À l’aube d’une nouvelle année, les organisations sont aux prises avec un environnement difficile dont la dynamique fluctue au gré de différentes forces macroéconomiques. Les changements d’ordre économique et géopolitique, et en matière de main‑d’œuvre qui se succèdent depuis quelques années continuent de transformer radicalement les conditions qui permettent aux entreprises d’exceller et d’envisager l’avenir.
Alors, qu’est‑ce qui distingue les organisations prospères? Les différentes données et informations que nous avons étudiées semblent toutes indiquer que la réponse à cette question réside dans les talents.
Il s’agit pourtant d’un concept complexe. Depuis des décennies, les dirigeants considèrent que les employés constituent le plus grand atout de leur organisation. Il en va toujours ainsi, mais au lieu de nous demander ce que les talents représentent, nous devrions maintenant tenter plutôt de déterminer le rôle qu’ils jouent dans la réussite.
Selon ce qui ressort du sondage sur le travail réinventé qu’EY a réalisé en 2024 auprès d’un éventail d’employés et d’employeurs à l’échelle mondiale, les 32 % d’organisations ayant indiqué disposer d’un Avantage RH sont :
- 7,8 fois plus susceptibles que les autres de considérer avoir su composer avec succès avec les pressions externes;
- 6,5 fois plus susceptibles que les autres de déclarer avoir réalisé des gains de productivité considérables au cours des deux dernières années;
- 5,8 fois plus susceptibles que les autres d’affirmer obtenir des résultats nettement supérieurs aux prévisions, malgré la conjoncture économique actuelle.
Comment savoir si une organisation dispose d’un Avantage RH?
Alors qu’entend‑on par Avantage RH? Dans le cadre de notre étude, nous avons constaté que ce qui permet de tirer un avantage concurrentiel de l’atout unique que constituent les talents, c’est la capacité d’une organisation à exceller dans cinq dimensions clés :
- L’état d’esprit des ressources humaines et les flux de main‑d’œuvre : les flux de main‑d’œuvresont un élément fondamental et le roulement du personnel n’est plus une mesure de la santé organisationnelle. L’état d’esprit des ressources humaines est défini par le taux net de recommandation, qui constitue un indicateur de la probabilité qu’un employé recommande son employeur à ses amis et aux membres de sa famille.
- Les activités d’apprentissage, les compétences et les cheminements de carrière : Le comment et le pourquoi du perfectionnement professionnel sont alignés, ce qui renforce la mobilité de la main‑d’œuvre et optimise le temps précieux consacré au perfectionnement.
- Les priorités en matière de rémunération globale : Les programmes reflètent les priorités des employés et répondent aux besoins divers de chaque segment des effectifs.
- La culture organisationnelle et les environnements de travail : L’émancipation des équipes est une réalité et met en lumière la nécessité d’humaniser l’expérience du travail.
- Les technologies de travail et l’IA générative : La souplesse dans l’adoption de l’IA générative pour améliorer l’expérience des employés.
De quelle manière les organisations disposant d’un Avantage RH se distinguent‑elles au sein du marché?
Avons‑nous un bon bassin de ressources humaines? C’est la question qui hante les cadres supérieurs la nuit alors que la crainte que des lacunes en matière de talents viennent contrecarrer leurs initiatives stratégiques et la réussite globale de leur entreprise les empêche de fermer l’œil. Les dirigeants ont l’habitude d’examiner diverses mesures comme l’ancienneté, le taux d’attrition potentiel et le roulement du personnel pour déterminer dans quelle mesure leur bassin de ressources humaines est sain. Mais est‑ce que ces mesures permettent de brosser un portrait fidèle de la réalité?
La fluidité des talents, qui s’impose comme la nouvelle norme en raison de l’évolution de la dynamique d’affaires et du marché du travail, redéfinit l’environnement des RH dans toutes les industries et tous les secteurs. Les employés se déplacent librement d’une région, d’un secteur et d’un employeur à l’autre pour acquérir de nouvelles expériences et développer leurs compétences. Afin de s’adapter à cette nouvelle réalité, les organisations doivent jauger leur bassin de ressources humaines de différentes façons, comme en évaluant la probabilité qu’un employé recommande son employeur à un ami ou à un membre de sa famille.
État d’esprit des ressources humaines et flux de main‑d’œuvre
Dans le cadre du sondage mondial sur le travail réinventé qu’EY a réalisé en 2024, nous avons relevé 12 variables en fonction desquelles nous avons ensuite établi un score de l’état d’esprit des ressources humaines fondé sur le score total de chaque composante, normalisé sur une échelle de 0 à 100. Plus le score est élevé, plus l’état d’esprit des ressources humaines est bon.
Selon les résultats de notre sondage, les scores de l’état d’esprit des ressources humaines se situent entre 29 et 75 sur 100 à l’échelle mondiale, le score moyen s’établissant à 55.
Le Canada affiche un score de 48, ce qui est inférieur à la moyenne. Bien qu’il n’indique pas directement que les organisations canadiennes font face à une pénurie de talents, ce score peut donner à penser que les employeurs ne sont pas à la hauteur des attentes des employés et qu’ils ne s’adaptent pas efficacement à l’évolution du marché des talents au Canada. La probabilité que les employés quittent leur emploi ayant augmenté de 8 % par rapport à la même période il y a un an, les organisations canadiennes doivent impérativement prendre des mesures pour améliorer leurs scores de l’état d’esprit des ressources humaines.
Alors que peuvent‑elles faire pour s’attaquer à cet enjeu?
Dans le cadre de notre étude, nous avons effectué plusieurs analyses de régression pour les 12 variables, ce qui a permis d’établir trois grandes catégories : possibilités de perfectionnement, avantages et culture organisationnelle. Ces critères clés ont une incidence sur l’état d’esprit global des ressources humaines et déterminent si une organisation dispose d’un Avantage RH.
1. Possibilités de perfectionnement
De nombreuses études menées par EY ont montré qu’il existe un déséquilibre entre les employeurs et les employés en ce qui a trait à la nécessité d’améliorer les possibilités de perfectionnement. La formation continue, conjuguée au renforcement et à l’actualisation des compétences, est un élément mentionné par les deux groupes. Cependant, lorsqu’il s’agit d’évaluer l’efficacité de l’apprentissage continu offert par une organisation, les employés semblent clairement préconiser une approche différente.
En comparant les réponses des employeurs et celles des employés, nous avons observé un écart négatif modéré de 6 % au chapitre de la prestation d’activités d’apprentissage selon les employés au Canada, combiné à un déficit de 17 % concernant le caractère suffisant du temps consacré à la formation. Cela signifie que même si les employeurs offrent généralement la quantité d’activités d’apprentissage sur laquelle comptent les employés, la valeur de cet investissement n’est pas véritablement réalisée ou capitalisée parce que les employés n’ont pas l’impression d’avoir vraiment le temps d’apprendre.
Exception faite des types de perfectionnement traditionnels, l’enjeu est encore plus important alors que nous avons observé entre les perceptions des employeurs et celles des employés un écart de 22 % au chapitre des possibilités de mobilité en interne et un écart de 29 % en ce qui concerne l’exposition et les possibilités à l’échelle internationale. L’angle mort ainsi révélé est considérable. Les organisations devront investir dans l’amélioration des activités de perfectionnement afin d’obtenir un meilleur score pour cet aspect de l’Avantage RH.
2. Avantages
Les employés souhaitent obtenir de meilleurs avantages. Il n’est pas toujours facile ni possible de satisfaire cette demande. Notre étude montre que les organisations qui disposent d’un Avantage RH abordent la question des avantages d’une manière légèrement différente pour réaliser des progrès et combler les lacunes à l’égard des attentes des employés. Voici deux questions clés que ces employeurs se posent dans l’ensemble :
« Est-ce que donner plus, c’est mieux? » Pas nécessairement. Selon les résultats du sondage sur le travail réinventé qu’EY a réalisé en 2024, nous avons constaté que les employés au Canada ne se préoccupent pas outre mesure du caractère équitable et concurrentiel de leur rémunération. Le fait que les programmes de rémunération des employeurs reflètent les meilleures pratiques du marché ou que la rémunération tient compte du rendement individuel et de celui des équipes a moins d’incidence sur la satisfaction des employés. Il est souvent plus efficace de procurer une rémunération de la bonne façon que d’en offrir davantage. C’est une question de qualité plutôt que de quantité.
« La rémunération devrait-elle être un bloc monolithique? » La composition de plus en plus complexe de la main‑d’œuvre engendre une diversification des priorités en matière de rémunération parmi les employés. C’est ce que nous constatons au Canada, où nous avons observé un écart négatif de 10 % dans la façon dont les employés perçoivent les choix personnels offerts par leurs programmes de rémunération et un écart de 12 % dans la façon dont les programmes répondent à leurs besoins personnels. Un programme qui permet aux employés de personnaliser la composition de leurs avantages s’avère plus efficace et productif dans l’ensemble.
3. Culture organisationnelle
La culture a des répercussions indéniables sur les résultats d’une entreprise et l’état d’esprit de ses ressources humaines. Dans une culture forte, les ressources humaines sont unies par des valeurs, des convictions et des attitudes qui favorisent la réussite de l’entreprise et de la main‑d’œuvre. Mais est‑ce que les employés reconnaissent et comprennent l’importance de la culture organisationnelle?
Pas toujours. Pour ce qui est de savoir si la culture organisationnelle s’est améliorée au cours de la dernière année, les résultats du Sondage sur le travail réinventé d’EY révèlent un écart de perception de 26 % entre les employeurs et les employés du Canada. Cette question était déjà un sujet de préoccupation dans le sondage précédent.
Qui plus est, nous observons un écart négatif constant quant à la façon dont les employés perçoivent la culture organisationnelle. Malgré un léger écart persistant en lien avec certains aspects opérationnels comme l’équilibre de la charge de travail et le fait de se sentir soutenu dans son travail, les principaux sujets de préoccupation concernent des aspects plus profonds de l’expérience des employés. Selon nos constatations, les écarts suivants existent entre les perceptions des employés et celles des employeurs : 26 % quant à la capacité des organisations d’innover; 24 % quant à l’attention que les dirigeants accordent au bien‑être personnel de leurs employés et 18 % quant au niveau d’autonomie et de contrôle sur le travail.
Ces écarts montrent une divergence manifeste en ce qui concerne l’établissement de la culture organisationnelle au Canada : les employeurs se distinguent par l’importance accrue qu’ils accordent à certains éléments de la culture touchant des aspects plus larges et approfondis de l’expérience intrinsèque. Une culture organisationnelle élaborée en plaçant véritablement l’humain@centre suscite l’adhésion des employés d’une manière beaucoup plus efficace qui peut contribuer à rehausser le programme de gestion des talents dans son ensemble.