sur les déductions et les crédits

La question des revenus étant maintenant traitée, penchons-nous sur les déductions. Encore une fois, vous devez comprendre quelles sont les déductions auxquelles vous avez droit, et dans quelle mesure vous pouvez contrôler leur calendrier. Si vous pouvez profiter d’une déduction ou d’un crédit cette année, assurez-vous de payer le montant avant la fin de l’année (ou, dans le cas de cotisations à un REER, avant le 1er mars 2023). De plus, si vous prévoyez être dans une tranche d’imposition supérieure l’an prochain, songez à reporter les déductions à l’année prochaine alors qu’elles vaudront davantage.

Envisagez de passer en revue et de réévaluer les incidences fiscales et financières de vos principaux crédits et déductions. Par exemple, pouvez-vous planifier en vue de réduire au minimum les frais d’intérêts non déductibles ou de les remplacer par des frais d’intérêts déductibles? Ou encore pouvez-vous planifier vos dons de bienfaisance habituels pour maximiser l’avantage fiscal qu’ils procurent? Si vous engagez des frais médicaux importants en 2023, serez-vous en mesure d’utiliser tous les crédits? (Dans la négative, envisagez d’autres options, comme choisir une autre période de 12 mois se terminant dans l’année pour le calcul des frais médicaux, ou faire en sorte que votre conjoint réclame le crédit.)

De plus, si vous songez à faire un don à un enfant adulte, il peut être tout à votre avantage de bien vous préparer. Au Canada, les dons faits à des enfants majeurs sont habituellement reçus en franchise d’impôt, mais il peut en découler des incidences fiscales pour le parent. Par exemple, le don d’une immobilisation peut entraîner un gain en capital imposable pour le parent. Consultez l’article intitulé « Mieux vaut donner que recevoir – Dons libres d’impôt à des enfants majeurs » dans le numéro de novembre 2017 du bulletin Questionsfiscales@EY.

Planification successorale

Votre plan successoral devrait débuter dès que vous commencez à constituer votre patrimoine. Il devrait protéger vos actifs, vous fournir un revenu efficace sur le plan fiscal avant et durant votre retraite et permettre un transfert efficace sur le plan fiscal de votre patrimoine à la génération suivante.

Votre testament est un élément clé de votre plan successoral. Vous et votre époux ou conjoint de fait devriez avoir chacun un testament et le tenir à jour en fonction des changements à votre situation familiale et à votre situation financière ainsi que des modifications de la loi.

N’oubliez pas que les règles relatives à l’impôt sur le revenu fractionné pourraient limiter les stratégies de fractionnement du revenu utilisant des gels successoraux. La révision régulière de vos objectifs en matière de planification successorale et de votre testament est une bonne idée en général, notamment compte tenu de ces règles.

Ces suggestions pour la planification fiscale de fin d’année devraient vous aider à établir les éléments dont il vous faudrait discuter exhaustivement avec votre conseiller en fiscalité cette année et au cours des années à venir.

Pour en savoir plus, consultez la partie 2 de « Poser de meilleures questions de planification fiscale de fin d’année ».

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    1. Le taux d’intérêt prescrit était de 1 % pour les prêts consentis au cours des deux premiers trimestres de 2022. Pour les prêts consentis au cours des troisième et quatrième trimestres de 2022, le taux prescrit a été augmenté pour s’élever respectivement à 2 % et à 3 %. Pour obtenir des renseignements supplémentaires sur la stratégie de prêt au taux prescrit, consultez l’article « Revoyez votre stratégie de prêt au taux prescrit avant le 1er juillet 2022 » paru dans le numéro de juin 2022 du bulletin Questionsfiscales@EY.
    2. Par exemple, un salaire sera raisonnable s’il est comparable à celui qui serait versé à un employé sans lien de dépendance occupant un poste similaire.
    3. Pour obtenir des renseignements supplémentaires sur le REER au profit du conjoint et le fractionnement du revenu de pension, consultez l’article « Vous pensez fractionner votre revenu de retraite? Gardez ces considérations en tête. » paru dans le numéro d’avril 2021 du bulletin Questionsfiscales@EY.
    4. En effet, le crédit d’impôt pour frais médicaux est assujetti à un seuil lié au revenu net. Plus particulièrement, pour 2022, le crédit est offert à l’égard des frais médicaux admissibles qui dépassent le moins élevé des montants suivants : 2 479 $ ou 3 % du revenu net du particulier. Dans le cas du crédit d’impôt pour dons, le montant maximal qui peut être demandé à ce titre est limité à 75 % du revenu net d’un particulier pour l’année (les dons qui dépassent ce seuil peuvent cependant être reportés prospectivement). Les donateurs à revenu élevé peuvent demander un crédit d’impôt fédéral de 33 % à l’égard de la partie des dons supérieurs à 200 $ effectuée à partir du revenu assujetti au taux marginal d’impôt sur le revenu des particuliers fédéral de 33 %.
    5. La déduction accordée aux petites entreprises s’applique à la première tranche de 500 000 $ du revenu provenant d’une entreprise exploitée activement gagné par une SPCC au cours de l’année d’imposition. Ce plafond doit être partagé entre les sociétés associées d’une SPCC. Les provinces et territoires ont leurs propres taux d’imposition des petites entreprises, la plupart des administrations appliquant aussi un plafond des affaires des petites entreprises de 500 000 $. Le taux fédéral d’imposition des petites entreprises est de 9 % en 2022. Au fédéral, le taux général d’imposition des sociétés est de 15 %. Consultez les calculatrices et taux d’impôt d’EY.
    6. Le plafond de cotisation était de 6 000 $ pour 2022, 2021, 2020 et 2019, de 5 500 $ pour 2016, 2017 et 2018, de 10 000 $ pour 2015, de 5 500 $ pour 2013 et 2014, et de 5 000 $ pour chacune des années de 2009 à 2012.
    7. Vous êtes considéré comme un acheteur d’une première habitation si ni vous ni votre époux ou conjoint de fait n’étiez propriétaires d’une habitation vous servant de résidence principale au cours de l’une des cinq années civiles commençant avant la date du retrait.
    8. Le plafond de retrait a augmenté et est passé de 25 000 $ à 35 000 $ pour 2019 et les années suivantes relativement aux montants retirés après le 19 mars 2019. Dans certaines circonstances et sous réserve de certaines conditions, ces modifications permettent également à un particulier d’être de nouveau admissible au RAP après l’échec de son mariage ou de son union de fait, même s’il n’est pas par ailleurs considéré comme un acheteur d’une première habitation. Ces modifications s’appliquent aux retraits effectués après 2019.
    9. Les propositions législatives relatives au compte d’épargne libre d’impôt pour l’achat d’une première propriété ont été publiées par le ministère des Finances le 9 août 2022. Elles devraient être adoptées avant la fin de 2022.
    10. Pour obtenir des renseignements supplémentaires, consultez l’article « Stimulez l’épargne-études en cotisant à un REEE en fin d’année » paru dans le numéro de novembre 2019 du bulletin Questionsfiscales@EY.
    11. Depuis juillet 2022, les paiements de l’incitatif à agir pour le climat sont versés chaque trimestre par le gouvernement dans le cadre du système de prestations, au lieu d’être versés comme un crédit d’impôt remboursable à la production de la déclaration de revenus des particuliers. Toutefois, pour être admissible, vous devez produire votre déclaration de revenus des particuliers pour l’année d’imposition précédant l’année de référence.
    12. Selon la méthode de l’année courante, qui permet de verser des acomptes provisionnels selon le montant estimatif de l’impôt à payer pour l’année, les acomptes provisionnels doivent être effectués sous la forme de quatre versements égaux en mars, en juin, en septembre et en décembre. Par conséquent, si vous décidez de passer à la méthode de l’année courante vers la fin de l’année, il est important de veiller à ce que vos versements de mars et de juin demeurent suffisants (c.-à-d. qu’ils correspondent chacun au quart du montant estimatif de votre impôt à payer pour l’année) afin d’éviter de payer des intérêts. Il est aussi à noter que le taux d’intérêt prescrit qui s’applique aux versements insuffisants a été augmenté : il est passé de 5 % aux deux premiers trimestres de 2022 à 6 % au troisième trimestre et à 7 % au quatrième trimestre de 2022.

  

(Chapter breaker)
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Chapitre 2

Instauration de la notion de « SPCC en substance »

 

Michelle Fineberg et Matthew Mammola, Toronto

Le budget fédéral de 2022 a instauré la notion de « SPCC en substance » pour empêcher une société privée sous contrôle canadien (« SPCC ») de perdre artificiellement son statut de SPCC avant de réaliser un revenu passif substantiel qui serait par ailleurs assujetti à la partie remboursable de l’impôt de la partie I.

Ces règles devraient normalement s’appliquer aux années d’imposition qui se terminent le 7 avril 2022 ou après. Pour tenir compte des véritables opérations commerciales, une règle de droits acquis restreinte s’appliquera de manière que les mesures proposées n’aient aucune incidence sur les opérations conclues en vertu d’une convention d’achat-vente écrite avec un acquéreur sans lien de dépendance avant le 7 avril 2022. Cette exception s’appliquera seulement aux opérations closes avant la fin de 2022.

Le 9 août 2022, le gouvernement fédéral a publié des propositions législatives qui visent, entre autres, des mesures annoncées dans le budget fédéral de 20221.

Contexte

De façon générale, la Loi de l’impôt sur le revenu (la « LIR ») définit une SPCC comme une société privée qui est une société canadienne, à l’exception d’une société publique ou d’une société contrôlée par une ou plusieurs personnes non-résidentes ou sociétés publiques2.

Les sociétés qui sont des SPCC tout au long d’une année d’imposition sont tenues de payer la partie remboursable de l’impôt de la partie I sur leur revenu passif – comme les intérêts, les dividendes, les redevances et les gains en capital imposables – pour l’année d’imposition3.

L’impôt supplémentaire de la partie I remboursable applicable au revenu de placement gagné par une SPCC est de 10,67 %. Ainsi, le taux fédéral applicable au revenu de placement gagné par une SPCC est de 38,67 % (le taux d’imposition de base des sociétés de 38 %, moins l’abattement de l’impôt fédéral de 10 %, plus l’impôt supplémentaire de la partie I remboursable de 10,67 %).

Par exemple, en Ontario, cela équivaudrait à un taux d’imposition de 50,17 % (le taux fédéral de 38,67 % plus le taux général d’imposition de l’Ontario de 11,5 %) duquel 30,67 % sont remboursables au versement de dividendes imposables4, sous réserve de certaines restrictions relatives aux types de dividendes versés en fonction du solde disponible des comptes d’impôt en main remboursable au titre de dividendes (le solde du compte d’impôt en main remboursable au titre de dividendes non déterminés (« IMRTDND »)) par rapport à celui du compte d’impôt en main remboursable au titre de dividendes déterminés (« IMRTDD »)5. En comparaison, une société privée qui n’est pas une SPCC tout au long d’une année d’imposition serait assujettie à un taux d’imposition de 26,5 % sur le revenu passif gagné pour l’année en Ontario.

Pour obtenir des renseignements supplémentaires sur les taux d’impôt sur le revenu fédéral-provincial/territorial combinés applicables au revenu tiré d’une entreprise exploitée activement et au revenu passif gagné par une société, consultez les cartes des taux d’impôt sur le revenu des sociétés applicables respectivement au revenu tiré d’une entreprise exploitée activement et au revenu de placement d’EY. Lorsque les fonds sont conservés au sein de la société, un avantage lié au report d’impôt peut être obtenu en gagnant ce revenu dans une société qui n’est pas une SPCC.

Dans ce contexte, les sociétés ont cherché à perdre leur statut de SPCC avant de réaliser un revenu passif afin d’éviter la perception de la partie remboursable de l’impôt de la partie I et de tirer parti de l’avantage lié au report d’impôt. Une façon d’y arriver consistait à déplacer une société dans un pays étranger, habituellement un pays offrant des taux d’imposition préférentiels, le cas échéant. La société demeurait résidente du Canada aux fins de l’impôt, en gardant la gestion centrale et le contrôle au Canada. Toutefois, comme la société n’était plus une société canadienne, elle ne correspondait plus à la définition de SPCC. Sans raison commerciale pour justifier ce déplacement, le statut de SPCC peut être considéré comme artificiellement perdu en vue de tirer parti d’un avantage lié au report d’impôt.

Selon la loi actuelle, l’ARC peut contester la manipulation du statut de SPCC en invoquant la règle générale anti-évitement. Néanmoins, le gouvernement a décidé d’adopter des mesures ciblées pour contrer ce genre de stratégie.

Les propositions

Suivant la définition figurant dans les propositions législatives, une SPCC en substance est une société privée, autre qu’une SPCC, qui, à un moment quelconque d’une année d’imposition, est soit contrôlée, directement ou indirectement, de quelque manière que ce soit, par un ou plusieurs particuliers résidant au Canada, soit, si chaque action du capital-actions d’une société appartenant à un particulier résidant au Canada appartenait à un particulier donné, serait contrôlée par ce dernier6.

Prenons, par exemple, le cas d’une société publique, Pub inc., qui obtient le droit d’acquérir les actions d’une SPCC, Cible. En raison de l’application de règles spéciales de la LIR7, la signature d’une convention d’achat-vente ayant force exécutoire avant la date de clôture où Pub inc. obtient effectivement le droit d’acquérir les actions de Cible peut entraîner un changement de statut de Cible avant la clôture de l’opération. Par conséquent, à ce moment, Cible perdra son statut de SPCC8, mais deviendra une SPCC en substance. Lorsque le droit d’acquérir les actions sera exercé, Cible deviendra une société contrôlée par une société publique et cessera d’être une société privée. Cible ne sera alors plus une SPCC en substance et sera considérée comme une véritable société qui n’est pas une SPCC9.

Les propositions législatives contiennent aussi des dispositions anti-évitement visant les contribuables qui tenteraient de contourner le statut de SPCC en substance10.

Le revenu passif gagné par une société qui est une SPCC en substance à un moment quelconque11 d’une année d’imposition sera assujetti à la partie remboursable de l’impôt de la partie I de la même manière que le serait celui d’une SPCC. Les propositions législatives suppriment ainsi l’incitatif pouvant pousser une société à perdre son statut de SPCC pour tirer parti d’un report d’impôt sur son revenu de placement.

Comme il n’y a aucun critère d’objet pour l’application de la nouvelle définition de SPCC en substance, les nouvelles règles auront une vaste portée et auront sans doute une incidence sur des opérations légitimes avec des tiers. Dans certaines opérations, il y aura, pour diverses raisons commerciales, un intervalle entre la signature et la clôture d’une convention d’achat-vente.

Lorsque l’acheteur est un non-résident ou une société publique, comme dans l’exemple précédent, l’entité cible cessera d’être une SPCC à la signature de la convention. Dans un tel cas, l’entité cible aurait peut-être pu utiliser l’alinéa 111(4)e) de la LIR12 pour réaliser sur son immobilisation un gain qui n’aurait alors plus été assujetti à la partie remboursable de l’impôt de la partie I13. Les attributs fiscaux découlant du gain (le compte de dividendes en capital et le revenu protégé) auraient alors pu être utilisés pour augmenter le prix de base des actions de l’entité cible.

L’alinéa 111(4)e) de la LIR peut encore être utilisé dans certains cas, notamment lorsque l’entité cible a un solde de pertes dont l’utilisation serait autrement restreinte à la suite d’un fait lié à la restriction de pertes (c.-à-d. une acquisition de contrôle)14. Dans ce cas, l’entité cible pourrait désigner une immobilisation pour donner lieu à un gain en capital avant que le fait lié à la restriction de pertes se produise. Dans la mesure où le solde de pertes couvre le montant du gain, il peut être porté en réduction du gain, de sorte qu’il n’y aura aucun impôt à payer, ce qui vaut notamment pour la partie remboursable de l’impôt de la partie I. Par suite de la désignation, le prix de base de l’actif ou des actifs désignés par l’entité cible sera plus élevé.

À toutes les autres fins de la LIR, une SPCC en substance n’est pas considérée comme une SPCC. Par exemple, le régime de compte de revenu à taux réduit (le « CRTR ») s’appliquera à une SPCC en substance et le revenu passif gagné sera ajouté au CRTR15 de la société. Comme dans le cas d’une société qui n’est pas une SPCC, les dividendes imposables versés par une SPCC en substance doivent d’abord être des dividendes non déterminés jusqu’à concurrence du solde du CRTR avant que des dividendes déterminés puissent être versés. En outre, la période d’imposition d’une SPCC en substance sera frappée de prescription après quatre ans au lieu de la période de trois ans qui s’applique à une SPCC.

Conclusion

Les modifications proposées peuvent avoir d’importantes répercussions pour les SPCC existantes ainsi que pour les sociétés qui ont été déplacées dans un pays étranger. Pour ces dernières, il faudra se demander s’il convient de conserver cette structure. Pour obtenir des renseignements supplémentaires sur ces propositions et leur incidence possible, veuillez consulter votre conseiller en fiscalité EY.

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    1. Les parties intéressées étaient invitées à faire parvenir leurs commentaires sur les propositions législatives jusqu’au 30 septembre 2022, de sorte que les propositions décrites dans le présent article pourraient faire l’objet de modifications ultérieures avant d’être déposées dans le cadre d’un projet de loi. Pour obtenir des renseignements supplémentaires sur les propositions, consultez le bulletin FiscAlerte 2022 numéro 37, Le ministère des Finances publie des propositions législatives visant des mesures en suspens du budget de 2022, d’EY.
    2. Paragraphe 125(7) de la LIR.
    3. Article 123.3 de la LIR.
    4. Un montant s’élevant à 30,67 % du revenu de placement est ajouté au compte d’impôt en main remboursable au titre de dividendes non déterminés de la SPCC. L’impôt supplémentaire remboursable ainsi qu’une partie de l’impôt de la partie I normal payé sur le revenu de placement sont remboursables à la SPCC à concurrence de 38,33 % des dividendes imposables (autres que des dividendes déterminés) versés dans l’année.
    5. De façon générale, l’IMRTDND comprend les montants d’impôt remboursable payés par une SPCC en vertu de la partie I de la LIR sur le revenu de placement, de même que l’impôt de la partie IV payé pour l’année d’imposition, déduction faite du total de l’impôt de la partie IV ajouté au compte d’IMRTDD de la société privée. Habituellement, le compte d’IMRTDD est constitué des montants d’impôt remboursable payés en vertu de la partie IV de la LIR à l’égard des dividendes de portefeuille déterminés reçus de sociétés non rattachées, ainsi que de l’impôt de la partie IV payé par une société privée sur les dividendes intersociétés déterminés ou non déterminés reçus de sociétés rattachées, dans la mesure où ces dividendes font en sorte que la société payant un dividende touche un remboursement au titre de dividendes provenant de son propre compte d’IMRTDD. Pour obtenir des renseignements supplémentaires sur ces règles, consultez l’article « Le budget fédéral propose une révision du régime d’impôt remboursable applicable au revenu de placement passif » paru dans le numéro de juin 2018 du bulletin Questionsfiscales@EY.
    6. Définition de « SPCC en substance » au paragraphe 248(1) de la LIR selon les propositions législatives du 9 août 2022.
    7. Alinéa 251(5)b) de la LIR.
    8. En vertu du paragraphe 249(3.1) de la LIR, il y aura une fin d’année réputée immédiatement avant le changement de statut.
    9. Notes explicatives sur les propositions législatives du 9 août 2022.
    10. Projet de paragraphe 248(42) de la LIR.
    11. Cet élément est différent de ce qu’on trouve à la définition de SPCC, qui exige qu’une société soit une SPCC tout au long d’une année d’imposition pour l’application de certaines dispositions.
    12. L’alinéa 111(4)e) de la LIR permet à certains contribuables d’utiliser des pertes en capital qui expireraient par ailleurs lors d’un fait lié à la restriction de pertes, comme une acquisition de contrôle. Une société peut désigner un produit de disposition pour donner lieu à un gain en capital sur une immobilisation qui est admissible et qui lui appartenait immédiatement avant le fait lié à la restriction de pertes. Le produit de disposition désigné doit être un montant qui se situe entre le prix de base rajusté du bien et sa juste valeur marchande. Le bien est alors réputé avoir été de nouveau acquis à un coût correspondant au montant du produit de disposition désigné.
    13. La société ne serait plus assujettie à la partie remboursable de l’impôt de la partie I, car elle n’était pas une SPCC tout au long de l’année d’imposition dans laquelle le fait lié à la restriction de pertes a déclenché la fin de l’année d’imposition (en vertu du paragraphe 249(4) de la LIR), c.-à-d. l’année d’imposition commençant après le changement de statut et se terminant immédiatement avant le fait lié à la restriction de pertes.
    14. Un fait lié à la restriction de pertes crée une barrière qui empêche le report prospectif ou rétrospectif normal de pertes et d’autres déductions fiscales. De façon générale, les pertes autres qu’en capital reportées prospectivement ne peuvent être déduites que si l’entreprise à laquelle elles se rapportent est exploitée avec une attente raisonnable de profit tout au long de l’année d’imposition dans laquelle il est prévu d’utiliser ces pertes. De plus, les pertes autres qu’en capital reportées prospectivement ne peuvent généralement être déduites qu’à hauteur du revenu provenant de la même entreprise ou d’une entreprise semblable. Les pertes en capital nettes expirent lors d’un fait lié à la restriction de pertes; par conséquent, elles ne peuvent pas être reportées prospectivement ou rétrospectivement après une acquisition de contrôle.
    15. Le solde du CRTR d’une société est habituellement constitué de revenu ayant été imposé à des taux préférentiels. Une société qui n’est pas une SPCC peut habituellement verser des dividendes déterminés lorsque le solde de son CRTR est à zéro. Si son CRTR affiche un solde, des dividendes non déterminés doivent d’abord être versés pour ramener ce solde à zéro. Quand le CRTR se retrouve entre les mains d’un particulier actionnaire, un dividende déterminé est assujetti à un taux d’imposition des particuliers inférieur à celui applicable à un dividende non déterminé. Pour obtenir des renseignements supplémentaires sur les taux d’impôt sur le revenu fédéral-provincial/territorial combinés des particuliers, consultez les calculatrices impôt personnel et les cartes des taux d’impôt des particuliers d’EY.

  

(Chapter breaker)
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Chapitre 3

La CAF statue qu’un restaurant doit payer des cotisations au RPC et à l’assurance-emploi à l’égard de pourboires versés électroniquement

Ristorante a Mano Limited v. Canada (National Revenue), 2022 FCA 151

Gael Melville, Vancouver, et Winnie Szeto, Toronto

Cette affaire portait sur le système utilisé par le restaurant en cause pour traiter les pourboires versés électroniquement par ses clients. L’Agence du revenu du Canada (l’« ARC ») a établi une cotisation à l’égard du restaurant et a jugé que les pourboires donnaient lieu à une obligation de verser des cotisations au Régime de pensions du Canada (« RPC ») et à l’assurance-emploi. La Cour canadienne de l’impôt (la « CCI ») et la Cour d’appel fédérale (la « CAF ») ont toutes les deux statué que les pourboires électroniques constituaient dans les faits un revenu provenant de l’emploi du serveur, versé par l’employeur, ce qui donnait lieu à une obligation de verser des cotisations au RPC et à l’assurance-emploi.

Dispositions législatives pertinentes

Le RPC et l’assurance-emploi sont des programmes de sécurité sociale contributifs administrés conjointement par l’ARC et Emploi et Développement social Canada. L’employeur doit retenir à la source puis verser à l’ARC les cotisations des employés, en plus de verser sa part des cotisations à titre d’employeur.

Dans le cadre du RPC, l’employeur doit payer des cotisations pour toute année au cours de laquelle est payée à l’employé une rémunération à l’égard d’un emploi ouvrant droit à pension1. De même, dans le cadre de l’assurance-emploi, la cotisation que doit verser un employeur est calculée en fonction de la rémunération assurable de l’employé, laquelle est fondée sur les montants versés à l’employé à l’égard d’un emploi assurable2.

Contexte et faits

L’employeur avait mis en place un système quelque peu complexe pour gérer les pourboires des serveurs. Le système tenait compte du fait que certains clients payaient leur facture entièrement en espèces, alors que d’autres payaient électroniquement. Les serveurs conservaient tous les paiements en espèces.

À la fin de chaque quart de travail, chaque serveur préparait une feuille de caisse indiquant le total des pourboires électroniques versés par carte de crédit ou de débit, ainsi que le montant en espèces reçu pour le paiement des factures. L’employeur conservait un petit pourcentage des pourboires afin de le redistribuer à son personnel de cuisine et de couvrir les frais de traitement. Le montant restant des pourboires électroniques (moins les paiements en espèces conservés par le serveur), appelé « remboursement », était remis au serveur concerné le lendemain par virement électronique. À la fin de chaque quart, les serveurs devaient également « remettre à même les pourboires reçus » un montant en espèces au personnel de gestion et au personnel de soutien.

L’appel portait seulement sur le traitement des remboursements remis aux serveurs, et non sur le traitement des pourboires en espèces ou des montants remis à même les pourboires reçus.

En 2015, 2016 et 2017, l’employeur n’avait pas inclus les pourboires électroniques dans le calcul des traitement et salaire ouvrant droit à pension aux fins du RPC ou de la rémunération assurable aux fins de l’assurance-emploi. L’ARC a établi une cotisation à l’égard de l’employeur en considérant que les remboursements étaient des montants versés aux serveurs à l’égard de leur emploi. Par conséquent, les remboursements constituaient des traitement et salaire cotisables aux fins du RPC et une rémunération assurable aux fins de l’assurance-emploi.

L’employeur a interjeté appel devant la CCI.

Décision de la CCI

La CCI a passé en revue la jurisprudence pertinente et a établi que le critère applicable consistait à déterminer si c’était l’employeur qui avait payé les pourboires aux serveurs3. Le mot « payé » devait être interprété de façon libérale. Comme les pourboires avaient été versés au restaurant par voie électronique, ils n’avaient pas été versés auparavant aux serveurs ou n’avaient pas été en leur possession. Ainsi, les remboursements constituaient des traitement et salaire cotisables de l’employé, versés par l’employeur, aux fins du RPC et une rémunération admissible aux fins de l’assurance-emploi.

L’employeur a interjeté appel devant la CAF.

Analyse de la CAF

Les deux principales questions soulevées par l’employeur dans le cadre de l’appel étaient celles de savoir si les remboursements avaient été versés à l’égard de l’emploi d’un serveur et si les remboursements avaient été payés par l’employeur. Pour que l’appel de l’employeur soit accueilli, il fallait qu’il soit répondu par la négative à l’une de ces questions.

L’employeur a fait valoir que les remboursements n’étaient pas versés à l’égard de l’emploi d’un serveur, puisqu’ils représentaient simplement la différence entre les espèces reçues et les pourboires électroniques devant être remis aux serveurs. Les remboursements n’étaient pas calculés en fonction des heures travaillées ou des ventes effectuées par le serveur; leur montant dépendait plutôt simplement du fait que les clients aient payé leur facture en espèces ou par voie électronique.

Toutefois, la CAF a déterminé que, si ce n’était de l’emploi des serveurs auprès de l’employeur, les serveurs n’auraient pas reçu les remboursements. La loi n’exige pas qu’un montant soit calculé d’une façon particulière – par exemple en fonction des heures travaillées – pour qu’il soit versé « à l’égard » d’un emploi. Le seul critère à respecter est celui voulant que le montant soit reçu à l’égard de l’emploi, ou par rapport à l’emploi, et la CAF était d’avis que les remboursements respectaient ce critère.

L’autre question soulevée par l’employeur était celle de savoir s’il était réellement celui qui payait les remboursements ou si, comme il l’affirmait, il ne faisait que convertir les pourboires électroniques en espèces pour ensuite les remettre aux employés. La CAF a examiné la jurisprudence pertinente, particulièrement les arrêts de principe Canadien Pacifique et Lake City Casinos4. Dans l’arrêt Canadien Pacifique, la Cour suprême du Canada a statué que le mot « payer » peut signifier une simple distribution par l’employeur. De même, dans l’arrêt Lake City Casinos, la CAF a statué qu’un sens large doit être attribué à ce mot. Plus précisément, la CAF a indiqué que, pour avoir gain de cause, l’ARC devait démontrer que l’employeur avait eu les pourboires en sa possession et les avait ensuite remis aux employés.

L’employeur a fait valoir que les décisions antérieures pouvaient être classées en deux catégories, soit les affaires portant sur la distribution et les affaires portant sur la conversion. Dans les affaires portant sur la distribution, les employeurs avaient reçu les pourboires, puis avaient décidé de la façon dont ils seraient distribués aux employés. Dans les affaires portant sur la conversion, les employeurs n’avaient eu aucun pourboire en espèces en leur possession et avaient simplement converti les pourboires électroniques en espèces pour ensuite les remettre aux employés. Les employeurs dans les affaires portant sur la distribution avaient été tenus de verser des cotisations au RPC et à l’assurance-emploi à l’égard de ces pourboires, contrairement aux employeurs dans les affaires portant sur la conversion. L’employeur a fait valoir que son affaire portait sur la conversion et qu’il n’était donc pas tenu de verser des cotisations au RPC et à l’assurance-emploi à l’égard des remboursements.

Dans son analyse, la CAF a rejeté les distinctions faites par l’employeur entre son cas et les affaires portant sur la distribution. Dans ses arguments, l’employeur avait mis l’accent sur le fait que, dans son cas, par exemple, les pourboires n’étaient pas mis en commun et qu’il ne prenait pas possession des pourboires en espèces.

Toutefois, la CAF a jugé que les affaires portant sur la distribution n’avaient pas été tranchées en fonction de ces facteurs. Selon la CAF, la CCI avait correctement déterminé que le critère à appliquer était celui de savoir si c’était l’employeur qui avait payé les pourboires aux serveurs, le mot « payé » devant faire l’objet d’une interprétation libérale.

La CAF n’a relevé aucune erreur dans l’application par la CCI du critère pertinent aux faits de l’affaire. Comme il a été mentionné, la CCI a conclu que l’employeur avait payé les pourboires aux serveurs, puisque l’employeur avait d’abord eu les pourboires en sa possession, puis les avait distribués aux serveurs. Autrement dit, les serveurs n’avaient jamais eu les pourboires en leur possession avant la distribution.

Leçons tirées

Les paiements se font de plus en plus par voie électronique, plutôt qu’en espèces. Les employeurs doivent donc connaître les possibles conséquences de toute politique qu’ils mettent en place pour gérer la distribution des pourboires aux employés. Dans l’arrêt Ristorante a Mano, la CAF a clairement fait savoir que le mot « payé » doit être interprété de façon libérale, et il a par conséquent été statué que les remboursements donnaient lieu à une obligation de l’employeur de verser des cotisations au RPC et à l’assurance-emploi. La CAF n’a pas semblé disposée à reconnaître les facteurs que l’employeur jugeait pertinents pour faire la distinction entre les affaires portant sur la distribution et celles portant sur la conversion.

Il reste à voir si l’interprétation large du mot « payé » pourrait s’appliquer lorsqu’un pourboire est versé électroniquement à l’employeur et que le montant complet est remis au serveur.

  • Afficher les références des articles# 
    1. Paragraphe 9(1) du Régime de pensions du Canada.
    2. Articles 67 et 68 de la Loi sur l’assurance-emploi et paragraphe 2(1) du Règlement sur la rémunération assurable et la perception des cotisations.
    3. Ristorante A Mano Limited c. M.R.N., 2021 CCI 22.
    4. Canadien Pacifique Ltée c. P.G. (Can.), [1986] 1 RCS 678, et Lake City Casinos Limited c. M.R.N., 2006 CCI 225 (confirmée par 2007 CAF 100).

  

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Chapitre 4

Les bulletins FiscAlerte – Canada récents

Nos bulletins FiscAlerte traitent des nouvelles, événements et changements législatifs de nature fiscale touchant les entreprises canadiennes. Ils présentent des analyses techniques sommaires vous permettant de rester bien au fait de l’actualité fiscale.

Résumé

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