Le ruban adhésif permet de tout réparer

Série sur les impératifs des chefs de la direction

Préparez‑vous dès maintenant à la nouvelle ère de la mondialisation sélective

Les chefs de la direction et les conseils d’administration doivent revoir leurs stratégies d’affaires existantes et remettre en question les hypothèses géopolitiques implicites qui les sous‑tendent.


En bref

  • La situation géopolitique a changé de façon radicale et les perspectives de l’environnement opérationnel mondial demeurent incertaines.
  • L’analyse de scénarios à l’échelle mondiale révèle que la situation géopolitique, les politiques économiques et les stratégies des entreprises suivent des voies divergentes dans différents secteurs.
  • Les chefs d’entreprise et les conseils d’administration devraient utiliser l’analyse de scénarios en vue de positionner stratégiquement leur entreprise pour qu’elle puisse prospérer pendant les périodes de turbulences à venir.

Dans le plus récent  sondage réalisé auprès des chefs de la direction en janvier 2024 (PDF), presque tous les chefs de la direction, soit 98 %, prévoyaient modifier leurs plans d’investissement stratégique en raison des défis géopolitiques. Au cours des dernières années, la guerre en Ukraine, le conflit au Moyen‑Orient et la réorganisation des systèmes d’alliances mondiales ont contribué à une volatilité géopolitique accrue. Et le supercycle électoral mondial de 2024, au cours duquel les électeurs représentant plus de 50 % de la population mondiale se rendront aux urnes, accroîtra les incertitudes géopolitiques, politiques et réglementaires. Bien que le contexte opérationnel mondial ne soit jamais statique, ce niveau de disruption géopolitique pose des défis importants aux entreprises internationales. 

Les événements récents ont accéléré le virage vers un monde multipolaire. Mais rien ne garantit que cette trajectoire se poursuivra. La disruption et la volatilité géopolitiques devraient persister, ce qui aura également une incidence sur la croissance économique mondiale et l’inflation. En effet, de multiples forces disruptives façonnent l’environnement opérationnel mondial, y compris les changements climatiques, l’innovation technologique, les changements démographiques et l’influence croissante d’acteurs non étatiques. Cela crée des perspectives très incertaines pour l’avenir de la mondialisation.

Pour faire face à cette incertitude géopolitique, il est nécessaire de procéder à une analyse de scénarios, c’est‑à‑dire à l’exploration systématique de plusieurs avenirs envisageables. En élaborant la stratégie de leur entreprise, les chefs d’entreprise ne doivent pas se fier à une seule série de prévisions sur les perspectives de la mondialisation, car elles peuvent se révéler erronées. Ils devraient plutôt évaluer les incidences commerciales possibles et les impératifs stratégiques de plusieurs environnements opérationnels mondiaux alternatifs, plutôt que d’essayer de prédire un résultat précis. 

En septembre 2022, dans le cadre de la série sur les impératifs des chefs de la direction, qui porte sur des questions et des mesures cruciales pour aider les chefs de la direction à redéfinir l’avenir de leur organisation, l’équipe du Groupe Activités géostratégiques d’EY‑Parthenon a analysé la dynamique géopolitique afin d’explorer les scénarios susceptibles d’émerger au cours des cinq prochaines années. Maintenant, un an et demi plus tard, l’équipe a réévalué cette analyse. La conclusion? Jusqu’à présent, ces scénarios ont résisté au temps et restent vraisemblables pour l’évolution de la mondialisation. 

L’analyse d’EY‑Parthenon a relevé deux grandes incertitudes qui sont les principaux facteurs du contexte opérationnel mondial futur :

  • Relations géopolitiques
    Cette grande incertitude s’articule autour de la question cruciale de savoir si l’environnement géopolitique sera défini par des alliances souples ou par des blocs distincts. La réponse dépendra en grande partie de l’issue de la guerre en Ukraine et du positionnement géopolitique de la Chine. Les politiques des États‑Unis et de l’Union européenne joueront également un rôle crucial, notamment en ce qui concerne la force et la cohésion des relations transatlantiques. De plus, les politiques étrangères de divers États pivots géopolitiques, dont l’Inde, l’Arabie saoudite, la Turquie et le Brésil, contribueront à façonner les relations géopolitiques futures.

  • Position en matière de politique économique
    Les gouvernements interviennent de plus en plus dans leur économie nationale. La deuxième grande incertitude est de savoir si les pays continueront de favoriser une telle concurrence nationaliste ou si leurs politiques économiques se tourneront vers une libéralisation plus internationaliste. Cela dépendra de la mesure dans laquelle les gouvernements adopteront des politiques industrielles et élargiront le nombre de secteurs qu’ils considèrent comme stratégiques à l’échelle nationale. Ces décisions politiques seront, à leur tour, dictées par divers facteurs, notamment la sécurité énergétique, les répercussions des changements climatiques et la vigueur de la croissance économique.

Après avoir identifié les relations géopolitiques et les positions des pays en matière de politique économique comme les deux grandes incertitudes stratégiques mondiales d’aujourd’hui, nous nous sommes concentrés sur quatre scénarios vraisemblables pour l’avenir de la mondialisation, fondés sur le recoupement de ces questions.

  • La « priorité à l’autonomie » résulterait du déclin des alliances et d’une faible croissance économique qui pousseraient les pays à promouvoir les productions nationales et à tenter d’être plus autosuffisants.
  • La « deuxième guerre froide », quant à elle, résulterait d’un renforcement des alliances et d’une concurrence idéologique combinée à des politiques économiques nationalistes étatistes.
  • L’approche axée sur « les amis d’abord » est également caractérisée par de fortes alliances géopolitiques, mais le commerce et le capital circulent relativement librement entre les alliés, ce qui amène les entreprises à faire de « l’amilocalisation », des principales activités d’exploitation et des chaînes d’approvisionnement.
  • La « mondialisation allégée » fait référence à un contexte opérationnel plutôt libéralisé et mondialisé avec moins de tensions géopolitiques.

Source : Réseau mondial EY


De la fin de la guerre froide, au début des années 1990, jusqu’à récemment, le contexte opérationnel mondial se situait dans le quadrant correspondant à notre scénario de mondialisation allégée. Dans les années 1990 et au début des années 2000, le monde s’est tourné vers une mondialisation complète, puis a commencé à se refermer sur lui‑même à la suite de la crise financière mondiale de 2008‑2009. Mais les récents chocs systémiques ont créé une dynamique importante vers un scénario de deuxième guerre froide et contre une mondialisation plus ouverte. Les mesures prises par les gouvernements en réponse à la pandémie de COVID‑19 ont entraîné un changement immédiat vers des politiques plus nationalistes et étatiques. Et, au fil du temps, une plus grande cohésion s’est développée au sein des systèmes d’alliances. La guerre en Ukraine a provoqué un glissement spectaculaire en faveur de blocs géopolitiques plus distincts et de politiques économiques plus étatiques, même si celles‑ci visent des produits et des secteurs considérés par les gouvernements comme stratégiques pour la sécurité nationale, au sens large.

Cette différenciation fait ressortir une mise à jour essentielle de l’analyse du scénario de l’avenir de la mondialisation depuis son lancement il y a 18 mois : les trajectoires divergentes des différents secteurs composant la matrice. Plus un secteur est considéré comme stratégique par le gouvernement, plus les gouvernements cherchent à réduire les risques liés aux chaînes d’approvisionnement et à la production dans ce secteur. De telles politiques de sécurité économique pousseront les secteurs les plus stratégiques vers un scénario de deuxième guerre froide, tandis que les secteurs moins stratégiques s’orienteront vers un environnement opérationnel de type « les amis d’abord ». Par conséquent, nous semblons entrer dans une nouvelle ère de mondialisation sélective ou, dans certains cas, de démondialisation sélective.

Source : Réseau mondial EY


Bien que la tendance récente semble aller dans le sens d’une deuxième guerre froide ou vers « les amis d’abord », des événements à court et à moyen terme pourraient faire dévier la trajectoire vers un tout autre scénario. Des politiciens plus isolationnistes remportant les élections dans le cadre d’un supercycle électoral mondial ou une détérioration des alliances pourraient conduire à un tournant vers l’autonomie. Et la prolifération d’accords commerciaux régionaux pourrait entraîner un virage plus généralisé vers « les amis d’abord ». Des chocs plus percutants, comme une fin négociée aux conflits en cours et une forte reprise économique mondiale, pourraient même inverser la tendance récente et ramener le monde vers une mondialisation allégée.

 

Bien entendu, l’avenir de la mondialisation pourrait se situer quelque part entre ces deux scénarios. Ou encore, la mondialisation pourrait évoluer de manière plus extrême au cours des cinq prochaines années. Par exemple, elle pourrait être détournée par le fait que le monde bascule vers un conflit militaire à grande échelle entre les grandes puissances (c’est‑à‑dire une « guerre chaude »). Diverses tensions actuelles rendent possibles de tels scénarios. Mais nous ne les considérons pas comme étant aussi probables que les scénarios plus modérés décrits ici.

 

L’examen de notre série de quatre scénarios peut aider les chefs d’entreprise à structurer l’incertitude à laquelle ils sont confrontés, puis à analyser les conséquences possibles et à s’y préparer d’une manière plus stratégique. Afin d’aider les chefs d’entreprise et les conseils d’administration à évaluer comment ils pourraient être amenés à réviser leur stratégie d’entreprise pour l’adapter à l’environnement opérationnel mondial futur, nous examinons chaque scénario plus en détail ci‑après. Les scénarios sont présentés selon un ordre allant de l’environnement politique le plus restrictif au moins restrictif pour les entreprises internationales.

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Chapitre 1

Priorité à l’autonomie

La priorité à l’autonomie partout dans le monde crée divers défis pour les entreprises internationales dans un contexte d’isolationnisme.

La priorité à l’autonomie offre une réédition des années 1930, mais avec un plus grand isolationnisme. Les alliances qui s’effritent créent un environnement géopolitique plus volatil; les raisons économiques et sécuritaires sont confondues; le nationalisme et le populisme sont ascendants; et de nombreux dirigeants nationaux se détournent des alliances et des engagements internationaux.

Les décideurs politiques veulent atteindre une autonomie des productions nationales et une sécurité économique, malgré les coûts élevés. La politique industrielle, le protectionnisme et les contrôles des exportations sont adoptés, tandis que les efforts antitrust s’affaiblissent pour créer des champions nationaux dans un ensemble de plus en plus large de secteurs géostratégiques, allant de la technologie et de l’énergie aux sciences de la vie et à l’agroalimentaire.

Les politiques isolationnistes entraînent la hausse de la volatilité du commerce, donnant naissance à des perspectives de croissance économique modérées et instables. Les politiques nationalistes, y compris les barrières commerciales, les contrôles de prix et autres mesures restrictives, favorisent l’inflation du prix du carburant. L’isolationnisme, une progression technologique plus faible et la hausse des risques de conflit limitent les investissements des entreprises et la croissance de la productivité.

Ce contexte de croissance modérée et de faible innovation entraîne une frustration de la population à l’égard de la stagnation du niveau de vie. Cela entraîne à son tour une plus grande instabilité politique et un isolement international. Le commerce mondial et les flux de capitaux diminuent à mesure que les pays mettent en place des chaînes d’approvisionnement et des secteurs stratégiques locaux. Les économies se morcellent en enclaves axées sur le marché intérieur, limitant la croissance et les possibilités d’investissement. Bien que les entreprises des marchés plus importants puissent avoir suffisamment de possibilités de croissance, celles des marchés plus petits se heurtent à des obstacles.

Un monde où la priorité est axée sur l’autonomie pose divers défis aux entreprises internationales, dont les suivants :

  • Revenus
    Les secteurs géostratégiques offrent quelques possibilités de croissance, mais la plupart des entreprises sont confrontées à une progression plus modeste, à une inflation plus élevée et à une diminution de leur potentiel de revenus.

  • Croissance et investissements
    Les fusions et acquisitions et les autres possibilités d’investissement sont essentiellement limitées aux marchés nationaux, ce qui freine la croissance des entreprises.

  • Exploitation et chaînes d’approvisionnement
    Les politiques protectionnistes, ainsi que le manque de coordination mondiale au sujet des changements climatiques, rendent les chaînes d’approvisionnement transfrontalières plus coûteuses et plus difficiles à gérer.

  • Données et propriété intellectuelle
    Les mesures commerciales protectionnistes, les politiques industrielles et les règles de protection des données personnelles restreignent les flux de données transfrontaliers et limitent l’innovation mondiale.

  • Capital humain
    Le nationalisme exacerbé conduit la plupart des pays à limiter les migrations internationales, entraînant des pénuries de main‑d’œuvre et une hausse des coûts liés aux talents dans de nombreux marchés.

  • Finance et fiscalité
    Les taux d’imposition peuvent augmenter dans le but de financer les politiques industrielles, mais les économies nationalisées réduisent la nécessité de détenir des devises.

  • Réputation et conformité
    Le manque de coopération internationale crée un environnement réglementaire complexe, tandis que le nationalisme augmente les risques de réputation pour les entreprises exerçant leurs activités à l’étranger.

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Chapitre 2

Deuxième guerre froide

Dans un monde caractérisé par une deuxième guerre froide, les entreprises ont à composer avec des blocs économiques distincts, organisés autour d’alliances géopolitiques.

Le scénario axé sur la deuxième guerre froide reprend de nombreux aspects de la première guerre froide. Le renforcement des alliances et la concurrence idéologique créent un ordre mondial défini par deux blocs différents. Dans ce scénario, cependant, selon les tendances actuelles, un bloc sera probablement composé des États‑Unis, de l’Union européenne et de leurs alliés, tandis que l’autre bloc sera dirigé par la Chine et ses alliés. Il existe également un troisième bloc de pays largement non alignés ou multialignés qui font l’objet de pressions pour choisir un camp. Les tensions géopolitiques sont fortes et il y a plus de conflits, y compris des guerres par procuration entre les grandes puissances.

La sécurité, plutôt que la logique économique, est le moteur des politiques nationales. Les gouvernements interviennent dans les chaînes d’approvisionnement, limitent les investissements transfrontaliers et imposent des contrôles à l’exportation et d’autres restrictions sur les activités commerciales avec des entreprises d’autres blocs. La technologie est au cœur de la concurrence géopolitique.

Les gouvernements mettent en place des politiques industrielles et un protectionnisme commercial dans un nombre croissant de secteurs géostratégiques, allant de la technologie et de l’énergie à la fabrication de pointe et aux sciences de la vie. Ces politiques sectorielles, conjuguées à une surveillance antitrust réduite, peuvent offrir des possibilités aux grandes entreprises ayant une position dominante sur le marché.

La division de l’économie mondiale en blocs limite l’innovation et les possibilités de croissance du secteur privé. L’accent mis sur l’autonomie au sein des blocs génère un rebond économique mondial plus faible et les barrières commerciales entre blocs forcent les entreprises à réorienter les chaînes d’approvisionnement, ce qui alimente une plus forte inflation. Cette situation a pour effet de réduire la taille de l’environnement d’exploitation mondial des entreprises pour qu’elles se tournent vers des marchés alignés sur leur gouvernement  d’origine.

Dans un monde axé sur la deuxième guerre froide, les entreprises doivent composer avec plusieurs enjeux clés :

  • Revenus
    La rivalité extrême, les barrières commerciales et les risques de conflit élevés entre les blocs limitent les possibilités de croissance des revenus.

  • Croissance et investissements
    Les occasions de F et A et d’autres investissements sont limitées aux marchés alignés sur ceux du gouvernement du pays d’origine d’une entreprise.

  • Exploitation et chaînes d’approvisionnement
    Les entreprises doivent ajuster leurs relations commerciales et leurs chaînes d’approvisionnement pour exercer leurs activités dans le bloc de leur pays d’origine, ce qui, dans bien des cas, entraîne une hausse des coûts.

  • Données et propriété intellectuelle
    Les gouvernements imposent des contrôles à l’exportation des technologies stratégiques et de leurs intrants, y compris les minéraux critiques. Les blocs développent différentes normes et réglementations technologiques, réduisant les flux numériques transfrontaliers.

  • Capital humain
    La mobilité internationale est limitée à la migration intrabloc, ce qui limite l’accès aux bassins de talents mondiaux.

  • Finance et fiscalité
    Les entreprises des secteurs géostratégiques sont susceptibles de recevoir du financement public à faible coût. Les entreprises de chaque bloc comptent sur des devises différentes pour les transactions internationales.

  • Réputation et conformité
    Les normes en matière de réglementation et de produits diffèrent d’un bloc à l’autre, mais le risque élevé lié à l’exercice d’activités dans plusieurs blocs implique que les entreprises sont susceptibles de ne se conformer qu’à une seule norme.
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Chapitre 3

Les amis d’abord

Dans un monde axé sur « les amis d’abord », les entreprises font face à une combinaison de défis et de possibilités dans un environnement géostratégique complexe.

« Les amis d’abord » est un environnement géostratégique moins connu, qui rappelle le début des années 1900. Dans ce scénario, la géopolitique se caractérise par un ensemble complexe d’alliances et de regroupements d’affinités, qui sont parfois institutionnalisées par des accords commerciaux et d’investissement. Les gouvernements donnent la priorité aux chaînes d’approvisionnement stratégiques au sein de leurs alliances, et les entreprises s’orientent vers la « délocalisation amicale » de leurs activités et approvisionnements clés. Malgré ces divisions, les tensions géopolitiques sont contrôlées puisque les gouvernements se concentrent à soutenir la croissance économique nationale.

 

L’élaboration des politiques repose sur des considérations économiques, sécuritaires et de développement durable. Les gouvernements accordent la priorité aux relations économiques avec les pays alliés, mais il y a peu de restrictions sur les flux transfrontaliers en dehors d’un ensemble limité de secteurs stratégiques, y compris les technologies numériques avancées, l’énergie et la fabrication de pointe.

 

La libéralisation des politiques et l’accent accru mis sur la résilience de la chaîne d’approvisionnement et l’optimisation opérationnelle au sein des alliances favorisent une reprise mondiale modérée. Les politiques axées sur « les amis d’abord » créent des pôles technologiques qui soutiennent la croissance de la productivité au sein des pôles régionaux, mais les barrières commerciales globales limitent les gains.

 

Les chefs de la direction doivent concilier les impératifs de développement durable et les pressions géopolitiques avec la dynamique du marché lorsqu’ils prennent des décisions opérationnelles, stratégiques et liées à la chaîne d’approvisionnement. L’importance relative de ces considérations varie selon les secteurs, mais toutes les entreprises se retrouvent dans un environnement géostratégique plus complexe.

 

Dans un monde axé sur « les amis d’abord », les entreprises sont exposées à la fois à des défis et à des possibilités :

  • Revenus
    Une reprise économique mondiale modérée offre de modestes possibilités de croissance des revenus aux entreprises de tous les secteurs et de toutes les régions

  • Croissance et investissements
    Les occasions d’investissement sont nombreuses sur les marchés qui sont favorables aux gouvernements d’origine des entreprises dans un contexte de réorganisation de la présence des entreprises à l’échelle mondiale

  • Exploitation et chaînes d’approvisionnement
    Le développement durable est un enjeu clé pour les gouvernements, les entreprises et les consommateurs, et il justifie fortement les efforts de délocalisation à proximité et de délocalisation intérieure des entreprises.

  • Données et propriété intellectuelle
    La concurrence géopolitique force la délocalisation intérieure ou la délocalisation à proximité des chaînes d’approvisionnement technologiques, ce qui entraîne des technologies et des pratiques de gestion des données divergentes

  • Capital humain
    L’intersection de la technologie, de la mondialisation, de la démographie et des inégalités crée différents environnements de travail au sein des alliances et des regroupements régionaux

  • Finance et fiscalité
    L’inflation et le coût du capital varient selon les marchés et les regroupements d’alliés, tandis que les droits de douane baissent dans un contexte de politique économique plus libéralisé

  • Réputation et conformité
    La gestion des parties prenantes crée divers risques de réputation, tant positifs que négatifs. La conformité est entravée par des accords commerciaux et d’investissement qui se chevauchent.
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Chapitre 4

Mondialisation allégée

Dans un monde où la mondialisation est allégée, les entreprises ont de nombreuses possibilités associées à des marchés plus ouverts, mais aussi quelques défis persistants à relever.

La mondialisation allégée s’apparente à un retour partiel aux années 1990 et au début des années 2000. Le faible niveau de tensions géopolitiques favorise un contexte opérationnel mondial plus stable et prévisible pour les entreprises. Les blocs idéologiques perdent de leur importance à mesure que prennent de l’importance les partenariats axés sur le commerce. Les relations internationales et la résolution de problèmes mondiaux comme les changements climatiques sont davantage multilatérales.

Les considérations économiques ont plus de poids que les raisons de sécurité dans l’élaboration des politiques. L’accès aux marchés et la croissance économique prennent plus d’importance que les considérations géopolitiques dans la politique économique des gouvernements. Par conséquent, les gouvernements délaissent la politique industrielle et l’intervention dans la chaîne d’approvisionnement du début des années 2020 dans tous les secteurs, sauf les plus stratégiques, comme les technologies numériques.

À mesure que la croissance économique mondiale reprend, les alliances perdent de leur pertinence et les contraintes politiques qui pèsent sur la mondialisation s’estompent. Une mondialisation plus forte réduit les barrières commerciales et ravive l’attention portée au progrès technologique, réduisant ainsi l’inflation. La libéralisation stimule la croissance des investissements et de la productivité et améliore le niveau de vie.

Les entreprises sont en mesure de prendre des décisions opérationnelles, stratégiques et liées à la chaîne d’approvisionnement en se fondant en grande partie sur les données fondamentales du marché, bien que les risques politiques continuent de façonner la prise de décisions d’entreprise dans les secteurs de la technologie et de l’énergie. Mais cette nouvelle vague de mondialisation est modérée par les intérêts capitalistes des parties prenantes. Le développement durable est une considération importante dans la chaîne d’approvisionnement et les décisions stratégiques, en raison de la réglementation gouvernementale et de la préférence des parties prenantes.

Dans un monde où la mondialisation est allégée, les entreprises auraient toutes sortes d’occasions à saisir et de défis à relever :

  • Revenus
    La solide performance économique mondiale offre d’importantes possibilités de croissance des revenus pour de nombreuses entreprises.

  • Croissance et investissements
    Une réduction importante des obstacles au commerce et à l’investissement transfrontaliers ouvre la voie à de nouvelles fusions et acquisitions et à d’autres possibilités pour les entreprises internationales.

  • Exploitation et chaînes d’approvisionnement
    L’environnement géopolitique favorise l’efficacité des chaînes d’approvisionnement internationales, bien que les considérations de développement durable favorisent certains projets de délocalisation à proximité.

  • Données et propriété intellectuelle
    Des politiques moins draconiennes quant à la nature géostratégique du secteur technologique accélèrent l’innovation numérique et technologique.

  • Capital humain
    L’innovation et la disruption croissantes créent de tout nouveaux domaines d’emploi, ce qui aggrave le problème des pénuries de main‑d’œuvre qualifiée.

  • Finance et fiscalité
    Les coûts d’investissement sont faibles, compte tenu de l’inflation limitée et de la croissance élevée. Les décideurs politiques imposent un prix plus élevé pour le carbone sur les marchés du monde entier.

  • Réputation et conformité
    La coordination mondiale des normes réduit les coûts de conformité. Le multilatéralisme renouvelé entraîne une diminution des risques de réputation liés à la géopolitique.
Couple walking under umbrella on city street
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Chapitre 5

Comment les chefs de la direction peuvent renforcer leur stratégie géopolitique

Les chefs de la direction et les conseils d’administration doivent prendre trois mesures pour intégrer la planification de scénarios à leur stratégie d’entreprise.

Chacun des quatre scénarios ci‑dessus est vraisemblable à moyen terme, ce qui complique la planification stratégique. Les chefs de la direction doivent intégrer plus d’agilité à leurs activités et à leur stratégie dès maintenant, afin d’être prêts à faire face à l’évolution de la mondialisation. Les chefs de la direction et les conseils d’administration doivent planifier des scénarios pour mettre à jour leur stratégie d’entreprise. La mise en œuvre d’une telle géostratégie se fait en trois étapes :

1. Améliorer votre compréhension de l’environnement géopolitique

Les chefs de la direction et les conseils d’administration devraient continuer de surveiller les risques politiques et les autres mégatendances pour repérer les possibilités et les défis. Ils doivent également s’intéresser de près à la géopolitique pour y déceler des signes annonciateurs de l’avenir de la mondialisation. Les chefs de la direction doivent rechercher de façon proactive ces indicateurs d’alerte précoce et modifier rapidement leur stratégie en conséquence. Divers événements et tendances clés au cours des prochaines années peuvent indiquer quel scénario est en voie de se matérialiser :

  • Les résultats des élections et de la transition des dirigeants dans certains pays clés
  • Les changements dans la rhétorique ou les actions en matière de politique étrangère, en particulier parmi les membres du G20
  • L’instauration ou l’élimination de barrières tarifaires et non tarifaires au commerce
  • La mesure dans laquelle les accords commerciaux régionaux sont mis en place ou élargis
  • L’évolution des dépenses militaires et de la gravité des conflits militaires
  • Les fluctuations des prix mondiaux de l’énergie et des denrées alimentaires
  • Les niveaux de morcellement des normes technologiques mondiales

2. Dix questions clés à se poser

Les chefs de la direction, les conseils d’administration et les équipes de stratégie doivent évaluer les répercussions commerciales de chaque scénario dès maintenant afin de se préparer à des scénarios contradictoires au cours des cinq prochaines années. Ils doivent procéder à une évaluation ascendante au niveau des unités opérationnelles et fonctionnelles et à une évaluation descendante au niveau de l’entreprise. Les chefs de la direction et leurs équipes doivent se poser les dix questions stratégiques suivantes :

  • Quelle sera l’incidence sur notre modèle d’entreprise?
  • Quelle sera notre structure d’entreprise future et comment le portefeuille pourra‑t‑il être remanié?
  • Comment les priorités en matière d’affectation des capitaux et la structure du capital évolueront‑elles?
  • Comment les variations de la demande des clients ou des consommateurs influeront‑elles sur la croissance des produits?
  • Quelle sera l’incidence sur notre stratégie en matière de fusion et d’acquisition?
  • Comment seront touchées les activités opérationnelles et celles des fournisseurs?
  • Dans quelle mesure le partage transfrontalier de technologies, de données sur les clients et d’autres types de propriété intellectuelle sera‑t‑il limité?
  • Jusqu’à quel point y aura‑t‑il des pénuries de talents?
  • Quelle sera l’incidence sur l’accès aux capitaux?
  • Quelle sera l’ampleur et la complexité des sanctions ou des droits de douane qui restreindront les relations avec certains pays ou blocs d’alliés?
     

3. Transformer la stratégie pour tenir compte de l’évolution du monde

Une fois que les chefs de la direction ont obtenu les réponses aux questions ci‑dessus, ils doivent changer de stratégie et prendre des mesures dès aujourd’hui pour permettre à leur entreprise d’atténuer les défis et de saisir les occasions que chaque scénario présente dans les années à venir.

Dans certains cas, les entreprises pourraient devoir transformer leurs chaînes d’approvisionnement pour s’adapter à l’évolution des réalités géopolitiques. Certaines autres pourraient devoir mieux intégrer le risque politique dans leurs stratégies d’acquisition et de désinvestissement. D’autres encore pourraient devoir modifier l’ensemble de leur modèle d’affaires pour se positionner en vue de la croissance dans un contexte géopolitique incertain. Les entreprises doivent prioriser et mettre en œuvre immédiatement les mesures stratégiques qui favoriseraient le plus l’agilité et la robustesse dans les quatre scénarios.

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Chapitre 6

Le rôle des entreprises est de façonner l’avenir de la mondialisation

Les chefs de la direction ont un rôle crucial à jouer en tant que défenseurs du scénario le plus optimiste de notre société, la mondialisation allégée.

Au cours des dernières décennies, la mondialisation a apporté des avantages extraordinaires aux populations du monde entier. Dans les marchés émergents, le commerce a permis à des milliards de personnes de sortir de la pauvreté et d’accéder à des biens et services innovants. Dans les marchés développés, le niveau de vie a continué d’augmenter et la gamme de biens et de services s’est élargie. Les citoyens du monde entier sont devenus plus connectés grâce à des idées partagées, aux chaînes d’approvisionnement internationales, aux employeurs mondiaux et aux voyages.

 

Il y a également eu des inconvénients importants. Des dommages environnementaux ont été causés, en particulier là où la réglementation est faible. Les normes du travail ne sont pas respectées partout. En outre, les inégalités se sont considérablement accrues au sein des pays lorsque les avantages de la mondialisation n’ont pas été largement partagés. De nombreux gouvernements prennent aujourd’hui des mesures pour remédier à ces inconvénients et à bien d’autres encore. Et à juste titre : la mondialisation doit fonctionner pour tous.

 

Toutefois, comme l’illustrent nos scénarios, le monde ne se contente pas de tourner le dos aux inconvénients de la mondialisation. Il devient de plus en plus évident, en particulier à mesure que les tensions géopolitiques augmentent, qu’il tourne également le dos à ses avantages. Cela crée des défis importants pour les entreprises internationales. Mais, plus important encore, la trajectoire actuelle des relations géopolitiques et les positions des politiques économiques menacent désormais la paix et la prospérité mondiales.

 

Les chefs de la direction et d’autres chefs d’entreprise à l’échelle internationale ont un rôle crucial à jouer en tant que défenseurs du scénario le plus optimiste, la mondialisation allégée. Les entreprises doivent continuer à établir et à entretenir des relations avec toutes les parties prenantes, y compris les décideurs politiques, les investisseurs, les employés, les clients et d’autres, afin de soutenir des politiques qui permettent de diffuser plus largement les avantages de la mondialisation et de promouvoir le développement durable et la valeur à long terme partout dans le monde. 

 

Les normes en matière d’environnement et de travail doivent être rigoureuses, les chaînes d’approvisionnement doivent être résilientes face aux chocs, les gains économiques doivent être largement partagés et la sécurité nationale doit être protégée. Mais un glissement vers le protectionnisme, l’autonomie et les conflits économiques (voire militaires) remettra en cause la réalisation de tous ces objectifs. La libre circulation transfrontalière des marchandises, des capitaux, des idées et des personnes fait du monde un endroit plus harmonieux et plus prospère. Les chefs d’entreprise doivent plaider en faveur d’une mondialisation allégée, soit un monde du travail meilleur que celui dans lequel ils exercent leurs activités aujourd’hui.



Résumé

Les chefs de la direction et les conseils d’administration doivent se préparer dès maintenant à l’avenir de la mondialisation. La gestion de l’incertitude quant à l’évolution de la situation géopolitique à moyen terme est un défi. Mais les chefs de la direction et les conseils d’administration ne peuvent pas attendre de connaître les détails avant de définir leur stratégie future. Ils doivent plutôt agir dès maintenant pour prendre des décisions stratégiques qui positionnent leur entreprise de manière à ce qu’elle puisse prospérer pendant les périodes de turbulence à venir.


 Écoutez le chef de la direction de Discovery Limited se prononcer sur l’atteinte de l’équilibre entre l’innovation et la solidité des fonds propres.

« Une entreprise doit être fondée sur une conviction profonde, des gens remarquables et un capital de base adéquat. » Adrian Gore, chef de la direction, nous parle de la façon de stimuler la croissance.

Cette vidéo est présentée dans la langue originale de production.

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